Archives mensuelles : septembre 2025

Portrait de Molière par Nicolas Mignard

Tout petit

Dans le Congrès des États-Unis, il y a une règle particulièrement malhonnête, dite « révise and extend » (réviser et étendre). Un député peut dire « Bla-bla-bla », puis « Je réserve le droit de réviser et étendre mon discours », et ça veut dire que les records officiels montreront n’importe quelle autre chose au lieu de ce qu’il a dit. La seule limite, c’est que cette règle ne s’applique qu’aux discours d’une minute (lien en anglais). Sinon, les archives seraient complètement falsifiées !

À son tour, Langue de Molière revisite parfois certains sujets, s’il y en a plus à dire. Mais je me sens comme si cette fois, je serai coupable de tout ce que je n’aime pas chez le Comgrès. Bon, pas la partie où les membres achètent des actions selon des infos non-publiques qu’ils apprennent en faisant leur boulot. Mais je vais quand même réviser et étendre mes commentaires sur l’accord de « tout ».

En relisant mon livre, j’avais écrit « tout autre personne », parce que j’avais suivi l’exemple de Mme Aurore Ponsonnet, repris ici :

Je ne sais pas vous, mais mon oreille ne se plaignait pas. Cependant, j’ai compris cette règle à dire que puisque « autre » est un adjectif indéfini, c’est un des « autres cas » comme elle le dit, alors « tout » serait invariable chaque fois.

Mais on m’a dit qu’en fait, j’avais tort, et c’était plutôt « toute autre personne ». Ça donne envie d’arracher les cheveux ! Qu’est-ce qui se passe ? Selon Projet Voltaire :

Si « tout » peut être ôté de la phrase, c’est qu’il s’agit de l’adverbe signifiant « entièrement ». Étant invariable, comme tout adverbe, il ne prend pas de « e », même devant un nom féminin.

C’est une tout autre histoire. (= C’est une autre histoire.)

« tout autre » ou « toute autre », Projet Voltaire

Cependant, et c’est ici où j’aurais une dent contre Mme Ponsonnet si c’était possible, selon le même article, elle a tort à dire que « tout » s’accorde seulement devant les cas au féminin ; c’est les indéfinis aussi :

Si, en revanche, « tout » ne peut être ôté de la phrase, il s’accorde. C’est un adjectif indéfini. On peut alors le remplacer par « n’importe quelle ».

Toute autre personne se serait réjouie. (= N’importe quelle autre personne se serait réjouie.)

Mais elle a dit que sans liaison, l’oreille n’est pas satisfait, et voici un cas où ce manque de liaison est obligatoire. En plus, personne ne va me convaincre que l’on fait ce test — « Puis-je ôter le « tout » ? » — en parlant. Il faut donc simplement s’en souvenir.

Une autre erreur du livre, du même genre ? On m’avait convaincu que « des » se transformait en « de » devant tout adjectif. Pourtant, j’ai écrit « Couper de petits rectangles » dans la recette de Canistrellis, et on m’a corrigé que c’était en fait « des petits rectangles ».

Vous faites la guerre contre mes cheveux, hein ? J’ai recherché cette question ; voici l’astuce de l’Office québécois de la langue française :

Lorsqu’il se trouve devant un nom précédé d’un adjectif, le déterminant indéfini pluriel des est généralement réduit à de (ou d’)…

Comme tu as de jolis cheveux !

Des devant un adjectif antéposé

Pas si longtemps avec les cheveux si vous continuez tous comme ça ! Mais ils continuent :

Toutefois, si l’adjectif et le nom forment un nom composé, le déterminant conserve la forme des

  • Des grands-pères
  • Des petits pois

Je ne suis pas si sûr si le changement était correct selon cette règle. Un « petit pois » est un genre de pois, différent d’un pois mange-tout. Un petit rectangle n’est pas un genre de rectangle — on pourrait couper la pâte à n’importe quelle taille.

L’Académie française est un peu ambiguë sur la question. Sans aborder la question de « noms composés », elle dit :

Quand le nom est précédé d’une épithète, au pluriel, des est ordinairement remplacé par de (de belles plages) dans la langue écrite et dans la langue parlée soignée. Mais des, qui n’est ni récent ni incorrect, se rencontre encore.

Avant le XVIIe siècle, on employait indifféremment de ou des…

Dire, Ne Pas Dire

Indifféremment, hein ? J’aime bien ce XVIe siècle avec son indifférence aux articles, son manque d’antibiotiques et de plomberie… euh, bon, peut-être que je préfère l’actualité après tout !

Langue de Molière vous reverra la semaine prochaine pour hisser le pavillon pirate.

