Les billets vont devenir plutôt courts jusqu’à mercredi prochain, car j’ai des choses à faire. Heureusement pour moi, hier héroïne du blog Véronique Sanson a décidé de faire quelque chose d’étonnant, et voilà, post sans effort.
En 2024, elle a embarqué sur un tour dit « Hasta Luego », ce qui m’inquiétait, parce que c’est de l’espagnol pour « À plus tard ». Je croyais que c’était donc son adieu, même si rien de la sorte n’a été annoncé.
Cependant, le 10, c’est-à-dire hier, elle a lancé une nouvelle tournée appelée « J’ai eu envie de vous revoir », et pour la fêter, elle a sorti une nouvelle chanson de même nom, sa premier single depuis « Et je l’appelle encore » en 2016. Le voilà :
J’ai du mal à transcrire toutes les paroles par oreille, mais j’ai au moins ça de la première moitié :
J’ai eu envie de vous revoir <qqch> Alors j’ai enfilé mes bottes Pour venir vous retrouver Et tout le monde, de ce qu’il reste Je veux le partager Avec le temps qui rit, qui laisse De la <qqch> sur mon clavier Et j’ai peur, si vous sachiez Qu’avec le temps je vous oublie Vous qu’aviez tant rempli ma vie Je voulais vous dire… merci
Il y a une autre strophe de même taille, mais ça donne une assez bonne idée du thème. C’est impressionnant — sa voix est plus grave que pendant les années 70 ou 80, mais reste assez claire et pas du tout râpeuse. En tant que musique, ce n’est pas à la hauteur de sa « Drôle de vie », mais presque rien ne l’est.
C’est une note de remerciement en forme musicale, et j’imagine qu’elle ne planifie pas beaucoup d’autres nouveautés. Qui sait combien de temps reste dans sa carrière ? Pas moi, certainement. Mais de mon côté, je suis reconnaissant pour tout ce qu’elle m’a donné, surtout le vol magique vers la France pour la première fois, où j’écoutais « Drôle de vie » en boucle, et m’en foutais du fait que je portais une masque de taille enfant, trop serré, jusqu’à mon arrivée. C’était Véronique Sanson la bande-sonore de la meilleure semaine de ma vie, et pour ça, je voudrais lui dire merci.
On continue maintenant le Projet 30 Ans de Taratata avec la chanteuse qui a suivi Cats on Trees, Julie Zenatti. S’il vous dérangeait ces dernières entrées que je n’étais pas très enthousiaste de mes sujets, cette fois, je vous rassure, vous allez finir par appeler le 17 ou le 114 à cause d’un excès d’enthousiasme !
Julie Zenatti est née en 1981 à Paris, fille d’une famille italienne et juive algérienne. À ses 13 ans, un employé de la maison de disques EMI la découvre dans un karaoké, et lui fait signer son premier contrat. C’est ainsi qu’elle sort en 1995 son premier single, Il restera de toi :
Cependant, c’est trop de pression pour une si jeune fille — quoi, beaucoup de stars des années 60 se sont lancées à cet âge ! — et sa famille rompe le contrat pour qu’elle puisse aller au lycée. Ça ne l’empêche pas d’être considérée comme candidat pour représenter la France à l’Eurovision en 1996.
En 1997, elle joue dans le rôle de Fleur-de-Lys, dans la comédie musicale « Notre-Dane de Paris », qui connaît un si grand succès qu’elle quitte le lycée pour se consacrer à la musique. Avec un nouveau contrat chez Columbia, en 2000, elle sort son premier album, Fragile, un double disque d’or selon la vieille signification, 200 000 disques, pas les normes abaissées de nos jours. Parmi les singles de l’album se trouve « Si je m’en sors », ce qui montre qu’à ses 19 ans, elle est déjà un produit fini, sans jamais avoir assisté à un conservatoire :
Écoutez aussi « Why » ; son articulation est par-faite.
En 2002, elle sort son deuxième album, Dans les yeux d’un autre, pas aussi bien accueilli que le premier, même si toujours un disque d’or. Le plus grand tube de l’album est « La vie fait ce qu’elle veut », qui s’écoule à 42 000 exemplaires.
Vous savez quel était le plus grand tube de l’année aux États-Unis en même temps ? Freaking « How You Remind Me » de Nickelback, avec plus de 7 millions de ventes mondialement, dont 250 000 en France. Alors que vous aviez Julie Zenatti. Je n’ai même pas de mots. Allez, vous avez donc tous raté la chanson éponyme de l’album, avec l’une des rimes les plus parfaites de tous les temps.
Son prochain album, Comme vous…, sort en 2004. Avec de l’aide de J-J Goldman et Axel Bauer, cet album se vend à 200 000 exemplaires encore une fois. Le grand tube et unique single est « Je voudrais que tu me consoles ». À vos ordres, chérie.
C’est plus électrique que ses autres chansons à ce point, avec trop d’effets pour une voix qui n’a pas besoin de la tricherie à la sauce logiciel, mais très agréable quand même. « L’amour s’en fout » est plus de Julie comme on la connaissait avant ; « Rendez-moi le silence » aussi.
Après cet album, Julie Zenatti fait une pause pour doubler Barbie dans plusieurs films animés. Puis, la catastrophe. Son quatrième album, La Boîte de Pandore, sort en 2007 et ne se vend qu’à 30 000 exemplaires. Qu’est-ce qu’il y a, la France ? Avez-vous même écouté la première piste, « Je voudrais une chanson » ? Ne me répondez pas, je le sais déjà. Non. Et vous avez donc raté quelque chose de créatif et original, avec des cornemuses, des accordéons, même un gong. Écoutez et pleurez votre erreur :
Pire suivra. En 2010, son cinquième album, Plus de Diva, ne se vend qu’à 17 000 exemplaires, ce qui lui coûtera son contrat chez Columbia. C’est dommage ; « Comme une geisha » est plus bruyante que d’hab pour elle, mais je l’aime. « Sweden Syndrome », en revanche, est plus de Julie comme toute la France l’aimait, juste du piano et cette voix :
En 2015, elle est de retour sur Capitol Music avec Blanc, un album qui atteint brièvement la 13e place dans les classements, mais j’ai l’impression qu’il ne se vendait pas trop non plus. Le premier single de l’album est « D’où je viens ». Je l’adore, mais peut-être que le pays ne voulait pas être rappelé que « Je suis jolie, même démaquillée » :
Vous n’avez certainement pas entendu « Pars sans rien dire » et « Si tu veux savoir », et tant pis. Elle reste à la hauteur de son talent, et je peux l’écouter toute la journée.
En 2017, elle sort un album de reprises, « Méditerranéennes ». C’est difficile pour moi de dire quoi penser de cet album, car elle a choisi de travailler avec de nombreuses autres chanteurs et chanteuses, dont certaines que je ne peux pas distinguer d’elle. Je peux dire que « La Maritza » avec Élisa Tovati est bien faite, et que j’adore la guitare espagnole de « Adieu mon pays » avec Enrico Macias, et « L’Amoureuse de Casbah », avec 7 chanteuses au total, est une chanson bien arabe qui vaut bien l’écoute.
