Archives mensuelles : janvier 2023

Je découvre l’Orne

On continue maintenant le Tour avec le 61, l’Orne. C’est le département le vingt-troisième moins peuplé, et les habitants se nomment ornais. C’est notre quatrième séjour en Normandie ; il ne nous reste qu’un département normand de plus. Ça me rend triste, parce que comme je vous ai dit, la Normandie aura toujours un avantage injuste chez moi. Et oh là là, vous allez voir exactement à quel point cet avantage existe aujourd’hui !

On commence à la préfecture, Alençon, et surtout avec exactement le genre de renseignement que j’adore, quand les Français m’aident à trouver des pépites. C’est un M. Brisavoine, connaissance de Mme Moutet, qui m’a parlé sur Twitter des vitraux, surtout de l’Arbre de Jesse, de la Basilique de Notre-Dame (1 étoile Michelin). Cette église de la Guerre de Cent Ans, récemment devenue basilique, est aussi remarquable pour ses reliquaires des 3 saints de la famille Martin, Louis, Zélie, et leur fille, Sainte-Thérèse de Lisieux. Avec une telle richesse spirituelle, on passe aussi par la maison natale de Sainte-Thérèse, de nos jours le Sanctuaire Louis et Zélie.

Au Musée des Beaux-Arts et de la Dentelle (1 étoile), on arrête pour les deux collections nommées, dont des œuvres de Courbet et Watteau, ainsi que pour leur collection d’art cambodgien. Aux alentours de la ville, on visite Saint-Céneri-le-Gérei (1 étoile), l’un des Plus Beaux Villages de France, connu pour sa chapelle du XIVe siècle, ses ateliers d’artistes, et son ancienne auberge des sœurs Moisy, dont sa « salle de décapités ». Ce sont des dessins de profils, rien à voir avec Mme Guillotine. ([Dommage, j’avais envie d’en ajouter un. — Mon ex])

Notre prochain arrêt est Carrouges, pour son château (2 étoiles) très inhabituel en briques au lieu de pierres, avec un escalier d’honneur impressionnant, et le site du dernier duel judiciaire de l’histoire en 1386. Je vous conseille ces deux posts du Chat Voyageur pour explorer l’extérieur et l’intérieur en détail. Puis c’est la vieille ville (1 étoile) de Domfront, où on y trouve les ruines des vieux remparts, le donjon de l’ancien château et son jardin public (1 étoile), ainsi que l’Église Saint-Julien (1 étoile), une église en béton du XXe siècle. On part vers l’est, à Argentan, pour deux sites remarqués par Louloute au Chat Voyageur : le Musée Fernand Léger, consacré à l’artiste qui y est né, et le Mémorial de Montormel, (site officiel) où l’armée allemande a bien perdu la Bataille de Normandie en août 1944.

D’Argentan, on tourne un peu au sud-est pour Sées, à ne pas confondre avec See’s, le chocolatier californien célèbre. Mais en passant, on pourrait s’arrêter au Château de Sassy (site officiel), avec un spectaculaire jardin à la française selon les photos de Louloute. À Sées, on visite d’abord la Cathédrale (2 étoiles), érigée du XIIIe au XIVe siècle, avec encore plus de merveilleux vitraux et un autel en marbre du temps de Louis XVI. Puis on visite la Forêt d’Écouves (2 étoiles), pour faire de la randonnée parmi les « chênes, hêtres, sapins, pins sylvestres, et épicéas ».

Un peu à l’est de Sées, on va arrêter à un endroit très important à moi personnellement, l’Abbaye de La Trappe à Soligny-la-Trappe. Les Trappistes sont l’ordre du moine américain Thomas Merton, dont son autobiographie m’a mené aux pensées de Saint-John-Henry-Newman, le modèle pour toute ma personnalité (j’échoue, évidemment, n’étant pas saint).Le reste des américains veulent y passer car notre meilleur gâteau de fruits de Noël est fabriqué par les Trappistes. Si vous ne voulez pas m’accompagner par là, essayez le Musée de l’émigration française au Canada, très proche à Tourouvre-au-Perche. Nous n’avons que deux arrêts de plus. D’abord, le Haras national du Pin (2 étoiles), surnommé le « Versailles du cheval », où on peut assister à des spectacles de chevaux ou découvrir les écuries (ces deux derniers liens sont aussi au Chat Voyageur). On finit à Camembert, village de naissance du fromage célèbre, pour visiter la Maison du Camembert ou la fromagerie Durand, la seule qui reste dans le village lui-même.