Renvoyé

J’ai du mal à ne pas penser à la situation de samedi soir, mais « heureusement » (il n’y a pas assez de guillemets pour ça), j’ai pensé à une autre anecdote qui m’est arrivée il y a une décennie et qui bien expliqué la situation sans nommer personne. Évidemment, je change les noms.

Caïn venant de tuer son frère Abel, de Henri Vidal, Jardins des Tuileries à Paris, France, Photo par Alex E. Proimos, CC BY 2.0

Alors, il y a 12 ans, La Fille avait une copine de classe, Ghislaine, à la maternelle. Je voyais les parents, Marguerite et Gaston, souvent en cherchant nos enfants à la fin de la journée, mais nous n’habitions pas très proche, l’un des autres. Cependant, il y avait un niveau de familiarité, et plus les filles grandissaient, plus les deux devenaient amies.

Aux États-Unis, ce qui serait la dernière année à la maternelle en France se trouve typiquement à l’école primaire, l’année que nous appelons « kindergarten » : notre 1ère est le CP français. (À partir du 6e, la France compte à rebours, nous comptons par ordre croissant. Miam, je veux un croissant maintenant.) Alors, cette année de kindergarten était dans une école publique (la maternelle était privée), et les heures étaient bien plus courtes qu’avant.

Marguerite a proposé à plusieurs parents, non seulement moi et mon ex, d’embaucher une prof de yoga pour enseigner nos filles une fois par semaine chez elle et Gaston. Nous avons dit oui, et c’était une assez grande réussite que ça a duré jusqu’à la fin du CP, 2 ans au total.

Puisque je travaillais à la maison, tout comme Gaston — nous sommes bien avant le Covid — j’avais l’habitude de chercher La Fille à l’école, de l’amener à la maison, puis d’y rester jusqu’à la fin de la leçon avant de rentrer. Nous parlions pendant les leçons, et je dirais que nous sommes devenus amis. Nous avons commencé de planifier d’autres choses ensemble : des journées à Disneyland, jouer ensemble dans les parcs du quartier, aller au ciné, vous avez l’idée. Pour être clair, Gaston était là pour presque tout.

J’étais entraîneur pour les équipes de foot de La Fille pendant 4 ans, 6 fois de 8 saisons possibles. La première année a eu lieu pendant le kindergarten, et c’était une assez grande réussite que Marguerite est devenue bénévole pour m’aider en été 2016, ce que l’on appelle « team mom » ou « mère de l’équipe », responsable du goûter après les matchs. Mais cet été, il y avait un problème.

Il y avait déjà l’un de ces parents-là sur notre liste. Victor savait que sa fille, 6 ans, allait être une star pour notre équipe olympique, et devrait donc jouer attaquante vedette pendant tout le match. (Elle n’est pas sur ce chemin de nos jours, mais laissez tomber ; ce n’est pas du tout sa faute.) Notre ligue avait une règle — chaque fille devait reposer pendant un quart — et en plus, j’avais l’habitude de changer les postes chaque quart, afin que tout le monde puisse expérimenter tous les rôles.

Un jour, Victor n’était pas content parce que sa fille avait commencé le jeu sur la touche, puis je l’ai mis dans les buts pour le deuxième quart. À mi-temps, il m’a affronté, et étant plus grand et plus gros que moi, menacé de me frapper. Sa femme était gênée, et pour ma part, j’ai failli appeler la police. Après ça, Victor a commencé de me dénoncer aux parents pendant tous les autres matchs.

Je dois avouer que ce n’était pas ma meilleure saison non plus. Je souffrais de la diabète sans reconnaître que j’avais besoin de médicaments, que l’exercice ne suffisait plus, et j’avais très peu d’énergie. Ça faisait plusieurs années que je n’avais pas consulté de médecin, et la faute était bien à moi. Gaston voyait ça, et ne voulait plus que sa fille joue sur mon équipe, sans rien dire. Honnêtement, je ne suis pas offensé par cette décision. Mais il a fait tout autre chose.

En automne, quand les nouvelles listes sont sorties, j’étais bien surpris quand Ghislaine ne soit pas dans mon équipe. Marguerite était aussi surpris, parce que son nouvel entraîneur n’était rien d’autre que Victor. Elle m’a dit d’appeler le gérant de la ligue et demander ce qui s’est passé. Et le gérant m’a dit : « Je ne vois pas de problème. C’est écrit sur sa demande d’inscription que les parents veulent que Victor soit son entraîneur ! » J’ai appelé Marguerite pour lui dire ça.