Ce dernier album marque la fin de son séjour chez Capitol, alors j’imagine que c’était encore un autre échec commercial. Son prochain album, Refaire danser les fleurs, sorti en 2021, est auto-édité et n’a même pas de page Wikipédia. Yikes. « Tout est plus pop » est un départ stylistique pour elle ; un commentaire sous le clip fait la comparaison avec France Gall, et je suis d’accord :
Cependant, la chanson éponyme est, encore une fois, Julie telle que tout le monde l’aimait au début.
Et c’est peut-être ça le problème. Elle a tout le talent d’une Véronique Sanson, mais pas les ventes. Mais pour autant que j’adore tout ce qu’elle fait, il n’y a ni un succès emblématique tel que « Chanson sur ma drôle de vie » ni une mélodie dont tout le monde a envie de la fredonner encore et encore.
En juin de cette année, Julie vient de sortir son dernier album, Le chemin, avec la maison Bayard Musique. Le premier clip, Païenne, a été tourné dans l’église parisienne Saint-Étienne-du-Mont, et elle s’est embarqué sur une série de concerts dans des églises. Je l’aime, mais vous le saviez déjà :
Que penser de Julie Zenatti ? Moi, j’adore sa voix comme seulement Véronique Sanson et Catherine Ringer avant, et peut-être Jeanne Added de plus. Et il y a eu un moment où il a semblé que la France serait d’accord. Mais quelque chose n’est pas bien allé du tout. Je pense au Temps d’Amour sur le plateau de Taratata où elle était sans conteste la chanteuse la plus douée du groupe, et je ne peux pas comprendre le fossé qui sépare mon avis de celui des Français.
Ma note : Épousez-moi, Julie ! Je vous apprécierez même si vos compatriotes ne le font pas. Et je cuisine ! Mais punaise, c’est qui ce Benjamin ?
Avant de me lancer dans le sujet évident du gros-titre, il faut que je partage avec vous exactement pourquoi ce sujet est si important pour moi. J’étais chez Miguel’s Jr pour le déjeuner hier, comme trop souvent. Je l’aime peut-être à moitié autant que la fréquence de mes visites le suggère — c’est le seul resto rapide de mon quartier qui offre une réduction pour une seule personne, et l’absence de discrimination anti-célibataire fait de moi un client fidèle. À ne pas dire Fidel. De toute façon…
Comme dans tous les restos mexicains, d’habitude ils ne jouent que de la musique mexicaine. Alors, j’étais choqué d’entendre une chanson française chez Miguel’s. J’ai même tourné un petit clip pour le prouver !
Mais de toutes les chansons possibles, pourquoi Aya Nakamura ? C’est ma blague du 7 août 2023 devenue réalité ! (Non, je ne m’en souviens pas de toutes — mais celle-ci était spéciale.) C’est un bon exemple de l’importance de non seulement chercher de la musique française, mais la bonne musique. Sinon, on risque une vie d’Aya et de Jul. (Un jour, ce dernier intentera un procès contre moi — ce blog ne manque pas de blagues sur lui.)
Alors, j’ai reçu une enveloppe aujourd’hui, envoyée de Bayonne :
Ah, vous reconnaissez le nom Agorila ? C’est la maison de disques derrière Bandas du Sud-Ouest, mais qui a mis complètement le mauvais disque sur iTunes sous ce nom. Et pourquoi est-ce que je voulais avoir ce disque ? Parce que je suis devenu obsédé par sa ressemblance avec la musique des mariachis après la recommandation d’Il Est Quelle Heure. Bien sûr, il y a de bonnes raisons historiques derrière ça, et on en parlera plus une autre fois. Parlons maintenant des contenus de l’enveloppe.
Comme vous pouvez deviner, c’est le disque, afin que je puisse avoir la bonne musique :
Malheureusement, c’était une enveloppe insuffisamment matelassée, et vous pouvez voir que le boîtier CD est fissuré des deux côtés. Pas très impressionnant, ça, surtout pour un disque vendu tout neuf. Heureusement, le disque est arrivé en bon état.
Il n’y a pas beaucoup de notes de doublure dans le boîtier, mais voici ce qui se trouve là-dedans :
Alors, je vous ai dit qu’Apple m’a remboursé quand il s’est avéré que les pistes achetées sur iTunes venaient du mauvais disque. Mais, et je suis bien surpris par ça, ils n’ont pas supprimé l’enregistrement de ma bibliothèque iTunes. Je n’aurais pas objecté — j’ai reçu mon argent, pas besoin de me laisser garder l’achat. J’ai donc décidé de faire plus de recherches, pour voir si je pouvais découvrir le bon album derrière mon achat raté.
J’avais deux indices : 1) évidemment, l’album allait venir de la même maison d’édition, et 2) il s’agissait de chansons liées à l’équipe de rugby Aviron Bayonnais. C’était franchement pas grand-chose :
Heureusement — et c’est ainsi que j’ai pu découvrir que le premier album était le mauvais — Agorila offre un lecteur avec des extraits sur presque toutes les pages des albums. Par exemple :
En écoutant des extraits de cet album, Kant’AB, je me suis dit : « Ça semble être le bon, mais il y a beaucoup de compilations dans leur catalogue. J’ai besoin d’une liste complète de pistes pour être sûr. » Et Google m’a vite amené à la page de streaming d’Amazon Prime. Vous savez, le truc que je viens d’annuler la veille en me félicitant. Préparez-vous à rigoler. D’abord, voici une capture d’écran des pistes sur Amazon :
Maintenant, une capture d’écran de ces mêmes 4 pistes dans ma bibliothèque iTunes — ce sont les fichiers qui étaient intitulés comme s’ils venaient de Bandas du Sud-Ouest, sans l’être, mais je n’ai pas pensé à prendre une capture d’écran jusqu’à ce que j’aie déjà fait les changements.
Avez-vous remarqué quelque chose ? Peut-être que… la durée de toutes ces pistes est à une seconde près des mêmes pistes sur Amazon ? Ouaip. J’ai trouvé le bon disque.
Mais il y avait une piste de trop — 22 sur le disque, mais 23 dans la collection sur iTunes. Avec l’aide de l’appli Shazam, j’ai découvert que c’était la seule et unique piste vendue avec le bon titre, juste sur le mauvais album. Alors voici les résultats finaux sur mon portable :
Je ne vais pas acheter le reste de « Top Bandas » pour finir la collection. Mais j’ai maintenant deux albums entiers, et l’important, Bandas du Sud-Ouest, est là sans pertes, exactement comme je le préfère.
On continue maintenant le Projet 30 Ans de Taratata avec Cats on Trees, qui a suivi Adrien Gallo sur le plateau. Le duo a chanté une chanson, Le Temps Est Bon, par une chanteuse québécoise, alors suivant mes règles pour le projet, je ne vais pas écrire sur cette autre artiste, car il s’agit uniquement de la chanson française dans son sens continental. Si je faisais autrement, j’aurais dû écrire sur Gwen Stefani déjà, et AC/DC plus tard. Alors, Cats on Trees.
