Portrait de Molière par Nicolas Mignard

Fa la la

D’abord, avez-vous fini vos devoirs de Noël ? Les cadeaux sont bien emballés, la bûche est prête, pas d’autres tâches ? Non ? Allez, Langue de Molière peut attendre.

Sinon, c’est notre édition spéciale de Noël, et le Père Justin va vous raconter des choses pour vous faire dire « Nan, mais sérieusement ! » (Au fait, c’est où Jours d’humeur ?)

Cette semaine, on commence avec une question posée par une amie dans un groupe privé sur Facebook : pourquoi dit-on parfois « la Noël » au lieu de « le Noël » ? D’abord, j’étais étonné -/ je n’ai jamais entendu ça ! Puis je me suis dit « Et pourquoi êtes-vous étonné, vous ? Vous entendez peut-être 10 minutes de français tous les jours, et la moitié de ça est des pubs sur RTL. Selon vos expériences, l’expression la plus connue en France est « Je peux pas, j’ai Grand Frais. » Il y a plein de choses que vous n’avez jamais entendu ! » J’ai dû avouer que le type avait raison. Puis, il me semblait : si on dit ça, ça doit être à cause d’omettre « fête », comme « la (fête de) Saint-Valentin ». Mais c’est Langue de Molière, où nous ne devinons pas, nous recherchons.

Il s’avère que de nombreuses sources disent que c’est exactement ça. Radio Canada cite l’Office québécois de la langue française :

Noël admet aussi le genre féminin lorsqu’il est précédé de l’article défini singulier, sans épithète. « C’est probablement par ellipse de « fête de » que l’on dit la [fête de] Noël », mentionne le site Internet de l’Office québécois de la langue française.

« La » Noël ou « le » Noël ?

La vedette de nombreux billets dans cette série, Sandrine Campese du Projet Voltaire, ajoute que :

Condamnée dans le Dictionnaire grammatical du mauvais langage (1813) car trop provinciale, la tournure est pourtant utilisée par certains auteurs pour son élégance et sa poésie. 

Cinq choses essentielles à savoir sur le mot « Noël »

Attendez, il y a un « Dictionnaire grammatical du mauvais langage » ? Je veux bien le voir ! Mais pourquoi « trop provinciale » ? Il s’avère que c’est fortement lié à certaines régions, et non seulement en France elle-même :

En Provence, la tradition de dire “la Noël” est encore vivace. Cette région, connue pour ses fêtes de Noël riches en coutumes et en folklore, utilise “la Noël” pour souligner l’aspect festif et communautaire de cette période. Par exemple, les Provençaux préparent “le gros souper” et les treize desserts, des traditions ancrées dans la culture locale, où “la Noël” est célébrée avec une grande ferveur.

“La” ou “le” Noël ?

Radio Canada nous dit que c’est uniquement la Noël en Haïti :

En Haïti où j’ai grandi, je n’ai jamais entendu parler de  »le » Noël. C’est toujours  »la » Noël. On chante  »la » Noël, on parle de  »la » Noël.

Alors qu’au Congo, faites comme vous voulez :

En République démocratique du Congo, la dénomination de la célébration est laissée à l’appréciation de chacun, selon l’Ontarien Elie Kabeya Mfwamba. « Il y en a qui disent Noël, il y en a qui disent la Noël. Et il n’y a pas vraiment de problème en tant que tel », dit-il.

Mais selon le conseiller linguistique de Radio Canada, Guy Bertrand, on peut même l’écrire au pluriel :

« Dans ce cas, Noël s’écrit avec une minuscule et peut s’écrire avec la marque du pluriel. On peut dire je vous ai apporté un petit noël ou encore je vous ai apporté de petits noëls. »

Ouf, j’espère que le bonhomme Noël m’apporte un Doliprane après ça. Quoi, vous ne connaissez le bonhomme ? C’est la faute à George Sand, selon Mme Campese :

George Sand. C’est la romancière qui attesta en 1855 l’expression « père Noël ». Avant, on parlait plutôt de « bonhomme Noël », tandis qu’en Belgique et dans le nord de la France, c’est saint Nicolas – équivalent du Santa Claus anglo-saxon – qui distribue les cadeaux aux enfants.

Et avec ça, j’ai une bûche à sortir du congélateur. Noël !

Quoi, vous ne saviez pas que c’était un cri de joie au XIVe ? Notre dernier fait divers vient de Mme Campese :

Aux XIVe et XVe siècles, « Noël ! » était le cri de réjouissance que poussait le peuple pour saluer un événement heureux, par exemple la naissance d’un héritier du trône ou l’arrivée d’un grand personnage.

Pourtant, personne ne cri « Noël » à mon arrivée. Je suis offensé.

Il y a trop de comptes à régler avant la fin de l’année, alors Langue de Molière vous reverra l’année prochaine, en vous souhaitant une un Joyeux Noël.

13 réflexions au sujet de « Fa la la »

  1. Avatar de vanadze17vanadze17

    Maintenant que tu nous a donné la migraine (vite un doliprane)😉, je viens te souhaiter de très joyeuses fêtes de Noël ainsi qu’à ta Fille, dans ton nouvel appartement !
    J’espère que tu as été sage et que tu auras de beaux cadeaux. 😄🎅🎄☃️

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  2. Avatar de AnagrysAnagrys

    Noël ! Noël ! Justin a publié un Langue de Molière ! Un qui, en plus, se permet le luxe de nous rappeler que la francophonie ne se limite pas à Paris et sa proche banlieue — celle-ci pouvant aller jusqu’à Marseille, si on cherche un peu 😁
    Joyeux Noël Justin, passez de bonnes fêtes, vous et La Fille !

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