Un jour plus tard, elle m’a appelé à nouveau, et je pouvais entendre les larmes à travers le coup de fil. Son mari avait fait la demande exprès, sans lui dire. Elle s’est excusée, mais j’ai compris le vrai message :

À l’avis de Gaston, j’étais trop proche de Marguerite, avec tout le temps passé dans sa maison, même s’il était là pour savoir que rien n’est jamais arrivé. Il n’était pas toujours là pour les rendez-vous dans les parcs, et je n’allais jamais le convaincre qu’ils étaient aussi innocents que ce qu’il voyait avec ses propres yeux. Il me disait de cette façon « Éloignez-vous de ma femme » (et rappelez que selon moi, « vous » n’existe pas en anglais !), et depuis ce jour-là, au-delà de quelques bonjours aux écoles, je ne leur parle plus.

C’est ça la raison pour laquelle je fais hyper-attention en tout ce que je fais envers les femmes : pourquoi les interviews de 5 Minutes Avec étaient sans vidéo, pourquoi je n’ai jamais envoyé une demande d’ajoute à une femme (sauf une fois, et je le regrette toujours), et ainsi de suite. Si toutes les lectrices du blog faisaient des comparaisons entre les courriels échangés entre moi et elles pour des raisons diverses, je suis bien satisfait qu’elles seraient toutes d’accord que je n’ai rien tenté, que je m’excuse parfois même de les avoir contactées.

Vous comprenez maintenant pourquoi j’étais en pleine panique quand une femme mariée a accepté mon offre de covoiturage sur le forum de l’OCA pour aller voir Arnaud Demanche ?

Quand j’ai des amies françaises, c’est parce qu’elles m’ont proposé l’amitié à chaque fois, qu’il s’agit des expatriées ou de celles en France. De mon point de vue, si un mari ou un petit ami veut lire tous les messages entre nous, soyez le bienvenu — il n’y a absolument rien de coquin, sauf une fois pour me taquiner, et ce n’est pas venu de moi. (Ça m’a tué, mais je suis fiable.) Je ne fais pas d’appels sans avoir d’abord écrit. Si j’écris une carte postale ou une lettre, c’est toujours adressée à toute la famille si je connais les noms. Et pourtant… et pourtant…

Samedi, un moment Gaston est quand même arrivé.

Saison 4, Épisode 24 — La guerre du participe passé

J’ai vu un article piquant dans Le Figaro cette semaine, une interview avec un professeur de l’Université de Strasbourg, Pierre Hartmann, à propos de son nouveau livre, une polémique sur la grammaire. Je ne pouvais pas tout lire, car je ne suis pas abonné, mais wouah — disons que si c’était à lui, il n’y aurait point de changements à la langue française. Je peux imaginer sa réaction au sujet de la balado cette semaine sans lire son livre.

J’apprécie quand même que la France reste un pays où on peut se soucier de la langue sans se faire prendre pour un cinglé. Au moins, non seulement pour cette raison.

Je n’ai rien d’utile à ajouter sur la vote de confiance à venir prochainement. Mais on m’a ordonné de vous dire que le gouvernement Descarottes n’aurait jamais annulé deux jours fériés. Au lieu de ça, il aurait fait adopter une loi selon laquelle tout le monde devait passer la journée à la ferme, á récolter des carottes. Hélas, vous avez choisi quelqu’un d’autre à l’époque, et maintenant, c’est trop tard.

Je regrette de vous dire que la NFL, la ligue professionnelle de football américain a repris ses activités ce week-end. Je vous ai dit l’année dernière que je n’allais plus suivre les pertes des Chargers dans cet espace, car ils avaient enfin embauché un bon entraîneur, et il y avait un risque qu’ils forment une bonne équipe. Cette équipe a commencé la nouvelle saison en battant les Chiefs, qui ont remporté le championnat trois fois au cours des six dernières saisons. Si vous ne comprenez pas pourquoi je hais cette équipe plus que les autres, commencez par ici.

Il y avait une conversation très bizarre à ma soirée de jeux où personne n’a eu la bonne réponse. En anglais, les petites portes utilisées par les chiens pour rentrer dans la maison sans ouvrir la porte pour les êtres humains s’appellent « dog doors », portes à chien. Cependant, le seul mot que l’on avait pour ça en français, c’était « chatière ». Pourtant, plusieurs personnes étaient certaines qu’il y avait un mot en français plus proche de l’anglais, qui fait reference aux chiens, sans le retrouver. Les seuls objets que j’ai pu trouver sur le site de Leroy Merlin s’appellaient « chatière ». Je vous pose donc la question, de s’il existe un mot autre que « chatière pour chien ». C’est un peu hilarant que les deux langues s’opposent sur le choix d’animal dans le nom.

Notre blague traite des inutiles au boulot. Nos articles sont :

Les gros-titres sont Accord et Frites. Les Bonnes Nouvelles traitent d’une opération de sauvetage en Savoie.