Ce n’est pas la première fois où j’écris sur un artiste français qui travaille principalement en anglais — on a déjà parlé de Jain et de Jeanne Added, ainsi que de Marie-Flore. Mais c’est la première fois où il ne s’agit pas d’un soliste (à moins que vous insistiez sur le début de la carrière d’Adrien Gallo). Cats on Trees — Des chats sur des arbres en anglais — est un duo composé de chanteuse/pianiste Nina Goern et batteur Yohan Hennequin. Le duo se sont rencontrés à Toulouse, où ils jouaient aux mêmes instruments dans un groupe local dit Aeria Microcosme. Pour autant que je puisse découvrir, il me semble que le seul album de ce groupe-là est sorti en 2007 ; voici un clip, « Seule » :
C’est très ambiant, cette musique. Mais les deux ont déjà d’autres idées, et forment leur propre duo cette même année. En 2009, ils sortent un EP auto-édité de 7 chansons, Uli, et j’ai du mal à le décrire. Autre que le titre de ce clip, « Hallo Mrs. Jones » (Allô Mme Jones), tout est en allemand (selon Paroles.net) et je ne comprends rien :
Il n’y a rien de l’EP sur leur chaîne officielle, et je ne suis pas arrivé à trouver leurs autres chansons de l’époque. Cependant, ça leur vaut assez d’attention pour faire la première partie pour Benjamin Biolay en 2012.
En 2013, Cats on Trees sort un album éponyme, sans les titres du passé. Les critiques sont positives, et l’album se vend à 220 000 exemplaires et est nommé aux Victoires de la musique en 2014, dans la catégorie « Album révélation ». Qu’est-ce qu’il révèle ? Voici le premier single de l’album, « Sirens’ Call » (L’Appel des Sirènes) :
Je dois être honnête. J’ai eu une très mauvaise réaction à la voix de Nina Goern en français sur Taratata. Elle a une qualité que les britanniques appellent « fruity » (ça veut dire tout autre chose aux États-Unis ; ne l’utilisez jamais chez moi à moins que vous aimeriez voir une gendarmerie de l’intérieur). Littéralement « fruité », mon dictionnaire Oxford préfère le rendre par « timbré », mais avec des synonymes en anglais qui me laissent perplexe. Je ne sais vraiment pas quel est le bon mot en français ; je veux dire qu’il y a une certaine faiblesse. Même si le ton est correct, ça manque de qualité musicale, et le chanteur doit presque chuchoter, car la puissance n’est pas là. Fiona Apple est l’exemple parfait chez les anglophones. Une Véronique Sanson ou une Catherine Ringer ne mériteraient jamais cette description. (À noter ; ce n’est pas ma plainte sur Gaëtan Roussel.) Et ce n’est pas uniquement une question de prononciation en anglais (celle de Nina n’est pas bonne — un peu britannique, mais les voyelles sont toutes mauvaises) ; Sandrine Kiberlain n’est pas bonne en anglais, mais est absolument charmante en français.
Franchement, vous savez grosso modo déjà comment finit ce billet, mais elle est capable en tant que pianiste, et Yohan est assez bon à la batterie, alors voyons si la musique peut sauver la note finale. Alors quoi d’autre sur cet album ? Jimmy, une collaboration avec Calogero, est pas mal ; Tikiboy montre les compétences des deux en tant qu’instrumentistes ; Flowers a une mélodie agréable. J’ai dû arrêter Wichita dès que j’ai entendu sa prononciation du nom.
En 2016, Cats on Trees fait partie d’un album de reprises de Daniel Balavoine. Elle chante mieux en français qu’en anglais sur cette reprise de « Aimer est plus fort que d’être aimé » :
2018 voit leur deuxième album, Néon, un album un peu plus « disco » que le premier. Le premier single de l’album est « Keep on Dancing » :
Encore une fois, la musique est pas mal, mais… Nina prononce le mot « fun » comme si c’est « fen », un marais anglais. La voyelle ne vient pas de la même partie de la bouche. Je ne suis pas fan de l’accent de Jain, mais elle m’a conquis avec son enthousiasme. Et Sandrine Kiberlain fait des clins d’œil envers ses difficultés — j’ai fondu pour « Je te ferais rire with my accent. » Nina livre ses mauvaises prononciations en toute sincérité, et je ne profite vraiment pas de la critiquer. Mais elle a monté de petits couteaux sur un coton-tige et me poignarde dans le tympan encore et encore.
Sur le même album, l’autre single est Blue, qui pourrait être une tres bonne chanson en anglais dans les mains de Véronique Sanson, ou bien Jeanne Added. Mais encore une fois, j’ai dû l’arrêter sur les mots « I celebrate the day ». Tikiway revisite le personnage de Tikiboy à bon effet, et Birthday est aussi agréable en tant que musique, tant que vous ne comprenez pas l’anglais.
L’album le plus récent, Alie, est sorti en 2022. « Please Please Please » est apparu l’année précédente. J’oserais dire qu’elle a suivi un cours d’anglais pendant le Confinement ; les accents sont sur les bonnes syllabes, et croyez-moi, c’est une amélioration.
She Was a Girl pourrait trouver du succès aux États-Unis sur les chaînes « alternatives ». Mais je suis prêt à finir.
Que penser de Cats on Trees ? Les deux sont évidemment des musiciens talentueux, et à part l’effet réverbe, Nina n’utilise pas trop de logiciels sur sa voix. Je la félicite sincèrement pour ça. Il faut avouer que personne ne peut me rappeler Fiona Apple et réussir ici. Et comme Jeanne Added, ses textes en anglais sont logiques et ne contiennent pas de fautes. Mais où Jeanne Added et Véronique Sanson ont complètement maîtrisé l’anglais, Nina chante l’anglais pour les Français. Ou les Norvégiens — j’ai eu un moment où ça m’a semblé juste. Il m’est évident que son anglais s’est un peu amélioré. Cependant, Fiona Apple sait prononcer l’anglais, et Nina… est une bonne pianiste. Heureusement, la prochaine entrée de cette série est une chanteuse extraordinaire.
Je sais, vous vous attendiez à Dimanche avec Marcel. Mais je suis d’humeur ultra-mauvaise après ce qui s’est passé hier après-midi.
Il y a des mois, j’ai suivi le conseil d’Il Est Quelle Heure d’écouter une piste, Lapitxuri, d’un album intitulé Bandas du Sud-Ouest. J’étais assez bluffé par les liens forts avec la musique mariachi de mon propre sud-ouest pour vouloir en savoir plus, mais je l’ai mis de côté. Vendredi, en me rendant compte que j’avais du crédit sur iTunes, j’ai décidé d’acheter l’album.