Qui sont les personnages les plus connus de l’Orne ? Il y a l’écrivain célèbre, André Breton, né à Tinchebray malgré son nom de famille et fils d’un père des Vosges. Quelle famille perplexe sur la géographie ! Le philosophe et mouche du coche Michel Onfray (je le connais depuis les années 90) est né à Argentan, ainsi que le peintre Fernand Léger (consultez le Chat Voyageur pour plus d’infos) et le linguiste Paul Teyssier. Héroïne du blog et cauchemar des fabricants de baignoires Charlotte Corday est née à Ligneries. Sainte-Thérèse de Lisieux, de qui nous avons aussi parlé dans le Calvados, est née à Alençon, ainsi que le chanteur tragiquement décédé Daniel Balavoine. Marie Harel, inventrice du camembert — le fromage le plus important de la série Miraculous ! — est née à Crouttes.

Quoi manger dans l’Orne ? Est-ce une question ? Le camembert ! Il faut que nous distinguions entre le camembert AOP et le truc vendu aux États-Unis, même importé de la France. Disons-le ensemble : « fromage au lait cru ». Des plats locaux comprennent les tripes en brochette de La Ferté-Macé (à vous), le boudin blanc d’Essay, le boudin noir de Montagne, et la poule au blanc. En dessert, on y trouve la tarte normande, la crêpe à la normande et d’autres spécialités aux pommes. Pour boire, il y a du calvados et du cidre, comme partout en Normandie, ainsi que le poiré, un cidre à base de poires.

Épisode 46 — des dons et des réussites

J’ai essayé quelque chose de nouveau ce week-end. J’ai assisté à une conversation organisée par l’Alliance française, qui a lieu à Moulin tous les deux week-ends. D’une part, n’importe quelle raison pour y aller pour un Saint-Honoré ou un mille-feuille (j’aurai du mal à ne pas appeler ce dernier un « Napoléon » pour toujours) est une bonne raison. D’autre part, c’est pour tous les niveaux. J’ai pas de dent contre les novices, mais j’aimerais trouver un groupe plus avancé.

En parlant d’avoir une dent contre quelqu’un, nous avons dû faire baigner M. Descarottes aujourd’hui. C’est aussi effrayant pour ma fille et moi que pour lui, parce que nous avons peur qu’il aille sauter de l’évier. Si vous n’avez jamais vu un cobaye en train de se secouer afin de se sécher, c’est l’un des trucs les plus violents que j’ai vus. Voici une photo de son dernier bain ; il n’était pas content de moi. ([Je n’en suis toujours pas, sale #%+=€ ! — M. Descarottes])

De toute façon, notre blague de la semaine traite d’apprendre de nouvelles langues. Nos articles sont :

Il y a aussi Mon dîner oisien, avec des recettes du potage Crécy et de la mousse au chocolat avec de la crème Chantilly, et Ne dites pas « les Français » !, un moment bête de la vie anglophone.

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Ne dites pas « les Français » !

Ne me regardez pas comme ça, je suis ici pour vous parler du point auquel nos agences de presse anglophones sont connes. Je n’arrive toujours pas à croire que ça s’est passé.

Tout a commencé quand l’Associated Press a tweeté cet œuvre de génie :

Ça dit, et je suis vraiment désolé parce que vous allez devenir plus stupide en le lisant :

Nous recommandons d’éviter des étiquettes « le/la » générales et souvent déshumanisantes telles que les pauvres, les malades mentaux, les Français, les handicapés, les diplômés. Dites plutôt des choses comme « des personnes avec des malades mentaux ». Et utilisez-les seulement quand bien pertinent. [emphase ajoutée]

Je ne peux pas vous donner un lien vers le tweet original, parce qu’ils l’ont déjà supprimé avec une excuse qui a répété exactement la même chose : faut pas parler de groupes au singulier. Mais comme vous pouvez imaginer, certains ont saisi l’opportunité pour dire « évidemment, faut pas répéter « les malades mentaux » en disant les Français » :

Ha. Ha. Ha. Si drôle ! Évidemment il a dû y réfléchir pendant des heures pour l’avoir !