Sur le blog, il y a aussi C’est le 1er, version septembre 2025, ma revue mensuelle de mes blogs préférés, Ici et là, les nouvelles diverses du blog, Paillasson, mes recherches pour le truc nommé, et Rien, sur lequel on en parlera plus demain.

Si vous aimez cette balado, abonnez-vous sur AppleGoogle PlayAmazonSpotify, ou encore Deezer. J’apprécie aussi les notes et les avis laissés sur ces sites. Et le saviez-vous ? Vous pouvez laisser des commentaires audio sur Spotify for Podcasters, qui abrite la balado. Bonne écoute !

Rien

Désolé, pas de Dimanche avec Marcel aujourd’hui, et rien d’autre non plus. J’ai eu une soirée de jeux pour la première fois en plusieurs mois avec l’OCA, et j’ai fait cette tarte à citron mal accueilli pour l’événement, mais ce n’est pas le problème :

Non, le problème est que quelque chose me dérange depuis trois semaines, je craignais que quelque chose n’aille pas avec une très chère amie, je lui ai enfin posé la question, et…

Disons qu’il ne faut pas poser les questions pour lesquelles vous n’êtes pas prêt à recevoir la réponse. J’ai essayé d’écrire quelque chose pour l’expliquer ici, mais il me semble que ce serait mieux si je me taisais.

Samedi était un jour très dur, c’est tout ce que je peux dire. Et cette situation ne va pas s’améliorer, alors j’ai le moral dans les chaussettes. Encore une fois, désolé.

Pommes de terre

Je ne vais pas vous dire que l’histoire ici est la pire chose que j’aie lu. Ce n’est pas vrai — notamment, personne n’est mort. Mais il y a du monde qui souffrent au sud-ouest de France en ce moment, et j’ai eu le cœur brisé en lisant celle-ci.

Notre histoire se déroule dans les Landes, plus connus sur ce blog comme le site de Notre-Dame des Cyclistes. Le gros titre de France 3 Nouvelle-Aquitaine a attrapé mon œil car je le croyais une blague : « « On ne leur achète même plus, c’est aberrant » : un agriculteur donne 70 tonnes de pommes de terre, faute de pouvoir les vendre ». Ça me semblait impossible : quoi, personne ne mange plus d’aligot ou de frites là ?

Pommes de terre Celtiane, Photo par Thomon, CC BY-SA 4.0

Qu’est-ce qui s’est passé ? Selon France 3 :

La question a été posée au secrétaire général adjoint de la FDSEA des Landes. « Le cas de Pissos n’est pas le seul dans le secteur, assure Denis Labri, j’ai beaucoup de collègues aussi qui ont des pommes de terre à ne plus savoir quoi en faire…

Le marché 2024 a explosé avec des prix importants et une récolte importante. Dans le nord du pays, les agriculteurs ont des moyens de stockages et donc ils ont stocké leur production, poursuit-il. Dans les Landes, les pommes de terre sont précoces (juin à début juillet)…

Le problème des patates produites dans les Landes, c’est qu’elles sont destinées à l’industrie et doivent être traitées dans les 48 heures, sans quoi elles ne restent pas fraîches très longtemps et pourrissent vite.

L’article raconte comment un producteur, pas nommé, se débrouillait face à la situation de pommes de terre sur le point de périmer :

Au lieu de détruire sa production, il préfère la donner, sachant que ces pommes de terre, une fois récoltées, ne peuvent pas se conserver très longtemps.

Alors, les gens viennent de partout pour prendre les pommes de terre, jusqu’à 70 tonnes. Impossible qu’il se débarrasse de tout avant qu’elles ne périment. Je voulais mieux comprendre combien d’argent il perd de cette façon, alors j’ai fait le calcul selon quelques hypothèses :

Aux États-Unis, les producteurs reçoivent 31,9 % du prix en détail dans la catégorie de légumes frais, selon le gouvernement. Puisque je ne suis pas expert en statistiques économiques françaises, je ne chercherai pas le pourcentage exact, mais j’estimerai qu’un tiers du prix en détail va aux agriculteurs. Quant au prix en détail, il y a des pommes de terre disponibles chez Carrefour de 0,60 €/kg à 7,99 €/kg. J’imagine que les industriels ne payent pas le haut de gamme, alors j’estimerai un prix en détail de 1 €/kg, donc un prix en gros de 0,33 €/kg. Avec ces chiffres, 70 000 kg de pommes de terre valent 23 000 € au producteur. Ce n’est pas rien !

Le problème, c’est que l’année dernière, selon France 3, le prix en détail était environ 2 €/kg. Alors, il s’est effondré de 50 %, et en quelque sorte, la demande est encore plus faible que ça suggère. Ces chiffres nous disent que l’année dernière, le producteur aurait espéré des revenus de 46 000 €. C’est un changement de presque 70 000 € d’une année à la prochaine — un vrai coup dur. Et comme nous avons entendu, c’est arrivé à beaucoup de producteurs landais.