« Mais Justin », vous me dites, « vous dites tout le temps que vous insistez sur les disques originaux, afin d’avoir des enregistrements sans pertes. iTunes est tout sauf ça ! Où sont donc passés vos idéaux ? » Comme Groucho Marx est censé avoir dit (lien en anglais) : « Ce sont mes principes, et si vous ne les aimez pas… eh bien, j’en ai d’autres.» Le disque est sorti en 1999 et n’est disponible chez la FNAC que d’occasion, ce qui veut dire vendu par un tiers, ce qui veut dire pas allant à l’étranger. Aux États-Unis, le disque coûte au moins 25 $ sur Amazon, et Amazon.fr coûte 26 $ après le frais de livraison. À ces prix, un disque par de nombreux inconnus est tout à coup un peu moins important. Mais veuillez ne pas dire le mot « streaming » — sur la question d’être le proprietaire de ma musique, il n’y aura jamais de question.
Alors, j’ai acheté la collection sur iTunes, 9,99 $ pour le tout. La voilà dans ma bibliothèque :
L’éditeur de WordPress n’aime pas les contenus embarqués venant d’iTunes, alors ce qui suit comprend des liens vers ce site-là, mais des contenus de YouTube autrement. Vous pouvez déjà voir que ce disque contient des morceaux en basque, ce que je ne vais jamais comprendre, et même le français de la région contient du patois que je ne vais pas comprendre non plus. Alors ce n’est pas facile pour moi de vérifier que les contenus sont les bons. Mais dès que j’ai entendu la piste dite « Mexicali », je me suis dit : « Quelque chose ne va pas du tout. » Voici le lien vers iTunes. Je vous ai dit à l’époque que Mexicali est une ville très proche de chez moi, juste de l’autre côté de la frontière mexicaine. Alors quand j’ai entendu quelque chose sur « Baiona », je l’ai testée avec l’appli Shazam. Et c’était en fait tout autre chanson, « La Pena Baiona » :
Par rapport, voici la bonne version quand on recherche le groupe nommé dans la capture d’écran :
Voici Lapitxuri tel qu’elle se trouve sur iTunes, et ce qui se trouve sur la chaîne YouTube de la maison de disques Agorila, responsable du disque :
Pas la même chose du tout ! Celle d’iTunes est une chorale d’hommes, et celle de YouTube est toute autre mélodie, sans voix, jouée par des instruments de cuivre.
C’est EXACTEMENT la chanson espagnole de ma jeunesse : « Uno de enero, dos de fevrero, tres de marzo, cuatro de abril… ». (Désolé, les espagnols ne savent pas qu’il faut mettre une apostrophe entre « de » et les voyelles.)
À ce point, vous devriez être convaincu, tout comme moi, que s’il y a une piste qui est la bonne dans les fichiers d’iTunes, c’est par hasard. On a bel et bien mal rangé le bordel, comme nous disons chez Un Coup de Foudre.
J’ai déjà écrit des notes aux services clients d’Apple et d’Agorila. Je m’intéresserai à voir si on se soucie de corriger les fichiers. Je pourrais même voir un refus de la part des deux, vu que tout client qui a déjà acheté cette collection compte sur les fichiers tels quels. Les changer maintenant, après au moins une décennie sur iTunes, peut-être plus, serait gênant.
Évidemment, je ne veux pas simplement les acheter chez Amazon sans preuves que ses fichiers sont les bons. Mais Amazon rend la tâche impossible sans être abonné déprimé… euh, je veux dire, de Prime. Plus précisément, je peux tester un ou deux fichiers selectionnés par hasard, mais après ça, la page joue d’autres choses qui n’ont rien à voir avec l’album, et je ne vais pas faire confiance à cette méthode.
Je préfère que les fichiers soient corrigés plutôt qu’avoir à nouveau mon argent, parce que je ne vais pas me rendre fou pour ça. J’ácheterai le disque plutôt que de perdre du temps avec les fichiers. Mais ô, comme ça fait mal au cœur de voir le prix en France contre le prix chez moi !
Pour finir sur une note plus amusante, j’ai tiré mon gros titre de l’une mes expressions préférées en anglais, « weapons-grade BS » (BS = un gros mot pour caca de taureau). Il s’avère que la traduction acceptée pour « weapons-grade » est « de qualité militaire ». Voici l’une de très peu de fois où je préfère l’anglais ; c’est plus concis. Mais en recherchant l’expression, j’ai trouvé un site satirique de première classe sur les affaires militaires, Caporal Stratégique. Il m’a eu avec ce gros titre : « Les services de protection des consommateurs utiliseront le terme « de qualité militaire » pour désigner tout matériel ou produit défectueux » ! J’ai travaillé pendant 8 ans dans le secteur de la défense, et croyez-moi, j’étais absolument prêt à le croire !
On continue maintenant le Projet 30 Ans de Taratata avec Christophe, parce que notre dernière entrée, Adrien Gallo, a chanté l’une de ses chansons pendant le spectacle.
Daniel Bevilacqua est né en 1945, à Juvisy-sur-Orge, en Essonne. Sa famille est d’ascendance italienne, son arrière-grand-père étant venu pour établir un commerce en fumisterie. À ses 16 ans, il choisit le nom de scène Christophe d’après une médaille de saint Christophe, un cadeau de sa grand-mère. Naturellement, ce choix est suivi immédiatement par la fondation de son premier groupe, « Danny Baby et les Hooligans », dont le chanteur est censé être un nommé Danny, sauf que c’est désormais Christophe joué par un Danny. À vous de déchiffrer la logique.
Mais c’est en 1965, en tant que soliste, qu’il gagne enfin l’attention du public avec son premier single, le célèbre « Aline ». Il s’agit d’une ancienne petite amie, mais je me suis trompé la première fois où je l’ai écouté, en pensant qu’elle avait noyé. Si on fait plus attention, c’est juste un dessin dans le sable d’une plage qui disparaît dans la pluie.
Cette chanson pue son époque, ou plutôt plusieurs années plus tôt — faites la comparaison avec « Smoke Gets In Your Eyes » de The Platters, de 1959. À l’avis du chanteur Jacky Moulière, Aline pue encore plus sa chanson « La Romance », et il intente un procès pour plagiat à Christophe,, qui durera jusqu’à la fin des années 70, quand Christophe gagnera enfin. À mes oreilles, c’est moins le cas que pour George Harrison des Beatles et « My Sweet Lord« , mais à la place de M. Moulière, j’aurais fait pareil.
Néanmoins, avec ce tube dans la poche, en 1966 il sort un album, d’abord intitulé « Christophe », mais plus tard changé en « Aline ». Là, il a d’autres tubes, dont « Les marionnettes ». Ça suffit pour lui valoir une place aux côtés de Johnny, d’Eddy Mitchell et de Françoise Hardy dans la « photo du siècle », qui regroupe 46 stars de l’époque. Ça fait, il tourne son attention vers le marché italien, et sort une traduction de son album en 1967.