Puis il y avait plein de réponses comme celle-ci à l’excuse, « Félicitations, pour la première fois, on s’est rendu aux Français » :

J’en ai marre de ce genre de blague. Mais si nous sommes honnêtes, Versailles serait bondé pour toujours si on y emmenait tous les gens qui ont besoin de voir la Galerie des Batailles.

Heureusement, l’ambassade a eu la bonne réponse — « Je suppose que c’est nous maintenant, l’ambassade de francité aux États-Unis » :

Franchement, c’était juste un autre jour qui se termine par « y », comme on dit en anglais. (parce que tous les noms de jours en anglais se terminent ainsi). La langue anglaise dans toute sa splendeur, mesdames et messieurs ! Comprenez-vous maintenant pourquoi tout ceci ?

Prospérine Virgule-Point et la phrase sans fin

D’abord, je dois vous dire que cet article existe seulement grâce à l’aide de Light & Smell. Après sa critique de ce livre, qui m’a donné envie de le lire, elle a entendu parler que je ne pouvais pas l’acheter sur Kindle aux États-Unis, et m’a dit qu’elle allait régler le problème. Je n’arrive plus à trouver la bonne conversation, mais je me souviens qu’elle a enfin parlé à l’éditeur. Quelques semaines plus tard, voilà ! J’en ai besoin parce que ça me permet de chercher rapidement des mots dans un dictionnaire. De toute façon, je l’ai acheté le 11 novembre, et je viens de lire les 50 dernières pages en une nuit après mon examen mercredi !

Il y a à peu près 35 ans, j’ai lu l’un des livres les plus importants de ma vie, The Phantom Tollbooth (Le Péage fantôme). En anglais, naturellement, où c’est un classique de la littérature de jeunesse. Dans ce livre-là, un enfant, Milo, voyage à travers un monde où les maths et les langues sont bien réels, où on déclame son dîner, puis on mange littéralement ses mots.

Prospérine Virgule-Point me rappelle — tout heureusement — mon ancien livre. Tout d’abord, ce livre commence avec une des phrases les plus drôles que j’ai lues :

À l’époque, ce mariage avait fait scandale, car il n’était pas courant pour deux clans aussi importants que les Point et les Virgule de se mélanger et d’oser lier leurs noms par un vilain trait d’union.

Chapitre 1

Un vilain trait d’union ! L’idée elle-même est ridicule ! Pourtant, ça annonce exactement quel genre de livre on va lire. Au cas où ce serait pas clair, quelques pages plus tard, on lit :

Mme Virgule-Point n’appelait jamais son époux autrement que par son grade. Il y avait à ce formalisme une explication très simple : le maréchal avait perdu son prénom durant la guerre contre les Trémas. Cette blessure sur le champ de bataille lui avait d’ailleurs valu les honneurs militaires.

Chapitre 1

Est-ce assez clair ? Un autre exemple : un type plutôt désagréable, un certain Honoré Point-Virgule, parle avec un accent Où Tout Ce Qu’il Dit Commence Par Des Majuscules. (Plus tard, nous rencontrons sa fiancée. Elle Est Encore Pire. Au Moins Honoré s’arrête Parfois.) Où a-t-il appris ça ? À la Capitale, naturellement. Le truc dingue, c’est que je n’arrive même pas à imaginer le son dans les têtes des personnages, mais j’ai fortement l’idée qu’il sonne exactement comme la famille royale britannique, ou La Chenille d’Alice au pays des merveilles (au moins en VO). Le style de l’autrice se prête bien à l’imagination du lecteur, peu importe si on ne peut pas vraiment expérimenter son monde fictif.

Est-ce que je dois vous dire quelle monnaie s’utilise dans ce monde ? L’euro ? Bien sûr que non. Le franc ? Pas non plus. C’est le Livre, naturellement.

Au fait, pour mieux comprendre le monde du roman, les personnages du livre savent qu’ils doivent leur existence à la littérature française (et appellent notre monde le monde réel), mais ne sont pas français eux-mêmes, ni des personnages de la littérature non plus. Ça peut être un peu déroutant, et je me demandais à plusieurs fois s’ils étaient tous faits d’encre, mais c’est apparemment pas le cas. Disons que l’on peut se rendre fou en trop pensant aux règles qui gouvernent le monde de Prospérine. Il vaut mieux d’en profiter.