Je n’ai pas de solutions. Mais si je peux me citer dans un livre que très peu d’entre vous ont lu, « la réalité des producteurs n’est pas L’amour est dans le pré. » Complètement par hasard, ça venait de mon essai pour les Landes. Peut-être que j’ai appris quelque chose pendant ces dernières années après tout !

Paillasson

Puisque je vous ai parlé du déménagement à venir, je jette une bouteille à la mer, parce qu’il y a quelque chose que j’aimerais avoir pour le nouvel appartement. Peut-être que l’un d’entre vous aura la bonne idée.

Il y a des années, j’ai vu le paillasson le plus hilarant de tous les temps sur Facebook :

Ça dit « Oh non, pas toi encore »

À l’époque, je l’ai mis dans Google Images, dans l’espoir de le trouver, sans succès. Malheureusement, il me semble que la source originale n’est qu’une page d’humour, Rigolotes.fr.

Une recherche sur Google pour des produits qui ressemblent au paillasson n’est pas très utile — on trouve d’autres choses faites des mêmes matériaux, mais pas les mêmes mots du tout, peu importe le même produit :

4 paillassons dans les résultats de Google. Aucun ne ressemble exactement à l'original, un dit juste « Encore toi ? » et deux disent « Bonjour » plutôt que le même message.

Je suis moins que ravi que même une recherche chez Leroy Merlin ne donne qu’une version en anglais :

Capture d'écran du site de Leroy Merlin, le paillasson dit "On no, not you again"

C’est quand même moche en noir et blanc ; même si c’était en français, je ne serais pas preneur avec ces couleurs.

Un autre problème, c’est qu’à cause du fait que les moteurs de recherche utilisent désormais des représentations numériques plutôt que des mots dans leurs bases de données, afin de tout traduire automatiquement, cette recherche retourne pas mal de résultats en anglais, même si fait en français :

Capture d'écran d'une recherche sur Google avec un produit sur Etsy qui porte la traduction anglaise

Je suis étonné à quel point c’est difficile ! Et pour être honnête, je sais que les voisins ne le comprendront pas. J’espère inviter quelques membres de l’OCA à dîner chez moi une fois que nous sommes installés, et ils comprendront, mais je crois qu’ils le trouveront drôle.

Alors, si on sait où je peux trouver le bon paillasson, j’en serais très reconnaissant !

Ici et là

J’avais une idée pour un post — pour une série, en fait — mais il y a un risque que ce serait ennuyeux pour vous les lecteurs, alors avant de commencer cette activité, je chercherai vos avis. Alors, au lieu de me lancer dans cette tâche, et puisque j’ai d’autres petites nouvelles, voici un autre « Ici et là ».

D’abord, j’ai mentionné il y a deux semaines que nous allons déménager — pas en France, malheureusement, mais La Fille et moi quitterons notre appartement. Je n’attendais que la livraison de l’avis de renouvellement afin de signer un contrat ailleurs. J’ai reçu ledit avis hier, alors pendant les deux prochaines semaines, je trouverai le nouvel appartement. Je sais déjà où nous allons — nous vivrons plus proche du lycée à Anguille-sous-Roche, la ville de mon ex. C’est seulement à 7 km de chez moi. Mais ça veut dire que jusqu’au 22 octobre, la fin de mon bail, nous allons devoir nous concentrer sur le déménagement.

(Merci de ne pas mentionner à mon ex que j’ai dit « mon bail ». En anglais, le mot « bail » signifie une caution. Elle aimerait bien croire que j’ai fait un crime !)

Ne vous inquiétez pas — je suis trop obsédé par la séquence de jours de suite pour faire une pause. Mais il n’y aura pas trop de grands projets. Cependant, ça nous amène à ma nouvelle idée.

L’été me fait peur chaque année car j’utilise la climatisation au point où ma facture d’électricité double par rapport au reste de l’année. Mais le prix d’électricité en Californie est le plus haut du pays (sauf Hawaï — lien en anglais) — de loin — parce que nous fermons une centrale après une autre, et insistons uniquement sur le vent et le solaire pour les remplacer. Je paye 0,41 $/kWh, une hausse de 84 % par rapport au début du mandat du gouverneur Newsom en 2018. Cependant, en souffrant en août, et avec l’aide de températures plus basses qu’avant, j’ai réussi à couper la facture par 50 % par rapport à 2024. Ça m’a rendu curieux — qu’est-ce que je payerais en France ? Il me semble que la réponse est environ la moitié.