Puis, il ne sort pas de nouvelle musique jusqu’en 1972, avec un autre album intitulé Christophe. Cette fois, le grand tube est « Main dans la main », beaucoup trop sucré pour mes oreilles. Vous ne subirez de telles paroles que « Nous serons tous deux comme des amoureux, Nous serons si bien main dans la main » à mes mains, c’est certain.
Sur le même album se trouve aussi « Mal », sortie en 1971 en tant que single et qui a aussi connu un grand succès. C’est encore une autre chanson d’amour disparu : « Je me souviens, D’un prénom qui me fait mal, D’une robe, D’un soulier de premier bal ». Je me sens comme si je suis dans la présence d’un maître chanteur à minettes.
Mais il est sur le point de devenir tout autre chose. En 1973 sort l’album « Les paradis perdus », à ne pas confondre avec les pains perdus, complètement différent des premiers albums. Voici la piste éponyme :
C’est hallucinant d’écouter « Avec l’expression de mes sentiments distingués » fait avec des extraits de sa musique jusqu’à ce point, une piste qui cherche à mettre tout ça en vue arrière. Ce n’était pas un tube de l’album, mais j’aime très bien « Du pain et du laurier », une petite « tranche de la vie » qui n’a rien d’amoureux.
Son prochain album, « Les mots bleus », apparaît en 1974, avec des paroles presque entièrement à Jean-Michel Jarré, qui étonnera le monde avec Oxygène deux ans plus tard. C’est un peu d’un retour en arrière, avec plus d’amours perdus :
Il faudrait que je lui parle A tout prix
Je lui dirai les mots bleus Les mots qu’on dit avec les yeux Parler me semble ridicule
Mais l’album n’est pas tout comme ça ; « Le Dernier des Bevilacqua » imagine un autre passé, où il a grandi en Italie. C’est très long, mais comme rien d’autre de son catalogue jusqu’à ce point. « Drôle de vie » est plus « Christophe à l’ancienne » quant aux contenus, mais la musique est beaucoup plus sombre que d’hab pour lui. Peut-être que j’aurai sa dernière phrase gravée sur ma pierre tombale : « Si j’ai raté ma sortie, C’est peut-être qu’après tout, je n’ai rien compris. »
1976 voit Samouraï, un album qui n’a pas cartonné. Il y a un hommage à John Lennon sur l’album, « Merci John d’être venu », mais je trouve l’album plutôt complaisant. Ah oui, il s’agissait d’un hommage à John Lennon !
1978 est l’occasion d’encore un autre album peu apprécié par le public, Le Beau Bizarre, mais les critiques l’adorent. Libération le classe parmi les 100 meilleurs albums de l’histoire de rock, en 89e place. Ce même classement met Rumours de Fleetwood Mac en 85e place et The No Comprendo en 52e ; pourtant, ce sont carrément parmi les 10 meilleurs. Qu’est-ce qu’il y a, Libé ? En tant que saxophoniste, je suis gravement déçu par le bas niveau de mon instrument sur la piste éponyme, ce qui gâche une chanson autrement intéressante. Nettoyez votre instrument, M. René Morisure !
En 1980, Christophe sort un album, Pas vu, pas pris, et ressort Aline en disque 45 tours. Le dernier se vend à plus d’un million de copies ; l’album passe sans remarque pour autant que je sache. C’est dommage — j’ai tellement bien aimé « Méchamment rock&roll » :
Nous allons finir avec son dernier grand succès, le single Succès fou, qui vend plus de 600 000 exemplaires en 1983. Wikipédia considère que la chanson « achève de le cataloguer comme chanteur pour midinettes ».
Je ne sais pas. La chanson en soi est très agréable, très années 80 avec sa boîte à rythmes. Et le saxophone est joué à haut niveau cette fois (je ne suis pas arrivé à trouver le nom du musicien). Mais c’est quoi le « succès fou » ?
Avec les filles j’ai un succès fou Ouh… Le charme, ça fait vraiment tout Ouh… Un p’tit clin d’œil pour un rendez-vous Ouh…
Après cette chanson, il sort quelques projets très personnels, et comme beaucoup d’artistes vers la fin de sa carrière, des albums en duo avec de plus jeunes artistes. Il y avait un dernier album original en 2016, Les vestiges du chaos, disque d’or à 60 000 exemplaires vendus, mais ce n’est pas le genre de chose qui rendait Christophe un immortel de la chanson française.
Que penser de Christophe ? Tout au long de cet article, je n’ai rien dit de ce que je pense de sa voix. Toujours très aiguë, plus il vieillissait, moins il réussissait à me convaincre. Je trouve qu’Aline est son meilleur travail, mais honnêtement, ça suffit pour assurer sa place dans le panthéon. Je l’aime le plus quand il tente des expériences au-delà de ses sujets habituels. J’envisage d’ajouter quelques pistes à ma collection, et si c’est surprenant qu’il ne s’agisse pas de ses tubes autre qu’Aline, ça montre qu’il y avait du talent de son côté, avec quelque chose pour tous.
Ma note : Je serais allé au concert si vous aviez une place de trop.
On continue maintenant le Projet 30 Ans de Taratata avec Adrien Gallo, qui a suivi Alain Chamfort sur le plateau. Là, il a chanté « Aline » de Christophe, alors pas de bon points pour deviner qui sera le prochain artiste de cette série.
Adrien Gallo avec BB Brunes à l’Armada de Rouen, Photo par Agostinho, CC BY-SA 3.0
Il y a certains artistes qui sont apparus sur le plateau en tant que représentants d’un plus grand groupe, et d’autres qui sont apparus en tant que solistes. Adrien Gallo a fondé un groupe, BB Brunes, en 2006, dont il était le chanteur, mais il a entamé une carrière solo en 2014, et a été présenté comme soliste pendant l’émission. Cependant, puisqu’il continue d’être actif dans le groupe, et écrit une belle partie de sa musique, je traite de sa carrière avec le groupe pour commencer.
Adrien Gallo est né à Paris en 1989, fils d’un réalisateur de télé et une criminologue. Sa première guitare était le cadeau d’un ami de la famille, l’humoriste des Charlots, Luis Rego. À partir de 2000, lui et certains amis à l’école ont créé un groupe, Hangover (gueule de bois en anglais), dont les paroles étaient en anglais. Vu qu’il n’avait que 11 ans à l’époque, j’aimerais bien savoir à quel point ils comprenaient l’anglais ! Mais c’est en 2005 qu’un ami acteur, Jules Sitruk, partage leur maquette à son père, Claude, qu’ils changent de nom. Le « BB » est apparemment un hommage à la chanson de Serge Gainsbourg, Initials BB, et Brunes fait référence au boulevard Brune, où ils faisaient des répétitions.
En 2006, BB Brunes sort son premier single, Le Gang. Ça me rappelle fortement Iggy Pop ou The Ramones — dont la voix plaintive du chanteur. M. Gallo n’a que 17 ans dans ce clip, alors il lui reste de la maturité à venir.