Il y a un tueur à gages, un certain M. A-N-O-N-Y-M-E, qui se dévoile comme antagoniste important. Je ne veux pas jouer le divulgâcheur, mais dans Chapitre 7 (de 22), son chef lui dit quelque chose qui m’a étonné :

Quant à vos Point et vos Virgule, je vais envoyer une Mary-Sue les surveiller.

Chapitre 7

Au moment de le lire, je me suis devenu fou en me demandant « On parle de la même idée d’un personnage avec trop de compétences et sans défauts qu’on entend par ce nom en anglais ? Je rêve, sûrement ! » Mais oui, c’est bel et bien elle, tirée originalement (lien en français !) des magazines de fans de Star Trek. Il me rend bien heureux de partager cette idée sans devoir l’expliquer.

Et je dois ajouter que pour autant que ce monde apparaisse mignon, pour autant que certaines choses soient difficiles à imaginer, quand M. A-N-O-N-Y-M-E font ses crimes, c’est horrifiant. L’autrice a un talent indéniable pour faire croire le lecteur à la gravité de ce monde. Tout ce parler d’encre et de ponctuation n’empêche pas l’immersion dans cette réalité et j’ai fini par détester M. A-N-O-N-Y-M-E (parmi d’autres) autant que n’importe quel meurtrier quotidien.

Mais c’est une chose de parler du monde que l’autrice a créé. Comment est-ce en tant qu’histoire ? Étonnant. Je me suis trompé sur tout dès le départ — je croyais au début que « la phrase sans fin » serait quelque chose comme « L’Histoire sans fin », qui se renouvelle éternellement. Mais en fait, c’est plutôt littéralement une phrase qui n’est pas terminée (on l’apprend vite), et ça a des conséquences graves. Sauf pour notre héroïne, je me suis trompé du destin de chacun et tous des personnages. Pourtant, il y a des indices pour le lecteur patient (et qui ne galère pas autant avec la langue). La fin est bien logique, et ma seule plainte est qu’elle se déroule plutôt vite dans les 30 dernières pages. Pourtant, je ne dirais jamais qu’il y a même la moindre partie gaspillée — ce monde est un tel délice qu’il vaut bien le coup d’y passer du temps.

J’avoue que je suis plus qu’un peu surpris que ce roman est considéré « de jeunesse ». C’est un roman fantastique, bien sûr, mais en plus de tous les jeux de mots, j’ai du mal à croire qu’un roman aussi complexe, de plus de 300 pages, convienne aux enfants de l’âge collégial.

Pour la troisième fois en trois essais, Mme Light & Smell a recommandé un livre qui valait tous mes efforts de le lire. À mon tour, je vais le recommander dans le groupe privé de l’OCA, car j’espère qu’il gagnera assez d’exemplaires vendus pour que l’édition sorte plus de livres aux États-Unis. J’espère certainement lire plus de livres par l’autrice, Mme Dargelos !

Le retour du m’as-tu-vu

Si je suis honnête, « m’as-tu-vu » est mon mot préféré de tout le vocabulaire de toutes les langues que je connais. J’adore sa sonorité. J’adore sa structure, la question qui ne l’est vraiment pas. Et étant une grosse ordure, j’adore me décrire de cette façon. ([C’est en fait le truc le plus gentil que je dirais chez vous. — Mon ex]) Mais oh là là, j’ai une raison cette semaine !

Les certifications d’ACTFL restent valides pendant deux ans. C’est pour ça que j’espère que je prendrai finalement l’examen DELF ou bien le DALF cette année, et ne plus avoir besoin de m’inquiéter. De toute façon, puisque ma certification de lecture était sur le point d’expirer — et peut-être que j’en ai besoin pour mon CV — j’ai donc pris les examens de lecture et d’écoute mercredi. Voici les résultats :

Un niveau de « avancé-haut », reçu pour la lecture, ça vaut un niveau C1. Mon rêve est enfin réussi, au moins partiellement. Un niveau de « avancé-mi », pour l’écoute, c’est seulement un B2, mais c’est toujours une amélioration. C’était « avancé-bas » l’année dernière. Encore une fois, voici le son de succès.