Mon idée est donc de faire les comparaisons entre les factures pour tout genre de chose, en explorant les raisons derrière les différences. Mais je suis au courant que les factures ne sont pas le sujet le plus passionnant, alors je ne me lancerai pas dans une telle série si ça ne vous intéresse pas. À vous de me dire.

La Fille m’a dit hier qu’elle a revu son prof de français de la première année, et que madame lui a dit que selon les nouvelles du département, elle est la meilleure élève en français du cours de la troisième année. Comment ça ? Elle utilise des mots que les autres élèves ne connaissent pas du tout. C’est la bonne nouvelle. Alors, quelle est la mauvaise nouvelle ? Je lui ai demandé de me donner un exemple, et elle m’a dit qu’elle avait dit dans sa classe que son père était parfois grossier et utilisait des jurons ! Apparemment, les autres élèves ne connaissaient pas les mots « grossier » et « juron ».

Ce n’est même pas faux, mais est-ce qu’elle doit cafarder sur moi ? Vraiment ?

Je ne peux pas m’en plaindre. Sa chambre est déjà presque prête pour le déménagement. C’est très responsable de sa part.

J’ai reçu une carte postale d’un ami français hier, envoyé pendant ses vacances en Italie. La voilà :

Carte postale avec un montage de 8 photos, dont une baie avec un rocher, des grottes, un château, et des vues d'une ville, mais pas sûr de laquelle.

Peut-être que vous pensez : « Heureusement, il l’a envoyée avant le 29 août. » Et oui. Mais le problème, c’est qu’il l’a envoyée pendant la première semaine d’août ! Les délais coupent le souffle !

Dernière nouvelle : je ne vais pas dire laquelle, mais je continue de rechercher des maisons d’édition, et je viens de soumettre mon manuscrit à l’une des plus vieilles et plus prestigieuses de France. Je ne suis pas assez arrogant pour croire que je suis digne d’être en compagnie de leurs auteurs, au moins leurs plus célèbres, mais j’ai trouvé deux livres qu’ils ont sortis pendant les 12 derniers mois qui m’ont fait croire que ça valait au moins la peine d’essayer. Ce n’est pas un commentaire ironique — chaque soumission est accompagnée d’une lettre pour me présenter, et dans cette lettre, j’essaie de prouver que mon livre rentre dans la ligne éditoriale de la maison. Trouver deux bonnes raisons dans ce catalogue, c’était un miracle !

Portrait de Molière par Nicolas Mignard

C’est la guerre !

Aujourd’hui, Langue de Molière suit dans les traces du regretté M. Descarottes et sa guerre contre les Péruviens. Mais même s’ils ne vont pas essayer de me manger — la plainte plus-que-justifiée de notre cobaye préféré — en tant qu’élève de la langue française, il me semble que j’ai désormais un casus belli conte la Belgique. Et si la dernière nouvelle tient, la France en plus.

En fait, j’irai plus loin. J’ai dit au passé que mon attitude envers les anglicismes vient d’un désir de ne pas me faire accuser d’impérialisme linguistique — vous pouvez trouver des références à partir de 2021. Mais cette fois, comme un bon colon, il faut que j’envahisse pour vous sauver de vous-mêmes.

De quoi s’agit-il ? Remontons le temps jusqu’en 2022. J’ai partagé une vidéo de deux profs de français, des belges tous les deux, « La faute de l’orthographe ». Je la reprend ici :

Depuis 2016, ils présentent ce discours, ainsi qu’une suite, dans des théâtres, une carrière très inhabituelle où l’on est en même temps linguiste et comédien (faites-moi confiance ; le métier ne se prête pas souvent à cette combinaison). Ce que je ne savais pas quand j’ai vu leur clip pour la première fois, c’était que les deux avaient proposé, dans les pages de Libération en 2018, d’éliminer l’accord du participe passé. Je les cite, autant pour la liste de supporters que la proposition :

La fédération Wallonie-Bruxelles, en accord avec ses instances linguistiques, envisage sérieusement d’instaurer l’invariabilité du participe passé avec l’auxiliaire avoir. Elle s’appuie pour cela sur les avis du Conseil de la langue française et de la politique linguistique de la Fédération Wallonie-Bruxelles (CLFPL) et du Conseil international de la langue française (Cilf). Elle suit aussi les recommandations d’André Goosse, successeur de Maurice Grevisse au Bon Usage, du groupe de recherche Erofa (Etude pour une rationalisation de l’orthographe française d’aujourd’hui), de la Fédération internationale des professeurs de français et de sa branche belge, de certains membres de l’Académie royale de Belgique et de l’Académie de langue et de littérature françaises de Belgique, ainsi que des responsables des départements de langue, de littérature et de didactique du français de la plupart des universités francophones… 

«Les crêpes que j’ai mangé» : un nouvel accord pour le participe passé

À l’époque, Le Figaro a constaté leur proposition, en notant que c’est plutôt l’enseignement du passé simple qui suscite la polémique en France.