Le single est rapidement suivi d’un album entier en 2007, Blonde comme moi. Sur cet album, la piste Mr Hyde a moins le son « garage », comme on dit du Gang et des influences nommées en haut. BB baise, en revanche, est si bruyant que je ne peux rien comprendre sans paroles écrites. Et vu que les paroles comprennent, « Mes ovaires sont prêts », c’est probablement pour le mieux.
Deux ans plus tard suit l’album « Nico Teen Love », rien à voir avec le Nico le plus fréquemment cité sur ce blog, mais tout à voir avec la nicotine. La piste éponyme me semble plutôt quelque chose des années 90 venant de Seattle, genre Nirvana ou Pearl Jam :
Mais ils n’ont pas abandonné leurs racines ; M la maudite est plus de la même chose du premier album.
En 2010, le groupe sort un EP tout en anglais, mais dont j’ai du mal à vous donner le bon titre — c’est soit BB Brunes soit EP anglais. La chanson « Taste of a Baby » (Le goût d’un bébé OU Les goûts d’un bébé — le titre est ambigu) a un titre suffisamment déroutant que j’ai dû l’écouter. Hélas, ça veut dire le premier choix. Beurk. « For Ever and Ever and Ever Ever Ever » (À jamais et à jamais, etc.) sonne comme une centaine de groupes britanniques des années 60. Si vous m’aviez donné ce dernier clip sans me dire que ça venait d’un groupe français, j’aurais pris M. Gallo pour un britannique.
En 2013, BB Brunes sort « Long courrier », qui ne renonce pas exactement leurs racines de punk, mais aurait pu venir directement des années 80. Le premier single, « Coups et blessures », ne sonne comme rien d’avant de chez eux :
La voix de M. Gallo, 27 ans ici, a en fait mûri. Quant à la chanson « Stéréo », c’est un régal pour les fans de Douglas Adams qui connaissent la poésie des Vogons : « swimming pool » rime avec « houle », « poule » et « swinging foule ».
En 2014, Adrien sort son premier album solo, Gemini. Est-ce le même type qui est chanteur de BB Brunes ? J’ai du mal à y croire ! Écoutez « Monokini » et découvrez son côté Barry Manilow ! Mais sa chanson « Copacabana » n’a rien à voir avec celle de M. Manilow.
Au fait, le correcteur de mon portable veut changer le nom de M. Manilow en « Manille », le chien d’Il Est Quelle Heure. Ne me croyez pas sur parole :
Quant au reste de Gemini, c’est hyper– commercial ; écoutez « Crocodile », qui semble plus produit qu’écrit.
En 2017, BB Brunes est de retour avec Puzzle, un album qui sera nommé aux Victoires de la Musique pour meilleur album de rock, mais perdra à Shaka Ponk. Je ne sais pas. Ça sonne beaucoup plus proche de Gemini que de leurs travaux de plus tôt ; « Éclair éclair » est un tube pour eux, mais c’est trop « pop » pour mes goûts :
« Pyjama », du même album sonne au début comme s’ils écoutaient du Bernard Lavilliers, mais le reste est aussi électronique que le premier clip. « Origami » fait pareil : un geste vers le Japon pour commencer, puis plus de musique électronique.
En 2019, Adrien Gallo sort un autre album solo, « Là où les saules ne pleurent pas ». Encore une fois, c’est un départ du son de BB Brunes, mais dans tout autre direction que Gemini. La chanson éponyme est largement une ballade avec une guitare acoustique :
Ailleurs dans le même album, nous voyons Adrien au piano pour la première fois, en duo avec Vanessa Paradis :
J’ai l’impression que cet album n’a pas été une réussite — les infos sur ses classements m’ont échappée — pourtant, je le considère parmi son meilleur travail. Et ça nous amène au résumé.
Que penser d’Adrien Gallo ? Il est évidemment un musicien talentueux, avec une carrière de deux décennies à ce point, dont plusieurs albums de platine. Mais je trouve que je suis moins qu’enthousiaste. Quand il poursuivait une vision artistique moins commerciale, sa voix n’était pas à la hauteur. Quand sa voix a enfin mûri, la musique n’était plus à mon goût. J’espère qu’au futur, il y aura enfin un album de son côté qui montre son talent sans chasser si évidemment l’approbation des classements.
Ma note : J’irais au concert si vous avez une place de trop.
On continue maintenant le Projet 30 Ans de Taratata en revisitant un musicien qui n’était pas sur scène lui-même, mais dont sa musique a été reprise par l’un de nos sujets. Je parle cette fois de Jacques Dutronc — en quelque sorte, j’ai oublié de mentionner que sa chanson « Fais pas ci, fais pas ça » a été chantée par Alain Chamfort pendant le spectacle.
Jacques Dutronc en 1966, Photo par W. Veenman, CC BY-SA 3.0
Jacques Dutronc est né — très inhabituellement pour un musicien de sa génération — sous le nom Jacques Dutronc en 1943, à Paris. Au Golf-Drouot, pendant les années 50s, il fait la connaissance d’Eddy Mitchell et Johnny Hallyday, deux ados qui trouveraient plus tard du succès sous les noms de Claude Lemoine et Jean-Philippe Smet. Mais pour notre Jacques, la vie cachait une mauvaise surprise — en 1959, il tombe gravement malade, victime de la maladie de Bouillaud, alors il doit passer un an entier à la maison, sans sortir. On l’aurait cru le narrateur de la Recherche. Puisque Duolingo n’a pas existé à l’époque, il s’apprend la guitare pendant ce temps.
Une fois capable de sortir en 1960, il s’intègre à un groupe de rock, El Toro et les Cyclones, et offre ses services en tant que compositeur à d’autres groupes. Pour les Fantômes, il écrit une chanson purement instrumentale, Fort Chabrol. Peut-être que vous la reconnaîtrez ; Françoise Hardy a fait une reprise em 1962 :
En 1963, les Cyclones doivent disperser à cause du service militaire obligatoire. Mais après son service, Jacques sera embauché par la maison de disques Alpha, ainsi qu’une autre maison Vogue, déjà connue pour ses stars Johnny Hallyday et Françoise Hardy. C’est comment il arrive en 1963 qu’il écrit un tube pour Mme Hardy, « Va pas prendre un tambour ». Mais elle ne le remarque pas.
Mais en 1966, Vogue décide de lancer Jacques en tant qu’artiste lui-même, et il sort « Et moi, et moi, et moi », avec Alain Chamfort au piano. C’est une réussite, alors un album suit le plus vite possible, intitulé « Jacques Dutronc ». Là se trouve plusieurs autres tubes, dont « Les cactus » :
« J’aime les filles », son prochain disque 45 tours, paraît en 1967, suivi un an plus tard par un tube qui atteint la 5e place dans les classements français, « Il est cinq heures, Paris s’éveille ».
Sur le même disque 45 tours se trouve aussi « Fais pas ci, fais pas ça ». Mais entre ces 2 disques, en août 1967, quelque chose de plus important lui arrive — Françoise Hardy le remarque enfin, et les deux deviennent un couple.