Je suis absolument interdit de parler des contenus de l’examen. J’ai dû signer de nombreux accords qui leur donnent le droit de me bannir pendant 5 ans si je mentionne le moindre détail. Alors, je dirai rien sur les questions. Mais fais-moi confiance, j’aimerais tellement cafarder sur les employés chargés d’administrer les tests ! J’ai dû recommencer celui de lecture quatre fois à cause d’erreurs de leur part !

Je considère que tout ça sert à valider ma stratégie. Il n’y a rien de plus d’apprendre des logiciels. Lire des romans, écouter la radio, la télé — la vie quotidienne, tout court — ce sont les meilleurs guides à ce point. J’ai pas envie de tomber dans la connerie des réseaux sociaux, alors il me faudra trouver une source d’études plus formelles. Je soupçonne que ça s’appellera « l’Alliance française », mais en ce moment, leur horaire ne me convient pas.

Cerise sur le gâteau, demain on se réunira pour un article que je ne m’attendais pas à finir jusqu’à 2-3 semaines plus tard. Mais avec cette nouvelle, j’ai tout à coup trouvé la confiance — et l’endurance — de mettre fin à une tâche difficile. Certains devineront vite la bonne chose — merci de ne pas la divulgâcher dans les commentaires.

Mon dîner oisien

Il y a des fois où j’ai franchement aucune idée de ce que je cuisinerai pour un département après son « Je découvre », pourtant le dîner finit par devenir un vrai coup de cœur. Je pense surtout à la Corse-du-Sud, à l’Eure, à l’Isère… et désormais, à l’Oise. J’adore les deux plats de ce dîner, qui feront partie de ma quotidienne. Tous les deux sont plutôt faciles, mais ont l’air d’un million de dollars, comme on dirait en anglais. Voici le potage Crécy et la mousse au chocolat et au Cointreau avec de la crème Chantilly :

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Not faire

En anglais, « fair » (en tant qu’adjectif) veut dire « juste ». On le prononce d’exactement la même façon que « faire ». Alors comme notre ami Calimero, qui se plaignait tout le temps que c’était vraiment trop injuste, les enfants anglophones se plaignent que « it’s not fair. » Mais moi, j’ai une autre plainte sur faire.

On l’utilise beaucoup trop.

Je suis aussi coupable que n’importe qui. On a la même mauvaise attitude paresseuse en anglais. Et les japonais, eux aussi. Nous disons tous « faire » ou « do » ou «する» (suru) comme s’il n’y a aucun autre verbe dans les langues. On fait les courses, les valises, le parcours, les magasins, un tour — il n’y a presque rien que faire n’arrive pas à… euh… faire. En anglais, ma mère a un coup de faire assez grave qu’elle dit « do the candles » (faire les bougies) pour dire « allumer les chandelles sur un gâteau ». Chez les japonais, c’est assez grave qu’ils disent « ai shimasu » pour « je t’aime » — c’est à dire qu’ils font l’action d’aimer quelqu’un.

Il s’avère que je suis très loin d’être le seul à se plaindre de ce problème. J’ai cherché « verbes au lieu de faire » avec le but de trouver ceux qui en avaient marre de faire, autant que moi. J’étais pas déçu.

Par exemple, j’ai trouvé un épisode d’un podcast qui parle d’une belle dizaine de synonymes pour faire, et je ne savais même pas qu’on pourrait utiliser faire dans certains de ces cas !

Il mentionne dire « Ça fait combien ? » et le remplacer faire par coûter. Mais moi, j’ai seulement appris coûter pour ceci ! Je ne suis pas sûr que j’aurais compris le sens s’il ne l’avait pas donné !

Autre exemple : Il donne deux phrases, « Je ne m’y fais pas. Je ne m’y habitue pas. » Encore une fois, je connaissais seulement « s’habituer » pour cette utilisation ! Peut-être que le hibou vert n’était pas aussi idiote que l’on en pense.

J’ai trouvé aussi cette leçon d’un lycée rouennais. Ils font la polémique contre plusieurs verbes, non pas seulement faire — et contre « chose » aussi ! Au lieu d’avoir, ils suggèrent « comporter », « éprouver », « poursuivre », etc. Mais il faut… euh… fabriquer attention : ces mots veulent dire des… hein, comment dire selon eux… ustensiles très particuliers. On « éprouve » des sentiments, on n’éprouve pas un stylo dans sa trousse. C’est peut-être pas si facile de tout simplement remplacer faire, ni avoir non plus. Voyons.

