La trouvaille inattendue

Aujourd’hui, j’étais sur Amazon — .com, pas .fr — afin d’acheter un CD français indisponible sur iTunes, et où le prix chez la FNAC n’est pas moins cher que celui d’Amazon aux États-Unis. Vous n’avez aucune idée à quel point c’est choquant, ça — à cause des impôts pour les marchands, (presque) tout produit culturel français est moins cher pour moi chez la FNAC qu’ici. Mais le disque en question n’est pas trop récent, et les stocks sont bas partout.

Si vous voulez savoir lequel, vous pouvez visiter mon pauvre compte Instagram, où il y a un indice caché où personne ne l’a trouvé — le post le plus récent en ce moment. (J’ai un don pour trouver de nouvelles manières de me plaindre, n’est-ce pas ?) Laissez tomber — je suis très enthousiaste de cette découverte, comme beaucoup d’autres pistes que j’ai choisies pour le compte. Vous en entendrez parler plus tard.

Mais ce post est en fait sur quelque chose que j’ai vu pendant mon achat. Elle vous sera familière, mais quelque chose n’ira pas :

Source

Ouais, c’est Prospérine Virgule-Pointen anglais. Il y a un échantillon sur Amazon — les trois premiers chapitres, alors j’ai jété un œil.

La première chose à dire, c’est qu’une traduction hyper-fidèle serait une erreur. Ce livre joue avec la langue française sur chaque page, et beaucoup s’en perdraient en traduction. (Puis-je écrire ça de cette façon, où dois-je écrire « beaucoup de choses se perdraient » ? C’est une question sincère.) Je ne suis quand même pas sûr si les choix que j’ai vus sont les bons.

Commençons avec le nom de notre héroïne. Virgule-Point est inattendu en soi ; le bon mot en français est point-virgule. Mais en tant que nom de famille qui s’était produit par un mariage, ça marche. En anglais, point-virgule se traduit par « semicolon » — littéralement, demi-deux points. Virgule veut dire « comma » et point veut dire « period », alors « Prosperine Comma-Period » aurait pu marcher — mais personne n’aurait compris la blague de la fusion de deux marques.

Pourtant, le choix ne fait pas une meilleure blague. En anglais, elle s’appelle « Prosperina Dash », et sa famille est l’union des « Emdash » et « endash » — c’est à dire « tiret cadratin » et « tiret demi-cadratin« . Une traduction en français de son nom en anglais serait donc « Prospérine Tiret » — et l’esprit du jeu de mots se perd.

Sa ville, plutôt qu’une traduction de « Demi-Mot », qui serait littéralement « half-word », est « Ellipsis », d’où le titre — mais ça veut dire points de suspension. Honoré Point-Virgule, le héros de l’histoire, devient « Honorius Hyphen ». Un « hyphen » est un trait d’union — mais ça commence aussi par une « h », qui garde un peu du sens de l’humour de l’originale.

Il y a des blagues de la part des traducteurs (il y en a deux) qui reflètent leur connaissance de la culture française. Le livre fictif au centre de l’histoire s’appelle « Peines perdues », et là, la référence est clairement au pain perdu. En anglais, le livre s’intitule « In Search of Lost Loves », d’après une autre œuvre bien connue, « In Search of Lost Time ». Peut-être que vous connaissez cette dernière sous un autre nom, « À la recherche du temps perdu ». Les défauts que j’ai mentionnés ci-dessus, ils sont clairement aux limites de l’anglais, car ces traducteurs connaissent évidemment leur sujet.

Est-ce que je vais l’acheter et le lire ? Enfin, je crois que non. Je connais déjà l’histoire, et le vrai goût de ce texte se trouve en VO, ce qui est VF en ce cas. Cependant, ça me donne envie à nouveau de faire l’expérience de lire un livre français en parallèle avec sa traduction, afin de parler des différences. En plus, on va bientôt parler d’un autre livre écrit par quelqu’une qui habite en France — mais qui l’a écrit en anglais. (Le livre n’est pas encore sorti — je l’ai pré-commandé.)

J’ai eu cette expérience une centaine de fois, d’être surpris par un titre familier dans une police familière — dans une langue inattendue. Venant des États-Unis, ça m’arrive avec nos films tous les jours. Mais je crois que c’est la première fois où j’ai eu cette expérience à l’envers !

6 réflexions au sujet de « La trouvaille inattendue »

  1. Avatar de AnagrysAnagrys

    J’avoue ne pas connaître la série dont vous parlez ici, mais j’ai l’expérience d’une série traduite de l’anglais au français où la traduction est connue pour frôler le génie, en arrivant à restituer de la plus belle des manières l’humour si britannique de l’auteur : les Annales du Disque-Monde.
    Dans la comparaison VF/VO, j’ai pu faire celle du Seigneur des Anneaux, où je VF se défend sans atteindre les sommets de la VO. En lisant l’œuvre en anglais, j’ai par contre été très content d’avoir de base une très bonne connaissance de l’histoire, je l’aurais beaucoup moins apprécié sinon. Rien que pour ça, merci à la VF 😅
    J’ai lu à l’époque de sa sortie Harry Potter en VO. Pour le coup, je n’ai pas eu le même coup de cœur qu’avec le Seigneur des Anneaux, même si j’ai trouvé que ça se lisait bien. Par contre, comme je l’ai découvert en VO, je ne comprends rien quand des gens parlent de la VF. Heureusement, le sujet m’intéresse assez peu !

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