1969 voit son troisième album, L’Opportuniste, où j’adore la chanson éponyme — mais je la croyais à Indochine pendant des années !
Cet album voit aussi des expériences avec le jazz manouche, dont « À tout berzingue ». Plus tard, ce genre sera celui qui fera la renommée de son fils Thomas. Il aime autant ce genre que son album suivant, L’Aventurier (il continue de piquer des idées à l’Indochine du futur), le met en vedette pour sa chanson son éponyme.
Les années 70 verront plusieurs albums, tous intitules « Thomas Dutronc ». Sur le premier, de 1971, se trouve « Restons français, soyons gaulois », le truc le plus années 70s de tous les temps. 1972 voit un autre album éponyme, cette fois largement écrit par Serge Gainsbourg. C’est bien évident — le tube « Elle est si » contient des paroles très gainsbourgesques : « Elle est si grosse, elle est si laide, etc. ». Peut-être que Gainsbourg se trouvait drôle ; il n’a jamais été ma tasse de thé.
1975 voit un dernier album éponyme — et le temps entre les albums augmente car il poursuit désormais une carrière d’acteur. Là se trouve la chanson le moins Coup de Foudre possible, « La France défigurée », où il se plainte des « poulets hormonés » et des « forêts coupées ». Mais nous sommes toujours dans les Trente Glorieuses ! On aurait pu faire un joli échange, sa France pour ma Californie. Oui, oui, l’herbe est plus verte ailleurs, je le sais, mais celle-ci tombe mal sur mes oreilles :
En 1978, Thomas Dutronc est né, mais il fera plusieurs décennies avant que la musique ne devienne entreprise familiale.
En 1980, après une absence de la musique encore plus longue, il est de retour avec « Guerre et pets », une autre collaboration avec Gainsbourg. L’album est un disque d’or, mais les seuls tubes sont une reprise du Temps d’amour et une chanson hyper-Gainsbourg, L’hymne à l’amour, un discours magistral déclamé plutôt que chanté sur des guitares électriques.
1982 voit un album enfin libre de Gainsbourg, « C’est pas du bronze ». Si ça se vend un peu moins que son prédécesseur, il faut aussi dire que « Tous les goûts sont dans ma nature » et « L’Autruche » montrent, de façons très différentes, plus de la joie du début de sa carrière. CQF…Dutronc, sorti en 1987, est plein de synthétiseurs, typique de l’époque mais très loin de ses sons d’avant — je n’aurais jamais deviné que « À nous deux (CQFD) » ou « Europe n’roll » (très agréable) étaient à lui.
C’est ici où j’arrête. En 1991, il se sépare de Françoise Hardy, sans que les deux divorcent. Peut-être qu’il n’est pas une coïncidence qu’il ne sort qu’un album original pendant toute cette décennie ; cependant, il y a de nombreuses intégrales. Mais à ce point, il est aussi devenu un symbole nostalgique, et au-delà de sa collaboration avec Johnny et Eddy en tant que « Les Vieilles Canailles » — pour faire des reprises de leur propre musique ! — les 20 dernières années de sa carrière sont largement consacrées à des concerts plutôt que de la nouvelle musique.
Que penser de Jacques Dutronc ? Si la somme de sa carrière était ses travaux des années 60s, ça suffirait pour le rendre l’une des plus grandes stars de tous les temps. S’il avait seulement écrit la musique du « Temps de l’amour », il aurait été l’un des compositeurs les plus importants de la chanson française. Qu’il y ait eu une quinzaine d’années truffées d’autres disques d’or, c’était juste la cerise sur le gâteau.
On continue maintenant le Projet 30 Ans de Taratata, cette fois avec Alain Chamfort. J’évitais ce moment à cause de sa discographie énorme, mais il faut continuer tôt ou tard.
Alain Le Govic est né en 1949 à Paris, mais a grandi dans le Val-d’Oise. Il apprend le piano à partir de sa plus jeune enfance mais plutôt que poursuivre des études formelles, de ses 11 ans, il commence à s’intégrer à une série de groupes qui jouent soit du jazz soit du rock.
Son premier succès vient en 1966 avec un groupe dit Les Mods. « Je veux partir » sonne comme une centaine de groupes britanniques de l’époque, et à vrai dire, le seul qui m’impressionne de ce groupe est le saxophoniste, mais un certain Jacques Dutronc y entend quelque chose que je rate, et invite le groupe à le rejoindre à la télé pour jouer « Et moi et moi et moi » ensemble.
Après ça, M. Le Govic quitte Les Mods pour se joindre au groupe de Jacques Dutronc, où il restera pendant 2 ans. Pendant ce temps, ils sortiront ensemble plusieurs chansons dont Les cactus (déjà écouté ; pas fan) et J’aime les filles — c’est Alain qui joue du piano au début ici :
Mais Alain Le Govic veut être chanteur ainsi que pianiste, et il ne va pas avoir cette opportunité en tant que pianiste pour un chanteur. Cependant, même avec l’aide d’Étienne Roda-Gil — vous vous souvenez peut-être de lui de notre article sur Julien Clerc — il sort une série de 5 albums de 45 tours (c’est-à-dire des albums courts de 4-5 chansons chacun, les « c’est quoi le vinyle ? ») qui sont tous des échecs.
En 1971, M. Le Govic sert en tant que choriste pour la chanteuse Séverine quand elle remporte l’Eurovision pour Monaco. Il n’est pas considéré un gagnant du concours de cette façon, mais ça l’aide à attirer l’attention d’un certain Claude François :
C’est M. François qui trouve le nom Le Govic trop breton (il pensait quoi de l’écrivain Auguste Le Breton, qui a adopté ce nom exprès ?). Les deux choisissent le nom Chamfort d’un dictionnaire. Et vous trouvez mes méthodes extrêmes. Équipé d’un nouveau nom de scène, Alain Chamfort sortira une série de singles et 45s qui le gagneront, selon Wikipédia, la réputation de « chanteur à minettes ». Je n’avais jamais entendu cette expression avant. Mais dès que j’ai entendu « L’Amour en France », je l’ai malheureusement comprise ; c’est le genre de chanteur qui aurait ciblé les lectrices de « Jeune et Jolie ». (Où est-ce que ce type trouve ces références ?)
C’est donc Claude François qui est le docteur Frankenstein de cette histoire, mais avec son amour-propre de légende, Chamfort ne pouvait pas supporter longtemps cette collaboration et quitte la maison de disques gérée par François en 1975, mais pas avant d’enregistrer Le temps qui court afin de me mettre en PLS 50 ans plus tard. Comment ça ? C’est une reprise d’une chanson de Barry Manilow, l’Alain Chamfort américain des années 70s. (Ne me demandez pas comment il est arrivé que j’ai assisté à un concert de M. Manilow en 1993, mais soyez sages et un de ces quatre, je vous le raconterez.)