Le tour est quand même fait joué. Je ressens ai envie de faire composer des phrases presque aussi compliqués que dans mes livres. Je tombe suis toujours pas fini avec Prospérine Virgule-Point et la phrase sans fin (80 %), mais je remarque que dans ce roman, personne ne « dit » jamais rien. Ils bafouillent, ils marmonnent, ils grondent, mais disent ? Jamais. (11 fois dans les 100 premières pages, mais presque toujours dans les paroles d’un personnage.) Je peux confectionner faire ça, je vous gronde dis !

Langue de Molière vous reverra la semaine prochaine mais encore une fois, je ne sais toujours pas quel sera le sujet.

Le don de sang

Aujourd’hui, je serai rien que sérieux en vous racontant une histoire.

En décembre 2021, Sadie, la niece d’une copine de classe de la primaire jusqu’à la fin du lycée, a eu un accident vasculaire cérébral. Elle n’était pas du tout malade — visiblement — jusqu’à ce moment-là. Elle a tout de suite eu plusieurs chirurgies du cerveau, mais le temps que la fin du mois soit arrivé, le vrai diagnostic a changé. Elle avait une leucémie.

Pour le 3 février, sa famille a organisé une collecte de sang :

Mais c’était déjà trop tard. Elle est décédée le 31 janvier de l’année dernière.

Moi, habitant à environ 120 km de cet événement, je n’allais pas y aller. Mais je me suis enregistré avec la Croix Rouge pour donner des plaquettes ce même jour-là. Rien n’est allé comme prévu. D’abord, ils ne m’ont pas dit de ne pas prendre de l’aspirine avant le don. J’ai dû donc attendre 4 jours de plus. J’y suis arrivé encore une fois — avec mon t-shirt Indochine, bien sûr, parce que je veux toujours que ces gens fassent un lien entre vous et la bienveillance :

Malheureusement, l’infirmière a fait un joli bordel en ratant une veine, et j’ai été bien blessé. J’ai rien mentionné ici à l’époque, mais j’ai eu besoin de 3 semaines pour guérir.

Mais une promesse est une promesse. Alors le 3 mars, j’ai essayé pour la troisième fois et 2 1/2 heures plus tard — les plaquettes demandent du temps — voilà :

Vous pouvez voir que j’étais déterminé, quant au t-shirt. Mais aussi quant au sang.

Dimanche prochain, la famille de Sadie aura un autre événement en son honneur. Au lieu d’y aller, aujourd’hui je suis revenu chez la Croix Rouge, et cette fois-ci, avec moins de drame. Dois-je vraiment vous dire quelle musique jouait dans ce casque audio 100 % fabriqué en France ? Ouaip, j’ai eu assez de temps pour écouter tout le concert d’Indochine. Le seule problème, c’est que l’infirmière m’a vu pleurer pendant « Nos Célébrations » et a pensé que quelque chose de mal m’est arrivé à cause des aiguilles !

À ce point, on aurait dû être un véritable Justin du 23 juin 2002 (le jour de la pire erreur de ma vie) pour ne pas voir le futur. Surtout le reste de ce post.

Il va vous surprendre, mais je n’ai jamais rencontré Sadie. Et si vous avez fait attention ici les dernières années, il y a très peu de monde de ma vie d’avant dont je chante les louanges. Mais sa tante, Michelle, est une princesse parmi les êtres humains, quelqu’un qui n’a jamais — même pas une fois — fait partie du harcèlement scolaire. C’était un honneur de lui rendre une si petite faveur.

C’est pourquoi je suis ici maintenant pour vous parler des plaquettes. C’est en même temps le don le plus facile et le plus difficile à faire. Le plus facile parce qu’il n’y a presque aucun temps de guérison — on peut le refaire toutes les 4 semaines (toutes les 2 aux États-Unis), pas comme les 2 mois entre les dons de sang entier. Le plus difficile parce que ça prend au moins 2 heures — ils vous rendent tout votre sang, moins les plaquettes, mais c’est un processus lent. Mais c’est aussi quelque chose d’essentiel pour les patients atteints du cancer, encore plus que le sang entier. Et la pire chose ? Les plaquettes durent seulement 5 jours après le don avant de périmer. « Heureusement », il y a assez de besoin dans ce monde pourri que les vôtres ne seront jamais gaspillées.

