Dungeon Crawler Carl

Je me suis dit il y a des années, « Vous avez probablement lu un livre en anglais pour plaisir pour la dernière fois. » Vous pensez que je plaisante, mais si ce n’est pas en français, je ne m’y intéresse plus depuis 2020. C’est comment le dernier livre que j’ai lu en anglais était « A Walk in the Woods » par Bill Bryson, au début du confinement. Mais en décembre 2024, Light&Smell a critiqué un livre, Dungeon Crawler Carl, qui m’intriguait. Mon problème étant avec les créateurs anglophones plus que la langue anglaise, j’ai quand même décidé de le lire dans sa VO. D’habitude, je n’écrirais pas sur un tel œuvre pour ce blog, mais l’expérience était si déroutant que je dois en parler.

Source, ©️Ace Books

Dungeon Crawler Carl est le premier livre que j’ai lu dans le genre « LitRPG » ; c’est-à-dire « Jeu de rôle littéraire ». Mais c’est la 1000e fois où j’ai lu du texte écrit dans ce style. Light&Smell avait écrit :

J’ai, en effet, eu le même ressenti que quand je jouais avec mon frère aux jeux vidéo et que c’était son tour d’avoir la manette : pendant quelques minutes, mon esprit est concentré sur ce qui se passe et puis, il finit par dériver.

Ça ne commence guère à décrire mon expérience de lire ce livre. Chaque bataille dans ce livre pourrait être tiré de la Final Fantasy Legend pour la Game Boy, ou Zork pour les ordinateurs du début des années 80. Permettez-moi de vous offrir un exemple de ces jeux, traduit en français comme on trouve seulement chez Un Coup de Foudre :

GRIR attaque ConnardGris avec ÉPÉE.

ConnardGris perd 4 Points de Vie.

ConnardGris frappe GRIR avec PQÛR.

Punaise ! GRIR est EMPOISONNÉ.

GRIR boit ANTD.

Youpi ! GRIR n’est plus EMPOISONNÉ !

Ah, les bons vieux jours quand les noms étaient limités à 4 lettres, alors notre pauvre Guerrier est devenu GRIR, et le puissant ConnardGris (une oie avec une queue de scorpion et des pinces de homard) attaquait avec PQÛR au lieu de Piqûre. Heureusement, GRIR avait un sac invisible où il stockait tout genre de potion, dont ANTD, de nos jours Antidote, avec un maximum de 9 bouteilles jusqu’au moment où nous sommes passés à des consoles 16 bits, et tout à coup, 99 est devenu possible. (La révolution en sacs invisibles était encore plus impressionnant que la révolution en ordinateurs. Il fallait être là, je suppose.)

Bon, j’avoue, j’ai complètement inventé le dialogue en haut, mais ça pourrait venir de tout jeu de rôle vidéo de l’époque. Un beau tiers du livre se déroule de cette façon, mais ce n’est que le début du point auquel l’auteur habite dans ma tête — et presque tout homme américain de plus de 35 ans. Je vais vous donner toute l’intrigue de ce livre sans utiliser le nom d’un seul personnage du livre lui-même :

La Terre souffre une catastrophe du début du Guide du Voyageur galactique. Notre héros, John Rambo va descendre dans un donjon souterrain avec son chaton, Alf pour jouer au Running Man sur le plateau du jeu vidéo Smash TV, mais où les règles ont toutes été écrites par le réalisateur de Final Fantasy. Là, il rencontrera les vieillards de Cocoon ou Miracle sur la 8e rue, ainsi que la prostituée à 3 seins de Total Recall. Malheureusement pour lui, Alf lui dira que son ex le trompait gravement, et la seule femme qu’il rencontrera dans tout ça qui s’intéressera à lui, elle vient de Gremlins.

Voilà, aucun divulgâcheur direct, mais les initiés auront tout compris. Et il n’y a pas besoin de me croire sur parole — c’est l’auteur lui-même qui fait référence à Running Man juste après le début. Il y a des centaines de références, surtout à la série Gilmore Girls (jamais vue de mon côté).

Ce livre n’était donc pas autant un livre qu’une espèce de magie noire, de vaudou lancé par quelqu’un pour qui je n’ai aucun secret. L’équipe derrière SCRiiPT, l’auteur les connaît comme ça aussi. Je vous ai dit une fois que j’ai tendance de voir le monde comme si c’était une campagne de Donjons et Dragons, avec les statistiques partout pour chacun. Vous allez faire le plein des statistiques le temps que vous finissiez ce livre.

Au cas où vous ne croiriez pas qu’il est dans ma tête, je traduis un tout petit morceau où un sort de protection est décrite :

Coque protective :

Imagine-toi au lycée. Puis imagine toutes les filles qui ne s’approcheraient jamais de toi. C’est comme ça mais fait exprès.

Voyez-vous comme il connaît mes névroses ?

L’auteur est un écrivain bien capable, mais je dois vous dire, ce style de « LitRPG » me dérange. Pour autant que je profite des jeux de rôle, je n’ai pas envie de lire un livre qui met les règles des jeux en vedette à ce point. Je préfère fortement les Chromiques de Lancedragon, qui se déroulent dans une campagne de D&D, mais qui n’exposent jamais les règles du jeu sous sa forme littéraire. Les trois premiers romans sont des livres de qualité en tant que livres. (Après, tout part en cacahuète, mais les trois premiers livres sont des perles.) En plus, il s’avère que Dungeon Crawler Carl n’est que le premier tome d’une série de même longueur que Proust, et elle n’est pas encore finie. Non. J’offre mes meilleurs vœux à Carl et sa chatte, Donut, mais 6 tomes de plus (et peut-être encore plus), c’est trop.

10 réflexions au sujet de « Dungeon Crawler Carl »

  1. Avatar de AnagrysAnagrys

    Le dernier livre anglophone que j’ai lu, je crois que c’était la fin de la série de la Roue du Temps, de Robert Jordan et Brandon Sanderson (le dernier ayant terminé la saga avec l’accord du premier, suite à son décès précoce)(décès du premier, le dernier est à ma connaissance bien vivant) : j’avais lu tout ce qui était sorti en français, et j’ai eu la flemme d’attendre la traduction. Quand je dis « la fin », je parle des tomes 9 à 14 — il n’est pas impossible que j’en aie raté un au passage, d’ailleurs, mais vu que les tomes 8 à 11 ou 12 ne font que du remplissage, ce n’est pas trop grave.
    Avant ça, c’était le Seigneur des Anneaux, que j’ai adoré en VO tout en étant extrêmement heureux de bien connaître la VF !
    Je n’ai pas très bien compris le type de ce livre (Dungeon Crawler Carl), est-ce un roman classique ou un « livre dont vous êtes le héros », où le lecteur choisit en partie l’histoire ?

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  2. Avatar de James JonesJames Jones

    Justin, tu viens juste de faire replonger un James Jones dans ses antédiluviens jeux de rôles (avec les feuilles de personnages et tout le toutim, dés y compris ^^).
    Et tous les souvenirs de parties avec…
    Qui finissaient assez rapidement en mode Tex Avery, mais version old school, celle authentique des débuts 😉
    C’est-à-dire totalement fracassé ! Foutraque au possible !
    En quelques lignes, j’ai vu défiler les références…
    « J’ai vu LA Lumière !!! »
    « Qu’est-ce que tu dis Jake ??? »
    😁

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  3. Ping : Saison 3, Épisode 46 — Un macaron géant pour Françoise | Un Coup de Foudre

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