Assiette de madeleines faites maison par Justin Busch

Dimanche avec les Verdurin

On reprend encore une fois Du côté de chez Swann. Cette fois, je n’ai avancé que de 30 pages.

Si on n’était pas déjà convaincus que les Verdurin étaient une belle paire d’ordures, on apprend rapidement que Mme fait semblant d’être malade autour de ses invités :

Peut-être aussi, à force de dire qu’elle serait malade, y avait-il des moments où elle ne se rappelait plus que c’était un mensonge et prenait une âme de malade.

Il suit plusieurs pages de parler sur l’expérience de Swann en écoutant le pianiste à la soirée. Après des extases, on apprend que :

ne se sentant plus d’idées élevées dans l’esprit, il avait cessé de croire à leur réalité

Monsieur manque, ou plus précisément a abandonné, de vie intérieure, ayant visé toute son attention sur ses clients et le défilé de femmes qui passent par sa vie (dont on en a parlé la dernière fois). Il se passe que la musique qui a provoqué Swann de réfléchir sur ces affaires a été écrit par un certain Vinteuil — est-ce qu’il est le professeur du village, mort dans l’obscurité sans être reconnu pour ses compositions ? Le livre est très ambigu sur ce point — certainement, Swann pense que c’est impossible :

Je connais bien quelqu’un qui s’appelle Vinteuil, dit Swann, en pensant au professeur de piano des sœurs de ma grand’mère.

— C’est peut-être lui, s’écria Mme Verdurin.

— Oh ! non, répondit Swann en riant. Si vous l’aviez vu deux minutes, vous ne vous poseriez pas la question.

Mais il serait hyper-Proustien pour ceci d’être le cas après tout ça !

Puis Swann lâche — et il faut supposer que Proust est hyper-ironique ici, en lui donnant un air d’ennui — qu’il connaît M. le Président :

…je déjeune justement demain avec le Préfet de police à l’Élysée.

— Comment ça, à l’Élysée ? cria le docteur Cottard d’une voix tonnante.

— Oui, chez M. Grévy, répondit Swann, un peu gêné de l’effet que sa phrase avait produit.

Imaginez dire ça de nos jours, avec les photographes et les journalistes partout. Impossible de garder un tel secret.

Vous souvenez-vous que Swann avait tombé amoureux d’une certaine Odette de Crécy ? Voici comment l’ordure gère l’affaire :

Et, d’autre part, préférant infiniment à celle d’Odette la beauté d’une petite ouvrière fraîche et bouffie comme une rose et dont il était épris, il aimait mieux passer le commencement de la soirée avec elle, étant sûr de voir Odette ensuite. 

Il y a une expression argotique en anglais qui me vient à l’esprit, « side chick » (une façon très dédaigneuse, ainsi qu’hyper-informelle, de dire maîtresse). Franchement, je suis dégoûté. La situation ne s’améliore pas (à mes yeux), après l’une de ses très rare visites chez elle, quand il se pense :

« Ce serait bien agréable d’avoir ainsi une petite personne chez qui on pourrait trouver cette chose rare, du bon thé. »

Très romantique, notre Swann. Il y a des domestiques pour ça.

Des pages passent où Swann se convainc qu’Odette lui rappelle un certain tableau du peintre italien, Botticelli. Cette partie semble être lá pour nous dire qu’il cherche vraiment une raison pour s’intéresser à elle. Ce n’est pas le coup de foudre s’il doit inventer des raisons, c’est certain.

Mais notre séjour chez les Verdurin se termine avec une autre de leurs conversations condescendantes sur leurs invités. Vous allez vraiment les aimer :

— À moi, elle me l’aurait dit, répliqua fièrement Mme Verdurin. Je vous dis qu’elle me raconte toutes ses petites affaires ! Comme elle n’a plus personne en ce moment, je lui ai dit qu’elle devrait coucher avec lui.

Honnêtement, et je ne sais pas s’il y a une meilleure façon de dire ça, Mme Verdurin devrait vraiment s’occuper de ses oignons. Ce n’est pas son affaire !

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