Je vais le rendre tout simple pour vous. En France, la Croix Rouge n’a rien à voir avec les collectes de sang. Vous avez plutôt l’Établissement français du sang. Cependant, il n’est pas le cas que toutes les maisons de dons peuvent prendre des dons de plaquettes. Voici la liste. Ne doutez pas que j’ai déjà tout lu. Voici l’examen pour vérifier si vous pouvez en donner.

Mais je n’aime jamais vous laisser sans blagues, alors voici un commentaire qu’un cher ami m’a laissé après avoir vu des photos en haut. Il me connais très bien.

Épisode 45 — des boulettes et des améliorations

Je ne devrais pas trop me plaindre de cette semaine. En plus du nouvel appareil photo, les disques d’Indochine, et Ne nous fâchons pas, j’ai reconstruit mon ordinateur avec un nouveau processeur et disque dur, et maintenant, ça marche vite. (J’ai la même attitude chez mes ordis qu’en cuisine — fait maison au maximum). Mais j’échangerais le tout pour être certain qu’il n’y aura pas de problèmes avec mon groupe de cinéphiles. On verra.

Je ne demande jamais rien des lecteurs, mais demain sera une exception. Je vais interrompre le rythme du blog pour vous parler de quelque chose très important à moi et j’espère que ce post-là vous inspirera. Disons juste que je ne demande jamais à personne de faire quelque chose que je ne ferais pas aussi. Alors, après l’avoir fait, on en parlera,

Et si je vous disais que nos supermarchés ont commencé à mettre les bonbons de Saint-Valentin sur les étagères le 24 décembre ? Et que j’ai vu les premiers bonbons de Pâques ce week-end ? (J’en ai acheté un, mon préféré de tous les temps ; on en parlera bientôt.) C’est pourquoi notre blague de la semaine traite de la Saint-Valentin, car c’est jamais trop tôt pour la prochaine fête ces jours-ci. Au fait, ma bûche de Noël pour 2023 paraîtra ici le week-end prochain. De toute façon, nos articles sont :

Il y a aussi La boulette, pas mon meilleur moment, et Comment avoir du son parfait, un tutoriel sur la production des balados.

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Ne nous fâchons pas

C’était mon amie F qui a fait la bonne chose pour me remonter le moral cet aprèm. Elle m’a rappelé ma petite vidéo de l’année dernière, et après ça, je me suis dit « J’ai besoin d’une bonne comédie comme en 2020 ». Alors ce soir, j’ai regardé « Ne nous fâchons pas », car il me semblait qu’un film avec Jean Lefebvre ne pourrait pas être trop sérieux. Je n’étais pas déçu.

Ce film est un vrai régal pour les amateurs des films français des années 60s. Comme j’ai mentionné plus tôt, c’est un film de Georges Lautner et Michel Audiard, avec Lino Ventura en vedette. Mireille Darc, connue ici pour Pouic-Pouic, Borsalino, Un grand seigneur, et Elle cause, n’apparaît que tard, mais dans un rôle important. Il y a des rôles de camée pour André Pousse, Robert Dalban, et France Rumilly (plus connue comme Sœur Clotilde des Gendarmes de Saint-Tropez). J’imagine qu’Audiard et Lautner avaient vu Thunderball (Opération Tonnerre en français) ; à son tour, Gérard Oury a évidemment bien étudié celui-ci pour Le Cerveau. Cerise sur le gâteau*, le rôle de Ventura rappelle bien son tour dans Les Tontons flingueurs et le tout est clairement une répétition pour le chef d’œuvre d’Audiard, Faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages.

*(Montrez-moi l’étranger qui écrit de telles choses. J’attendrai.)

On commence avec Lino Ventura dans le rôle d’Antoine Barreto, ancien truand devenu homme d’affaires (ça sent Les Tontons flingueurs dès le départ !). La police lui en veut à cause de trois hommes qu’il a frappés. Il s’avère qu’il y avait un accident de voiture, et l’un des types frappés a été responsable, mais il s’est fâché contre les témoins aussi. Ça donne l’idée de son personnage.