« Mais Justin », vous me dites, « ça fait 7 ans et rien n’est arrivé. Pourquoi vous en souciez maintenant ? » Et là, c’est parce qu’il y a quelques semaines, j’ai vu ce tweet pour annoncer que cette idée est envisagée en France :

Ce tweet date de mi-août de cette année, mais en fait, il cite un article de septembre de l’année dernière. Et à son tour, l’article cite un rapport du Conseil scientifique de l’Education nationale, qui recommande beaucoup de choses, non seulement supprimer l’accord. C’est le travail d’un comité de linguistes, et de nombreuses études sont citées là-dedans, largement de données prises de dictées entre le CP et le CM1, impliquant environ 50 000 élèves. Il n’y a pas de question que ce sont bien validés. Et qu’est-ce qu’ils disent ?

C’est un peu la catastrophe. En CE1 et CE2, le taux d’accords corrects est d’environ 50 % en général, et quand il s’agit d’avoir, il baisse jusqu’à 17 % dans certains contextes. 60 % de toutes les erreurs de collégiens impliquent l’accord du participe. Même chez les adultes, on trouve que l’accord est fait correctement à 90 % avec être, 80 % pour les verbes pronominaux et seulement 50 % avec avoir.

Il semblerait donc logique d’envisager au moins de supprimer l’accord. Évidemment, très peu de monde le maîtrisent complètement. Néanmoins, je suis contre, et fortement.

Pour une chose, les données chez les adultes ne sont pas de la même qualité. Une étude d’écriture sur Reddit avec des adultes bien éduqués a trouvé que seulement 30 sur 395 adultes, soit des élèves universitaires soit diplômés d’un bac+3 ou bac+5, n’ont fait aucune erreur à cet égard. Ouais, sur Reddit. Je ne sais pas vous, mais je ne m’attends pas au même niveau d’écriture sur un réseau social que dans un journal ou dans un livre.

Mais autre chose, le projet sent un peu l’Esperanto, l’idée que le langage est un produit d’ingénierie. Le japonais manque complètement de ces accords ; faut-il que le français soit le japonais ? L’anglais n’a que le pluriel pour accorder ; levez la main, tous ceux qui veulent que le français soit anglais ! On voit ce côté snob des experts dans l’article de Libération d’en haut :

Quant à l’Académie française, n’étant pas composée de linguistes, elle n’est jamais parvenue à produire une grammaire décente et ne peut donc servir de référence.

Ben oui, l’Académie n’est pas composée de linguistes, juste de ceux distingués par leur usage de la langue ! En tant que linguiste, il m’énerve souvent quand des gens me disent que parce qu’ils parlent une langue, ils savent comment ça marche. Mais en même temps, je ne considère pas que le fait d’être linguiste me rend particulièrement doué en tant qu’écrivain. Ce sont deux choses distinctes.

Je n’ai pas de données sous la main, mais j’imagine vu la conversation autour de l’éducation aux États-Unis qu’il y a des données pareilles quant à l’anglais. Et j’ai passé sous silence d’autres données écœurantes dans le rapport : beaucoup de monde ont du mal à écrire correctement les flexions des verbes — chantez, chanté et chanter arrivent presque par hasard dans un autre exemple. Encore une fois, les japonais ont une solution pour ça — la conjugaison n’implique que le temps chez eux. Mais ce changement rendrait le français de maintenant illisible pour les élèves en 2125 !

Au nom de rendre tout plus logique, on peut justifier des changements qui rendraient le français exactement ce que l’on trouve de nos jours sur Facebook et Reddit. Il y a des données pour étayer ça ! Mais ce ne serait plus la langue de laquelle je suis tombé amoureux, et franchement, ça a l’air de jeter l’éponge. Pensez-vous que les élèves japonais aimeraient passer moins de temps en apprenant par cœur des milliers de kanji ? Moi aussi. Pourtant, ils ne font rien de la sorte. Alors je dis à ces belges, je prends votre chocolat, mais gardez vos idées farfelues. Je garde l’accord du participe.

Langue de Molière vous reverra la semaine prochaine pour parler de tout autre accord que j’ai raté.

Bannière qui dit « C'est le 1er » avec des dessins de 3 desserts : bûche de Noël, religieuse, macaron à la framboise

C’est le 1er, version septembre 2025

Je continue de copier Light & Smell avec des listes de mes articles préférés au premier du mois. Ça vient d’Allez vous faire lire, mais je ne suis pas exactement ses règles.

Cette édition a des thèmes, complètement par hasard — je ne dis à personne quoi écrire. On peut suivre de nombreux aventures en Loire-Atlantique, ainsi que lire de nombreux avis sur la culture coréenne. Et Las Vegas se met en vedette sans que j’y revienne.