Début 1977, il se retrouve à Hollywood, où il est censé avoir fait les chœurs pour l’album de Véronique Sanson de ce nom. Cependant, j’ai écouté quelques pistes et n’arrive pas à entendre une voix masculine. L’expérience l’impressionne suffisamment qu’il y enregistre son propre album cette même année, Rock’n rose, avec les frères Porcaro (plus tard le groupe de légende Toto), et Serge Gainsbourg en tant que parolier. L’album n’est pas un grand succès, mais « Joujou à la casse » montre que les minettes sont en arrière-vue, et pour le meilleur :
Cette collaboration donnera lieu à son plus grand succès, Manureva, le premier single de son prochain album, Poses, aussi enregistré en Californie. Il s’agit d’un navigateur, Alain Colas, disparu avec son voilier, ledit Manureva, et si le style disco semble hors place, il n’y a pas de question sur son statut de tube :
Avec la formule en place, en 1980 Chamfort sort encore un autre album enregistré à LA, avec des paroles de Gainsbourg, Amour Année Zéro. Ça vend 200 000 exemplaires en France, beaucoup moins que Poses, mais toujours un disque d’or. L’album est très électronique, avec des synthétiseurs partout ; bienvenue dans les années 80s. Bambou est le grand tube de l’album, qui voit la fin de la collaboration Chamfort-Gainsbourg :
Les reste des années 80s voient une série d’autres albums du même style, donnant lieu à des coups mineurs — classés entre 30 et 40 à leur meilleur — tels que La fièvre dans le sang et Souris puisque c’est grave.
Les années 90s ne connaissent pas beaucoup de succès pour lui. En 1994, il remporte une Victoire de la musique pour le clip officiel de « L’ennemi dans la glace ». Ce clip n’a que le son, mais on peut entendre que c’est un changement complet du style — pas plus de synthétiseurs, plus lente, des cordes. Il me semble qu’il cherchait à nouveau le son de Barry Manilow !
À la fin du siècle, il perd son contrat avec sa maison de disques. Il y aura un petit rebondissement en 2004 quand il gagnera encore une fois une Victoire pour le clip des Beaux Yeux de Laure, mais la vérité, c’est que depuis ce temps-là, aucun single d’Alain Chamfort n’est classé plus haut que 128 en France. J’arrête ici parce que c’est bien évident que malgré son appel nostalgique, ses contributions du XXIe siècle n’ont pas la même place dans le Panthéon de la chanson française.
Que penser d’Alain Chamfort ? C’est une histoire très curieuse ici — il a échoué assez souvent dans sa carrière qu’il est surprenant qu’il ait fini par recevoir autant d’opportunités pour faire un « come-back » (ne me regardez pas comme ça ; c’est mon dictionnaire bilingue qui rend ce mot). Cependant, pendant un quart de siècle, beaucoup de légendes ont voulu travailler avec lui — Dutronc, François, Gainsbourg, même Lio. C’est un témoignage à son talent, et même si j’ai du mal à identifier un tube que j’aime particulièrement, il est souvent au moins agréable. C’est lui l’exemple parfait de sa note.
Ma note : j’irais au concert si vous avez une place de trop.
Nous venons de rentrer à notre hôtel à 23h50, alors je ne vais pas beaucoup écrire. Et bien que je sache que certains parmi vous connaissent Weird Al, je doute que ça fasse une grande partie des lecteurs.
D’abord, voici la salle de concert. J’imagine qu’il y avait entre 2 et 3 milliers de personnes là le temps que le concert commence :
Voici une vue plus proche de l’affiche sur l’écran :
Hélas, il y a eu une première partie. Je n’ai jamais entendu parler de « Puddles Pity Party », Puddles étant le nom d’un clown-homme orchestre. « Pity Party » est difficile à traduire. Littéralement ça veut dire « fête de pitié » ; le sens est plutôt quelqu’un qui ne va nulle part en ressentant beaucoup de tristesse — de façon péjorative. Ce type était horrible et 30 minutes de lui en était 29 de trop.
Malheureusement, beaucoup de stades et d’arènes aux États-Unis — tous qui sont des clients de Ticketbâtard, euh, Ticketmaster — ont une appli pour cafarder sur vos voisins. La femme assise devant La Fille était fâchée que nous nous plaignions du clown. La Fille pouvait donc voir sur son épaule que cette dame a écrit une note au service de sécurité pour exiger que nous soyons sortis de la salle. Je n’utilise pas de gros mots ici, mais cette fois, je fais exception. Connasse. Elle enregistrait le concert sur son portable, ce qui est interdit. Mous nous ne nous avons pas cafardé sur elle.
Puis, 50 minutes après le début officiel du spectacle, Weird Al est arrivé sur scène. Il est actif depuis 49 ans déjà, ayant sorti ses premières parodies à la fac. Sa carrière a duré beaucoup plus longtemps que celles de ses cibles parce qu’il est en fait talentueux, et ses détournements de la musique populaire sont souvent beaucoup plus intéressants que les œuvres originales.
Nous étions ravis qu’il ait joué notre chanson préférée, Party in the CIA (Fête chez la CIA), un détournement de Party in the USA de Miley Cyrus. Je sais déjà, qui ? La chanson originale a eu son moment en 2009. Personne ne l’écoute plus. Mais celle de Weird Al ? Un classique.
Il a gagné sa popularité dans les années 80s avec des parodies de Michael Jackson. « Wacko Jacko » était renommé pour « Bad » ; Weird Al l’a refaite comme « Fat » (Grosse). Même son costume est une parodie de l’original :
Vous souvenez-vous de « Blurred Lines », un coup étonnant en 2014 ? Weird Al l’a détourné pour devenir « Word Crimes » (Crimes de mots), une chanson sur la grammaire. C’est sans doute son effort le plus français, mais difficile à traduire. Il faut vraiment connaître l’anglais pour comprendre son humour, mais je vous rassure, un connaisseur de « Sans l’option Bescherelle », l’un de mes groupes préférés sur Facebook, comprendrait exactement le sens de la chanson.
Voici le clip, au cas où. C’est hilarant :
Un autre coup étonnant de 2005, « Ridin’ Dirty », est devenu « White & Nerdy » (Blanc et débile). C’est la chanson de tous les trop studieux. C’est-à-dire, La Fille et moi l’adorons.
À la fin des concerts aux États-Unis, si le public l’a aimé, ils crient un mot intraduisible pour dire qu’ils veulent en entendre plus : « Encore ». Peut-être qu’il y a un équivalent en français. Hihihihi. Alors, il est revenu sur scène pour chanter deux chansons qui prenaient Star Wars pour sujet, « La Saga commence », une parodie de « American Pie » de Don McLean, et « Yoda », une parodie de « Lola » par The Kinks. Comme d’hab, je préfère les versions de Weird Al.
Il y a très peu de monde qui travaillent aussi dur que Weird Al. Pendant un spectacle, il change de costume entre 40 et 50 fois. Cependant, ses blagues dépendent tellement de comprendre l’anglais, et c’est presque impossible de les rendre drôles en français. Peut-être qu’il me faudra faire l’effort quand même, car il reste l’une des personnes les plus drôles que je connaisse.