Dans son entreprise, un magasin d’attirail de pêche, deux truands le recherchent, dont l’un d’entre eux est joué par André Pousse. En échange pour les aider à sauter la frontière italienne, ils lui offrent la dette d’un certain Léonard Michelon.

Barreto va chez Jeff, un ancien truand devenu restaurateur. On sait du nom de son resto que malgré les apparences, c’est pas ce que l’on appelle « une bonne adresse » !

Au fait, une autre fois, j’ai une histoire de homard à l’américaine pour vous, mais laissez tomber. Jeff lui envoie chez Michalon. Comme ce qui arrive souvent dans les films d’Audiard, ce film est plein de vocabulaire argotique. Je savais pas quel est un « lavedu » (un homme facile à duper) :

Plus tard, Jeff dit « On pourrait lui filer le traczir au colonel, non ? » Traczir n’est même pas dans mon dictionnaire Oxford ; ça veut dire peur. Pour sa part, Barreto dit à Jeff « Jeff, file-lui une tarte », qui apparemment veut dire gifler, vu ce qui arrive.

Quand Barreto arrive chez Michalon (Jean Lefebvre), il s’avère qu’un tueur à gages est là et Barreto le tue en légitime défense :

Barreto et Michalon doivent faire disparaître le corps du tueur, alors ils cherchent un embaumeur (Dalban, à gauche en bas). Il leur propose « le puzzle congolais », et on ne découvre jamais exactement ce que ça veut dire, mais on n’entend plus parler du corps, donc c’était efficace :

Mais le tueur était le sbire (j’adore ce mot) du « Colonel », un britannique qui arrive chez Jeff à la recherche de Michalon :

Le Colonel est bien évidemment le modèle pour le Colonel de David Niven dans Le Cerveau, tourné 3 ans plus tard. Je refuse toute autre explication. Au fait, j’accepte que je me ferai jamais passer mon accent pour celui de Nico, mais il ne me dérangerait pas de sonner comme David Niven en français. J’ai peur que je sonne plutôt comme le Colonel ici ; disons qu’il est carrément britannique, mais pas charmant comme Niven.

Il s’avère que le Colonel croit que Michalon sait trop sur son prochain complot, voler de l’or d’une livraison secrète entre les gouvernements soviétiques et français (encore une fois Le Cerveau !). Après un échange d’otages, Barreto rend visite au Colonel pour mieux comprendre. Et chez le Colonel, on voit pour la première fois un bizarre stéréotype que les britanniques jouent tous de la musique façon Beatles ou Dave Clark Five partout. Je dois vous dire, voir comment vous regardez les anglophones est souvent l’un des trucs les plus intéressants dans mes films.

Après ça, le Colonel trahit Barreto, et essaye de tuer lui, Jeff, et Michalon, tous. En route chez le Colonel après le premier attentat, Barreto et Jeff roulent sous ce panneau. Quelques moments plus tôt, on le croyait une fête ; c’était en fait une grève. Ne changez jamais, les Français, et je veux dire ça sincèrement.

Après une série d’attentats, Barreto et sa bande essayent de trouver un logement chez Gisèle, une amie, mais le Colonel est prêt. C’est France Rumilly au téléphone ici :

Finalement, le trio cherche de l’aide chez « Mme Michalon » (Mireille Darc), l’ex-femme de Michalon. Elle n’est pas du tout heureux de revoir son ex, mais tombe amoureux vite de Barreto :

La violence augmente et devient de plus en plus ridicule, façon Faut pas prendre etc. Je ne vais pas vous montrer tout ça, mais encore et encore les stéréotypes britanniques des années 60s ! Pour être clair, je suis pas du tout offensé — c’est Audiard, où tout est exagéré — c’est juste difficile à prendre au sérieux le Colonel en tant que méchant avec des musiciens qui le suivent partout.

À la fin, le Colonel perd tout son gang, et il y a finalement de la paix. Mais pour Michalon, il sera toujours quelqu’un qui lui en veut.

J’ai énormément profité de ce film. On voit beaucoup de visages familiers dans des rôles familiers, mais avec un scénario original, et la violence façon Bugs Bunny (c’est à dire comique et jamais sanglante) qui est typiquement Audiard. S’il y avait des sous-titres en anglais, je le montrerais à ma fille sans la moindre hésitation. Recommandé avec enthousiasme !