Bannière qui dit « C'est le 1er » avec des dessins de 3 desserts : bûche de Noël, religieuse, macaron à la framboise

Adieu :

Nouveaux à moi :

  • Toujours rien. Je sais que la liste est assez longue, mais il y a très peu de nouveaux lecteurs fidèles ici aussi. Je me sens comme si quelque chose change pour le pire.

Les habituels :

Actif ailleurs :

Mathilde’s little things n’a rien publié ce mois, mais ne va nulle part.

À encourager :

Rien de nouveau chez Phrenssynnes, Un déjeuner en Provence, Les Dédexpressions, Carnets d’une plume, Manonpatis, Le site du Shifâ’, Bonheur des yeux et du palais, Le journal des Jum’s, Les souris de Paris, Et si Facebook disparaissait?, Thriller Addict, Bessie’s Bazaar, Je suis sur la route, Maman Lyonnaise, L’Atelier du Phoenix, La bibliothécaire, Grain de Sable, et Bonheurs culinaires. Laissez-leur de gentils commentaires pour les encourager à reprendre !

Saison 4, Épisode 23 — Considérez-vous courageux

(Comme d’habitude quand il y a un conflit entre la balado et C’est le 1er, ce dernier est reporté jusqu’au 2.)

D’abord, un grand merci pour ce qui était de loin le meilleur mois du blog par traffic. Juillet a eu le record seulement pendant 3 semaines

Capture d'écran : 6 557 vues sur 3 756 visiteurs

Je dois environ 400 des vues en plus de l’ancien record à la page des Blagues de la Semaine. Ça énerve La Fille comme rien d’autre : « Mais tu n’es pas drôle du tout ! » Dis-le à Google, ma grande — plus de 1 300 internautes croient autrement ! (Honnêtement, moi non plus.)

J’aime toujours partager des nouvelles bizarres ici, et cette semaine, j’en ai deux de qualité. En Suisse, un coiffeur vient de découvrir que pendant 13 ans, la propriétaire de son bâtiment l’a facturé 100 € par mois pour une place de parking — dont elle n’était pas la propriétaire, car c’était public ! Et l’autre vient de la Chine, où un type payait les pilules contraceptives de sa maîtresse (lien en anglais) — jusqu’au moment que le paiement automatique a échoué, la pharmacie a appelé le numéro lié à sa carte de fidélité, et a joint sa femme, qui ne prenait pas les pilules. Le génie poursuit la pharmacie pour avoir violé sa vie privée. Bonne chance, M. Le Con.

Je viens d’apprendre qu’en 2023, la chaîne américaine Hallmark, spécialisée en films de Noël, a tourné un film en France, sorti aux États-Unis en anglais sous le nom « Joyeux Noël ». Pas sa traduction, « Merry Christmas », mais l’expression en français. Naturellement, les Français étant les Français, c’est quoi son titre pour le marché français ? Coup de foudre au marché de Noël. Je vous jure, c’est impossible de vous faire accepter le cadeau quand nous les Américains nous soucions d’apprendre la langue.

Quand on adapte ce blog en film, et Grégory Gadebois me joue à l’écran, car le choix logique, Sim, n’est plus disponible, le titre sera « Coup de foudre sur Un Coup de Foudre », j’en suis sûr. D’accord, moi aussi, je choisirais Pierre Niney, mais il est trop jeune pour le rôle. Tant que La Fille soit jouée par Audrey Fleurot, j’accepte.

Il me semble que ce serait un bon « tag » pour les blogs : si on tournait le film de votre blog, qui jouerait dans les rôles principaux ? Et qui chante le générique ?

J’ai reçu mon remboursement d’Apple — et toujours pas de nouvelles du côté de la maison de disques ! — alors j’ai commandé « Bandas du Sud-Ouest » à Amazon.fr. Il sera intéressant de voir si ce sera livré, ou si la commande sera annulée à cause des droits de douane non-facturés au bon moment. Et par « intéressant », je veux dire « frustrant ». Le livreur est Amazon, pas La Poste, alors peut-être que ça ira.

Notre blague traite des rêves. Nos articles sont :

Les gros-titres sont Épuisé et Courage. Il n’y a pas de Bonnes Nouvelles cette semaine.

Sur le blog, il y a aussi Les yeux ouverts, sur les difficultés auxquelles que je m’attends en France, Ici et là, les nouvelles personnelles de la semaine, Cadeau d’anniversaire, le bref retour de mon ex pour féliciter la France pour avoir arrêté les courriers allant aux États-Unis et Je découvre Cats on Trees, la dernière entrée du Projet 30 Ans de Taratata.

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