Archives mensuelles : février 2025

Je veux croire

Hier, j’ai vu l’introduction la plus parfaite possible à ce post chez Light&Smell, complètement par hasard. Elle a critiqué un roman, L’enfant aux cailloux, sur une retraitée qui n’a rien de mieux à faire que regarder ses voisins, jusqu’au moment où elle voit ce qui semble être un cas de maltraitance sur enfant. A-t-elle raison ? Il faut lire le roman pour en savoir plus. Mais ça m’a rappelé exactement la bonne histoire de mon père.

Quand il était gamin, sa famille habitait en Enfer, ou comme ça se prononce en anglais américain, le New Jersey. (Ne me croyez pas sur parole, voici un « reel » en français sur Instagram par mon amie Mathilde, qui témoigne à cette réputation.) Il avait une voisine retraitée, une Mme Mance, qui vivait en face de la rue. Mme Mance aimait espionner les voisins par la fenêtre, cachée derrière un store vénitien. Un jour, la famille de mon père a adopté un chien, nommé Paws (« Pattes » en français, prononcé comme « pause »). Paws, lui aussi, aimait regarder la rue par la fenêtre, derrière un store vénitien.

Ça a rendu folle Mme Mance. Tout ce qu’elle voyait chez mes grands-parents, c’était une paire d’yeux. Mais au milieu de la journée ? Les enfants à l’école, les parents au travail, qui était là ? Un locataire ? Mais elle n’a jamais vu une autre personne ! Après des semaines, elle a enfin demandé à un voisin. Mme Mance était soit si gênée soit si fâchée à découvrir qu’elle espionnait un chien qu’elle n’a plus jamais parlé à la famille de mon père. Mais le vrai problème, c’était que Mme Mance ne savait pas s’occuper de ses propres oignons.

Avez-vous vu la série X-Files : Aux frontières du réel ? Il y a une célèbre affiche, probablement l’accessoire le mieux connu de l’émission, avec une soucoupe volante et la légende « Je veux croire » (bon, en anglais, rien n’est parfait) :

Affiche à soucoupe volante
Source, ©️20th Century Fox

L’affiche se trouve dans le bureau de l’un des deux personnages principaux, l’agent spécial du FBI, Fox Mulder. Il croyait à presque toutes les théories des extra-terrestres, des pouvoirs psychiques et ainsi de suite. Il s’est avéré à la fin que presque toutes ces choses étaient réelles dans l’univers de la série — mais pour des raisons diverses, les personnages principaux n’arrivent jamais à convaincre qui que ce soit de ce qu’ils ont vu. Je vous jure que je vais relier ces histoires.

Ça nous amène au vrai sujet du jour. Je vous ai parlé avant de mon meilleur ami et son habitude de croire tout ce qu’il lit en ligne, tant que ça rentre dans ses biais. Il nierait ça, mais on parle du même ami qui croyait sur rien d’autre qu’un tweet d’un inconnu que la Chine avait reconstruit Notre-Dame. Une autre fois que je n’ai pas mentionné ici avant, il a insisté que Rolling Stone — ici magazine complotiste autant que sur la musique, je ne sais pas si la version française est mieux à cet égard — avait des preuves (lien en anglais, mais payant) que M. Trump avait un document qui prouvait que M. le président Macron aimait trop La cage aux folles, si vous me suivez. Rolling Stone a perdu plusieurs procès pour des histoires complètement fausses, notamment celle-ci (lien en anglais). Puis il était convaincu par la rumeur dégoûtante à propos de Mme Macron, pour laquelle il n’y avait jamais aucune preuve.

Ce que tout ça a en commun, c’est que sa seule source était Twitter à chaque fois. Quand je lui demande où il a entendu telle ou telle chose, c’est toujours « J’ai demandé à Grok », l’IA de Twitter. Mais il ne comprend pas — et ce n’est pas juste lui, c’est la grande majorité du monde — qu’il n’y a pas de preuves derrière n’importe quelle IA ! Elles apprennent à parler en « lisant » tout le web, mais en général, il n’y a pas de mécanisme pour reconnaître quelles sources sont fausses.

L’exemple qui a provoqué ces réflexions ? Ce week-end, il m’a dit que les œufs ne coûtent que 20 centimes américains la douzaine en Chine, ce que Grok lui avait dit. Je ne parle pas chinois, mais à ce point, si on me dit qu’une IA dit que 2 + 2 = 4, je nierai les maths. Alors j’ai recherché les caractères chinois pour les œufs — 鸡蛋 — puis les noms des supermarchés chinois, et trouvé des œufs sur le site d’un supermarché qui est également à Hong Kong qu’en Chine, PARKnSHOP. Voici le prix en dollars de HK :

Capture d'écran des prix de deux boîtes d'œufs sur le site d'un supermarché chinois
Capture d’écran

Puis j’ai découvert que le site était également disponible en anglais. Tant pis pour moi. Mais 23 $ HK en USD, c’est environ 2,96 $, ou 2,86 €. On est loin de 20 centimes ! Oui, Hong Kong est plus riche que la Chine continentale, mais qui me dit tout le temps que non pas seulement le Hong Kong, mais le Taïwan aussi, font partie d’une seule Chine ? (J’ai du mal à trouver un site sur le continent qui me donnera ses prix.)

Un autre exemple ? Une journaliste gauchiste voulait justifier la grâce offerte par M. Biden à son fils. Elle a publié ce tweet qui a dit que le président Wilson avait fait pareil pour son beau-frère, Hunter deButts :

Capture d'écran d'un tweet d'Ana Navarro-Cárdenas, qui dit en partie « Woodrow Wilson a gracié son beau-frère, Hunter deButts »
Capture d’écran

Le seul problème ? ChatGPT avait inventé cette personne, et rien de la sorte n’est jamais arrivé !

Vous voyez sûrement où je vais. On parle d’un homme bien au-dessus de la moyenne, un docteur, et avant ça, diplômé de l’une des facs les plus difficiles aux États-Unis. Il sait mieux que cette journaliste, mais les IA leur disent ce que les deux veulent entendre, et c’est parti !

Le lien aux X-Files est donc assez évident. Ils veulent croire. Mais le rapport avec Mme Mance ? Rappelez le prix des œufs en Chine et ce que j’ai fait pour le vérifier. C’est la limite de mes compétences car je ne parle pas la langue. Mais là où je ne peux rien vérifier, j’essaye de ne pas avoir des avis forts, ou mieux, de me taire. Une leçon qui aurait épargné la pauvre Mme Mance.

Saison 3, Épisode 47 — 50 mots de neige

Quelle semaine, hein ? J’ai commencé de mauvais humeur à cause d’un cas de « Yankee go home » (merci de l’invitation de rentrer des États-Unis), puis nous étions tous horrifiés par la tragédie de Louise, puis la Saint-Valentin est arrivée. Et je ne vous ai même rien dit sur ma voiture ni la dernière « frasque » (pas drôle du tout) de mon ex. Je ne peux rien dire sur cette dernière, mais

Si le karma est réel, j’espère que je paye pour avoir été Gengis Khan, Jack l’Éventreur et un leader allemand. (N’oubliez pas que j’ai le bon brassard — et c’est exactement son style de faire semblant de croire que c’est une croyance plutôt qu’un héritage. C’est déjà arrivé au moins une fois.)

Pour info, il n’y avait pas d’accident de voiture. Mais j’ai dû passer une semaine entière sans la mienne parce qu’un support moteur s’est cassé, et le concessionnaire a reçu la mauvaise pièce pour la remplacer. En plus, j’ai dit adieu aux 4 pneus en même temps.

Cerise sur le gâteau, toutes les années, mes parents essayent de me faire gêner en m’invitant à dîner pour la Saint-Valentin. D’habitude je refuse. Mais cette fois, qui a dû m’amener chez le concessionnaire ? Et qui a dit, « Dis-donc, il est déjà 17h, allons dîner ensemble ? » Et c’est qui le con qui n’a pas aperçu le piège ? Ouaip.

Une bonne nouvelle ? La prof de français de La Fille m’a dit qu’elle devrait sauter un cours. Son courriel dit « Elle n’aura aucun problème à être en Français 3. Elle connaît du vocabulaire de niveau 3 et même de niveau AP. » AP est le niveau le plus haut de tous les lycées américains et veut dire « placement avancé ». Et la première année n’a même pas fini !

Je vous ai dit que la France entière est passée par ici à la recherche des brookies le 13. Je ne plaisantais pas — 288 clics juste pour ça !

Capture d'écran des statistiques Google qui montre 288 clics le 13, 3x plus que d'habitude

Mais si je suis honnête, ils cherchaient tous la recette de Nina Métayer, pas la mienne. La voilà, les gars — ce n’était pas disponible à l’époque. Je tire profit juste d’avoir mentionné son nom en tant que source d’inspiration. Au fait, Harry Potter. Ça n’a rien à voir avec les contenus du blog, ni de l’épisode, mais apparemment, dire les bons noms vaut de l’attention.

L’expérience d’utiliser une pâte plus épaisse avec une plus petite douille pour les macarons géants n’est pas bien allée (c’était donc la coque du fond). Je crois qu’une douille entre les tailles de l’originale et la nouvelle fera l’affaire, mais je ne vais pas bientôt chez Surfas pour en acheter. (J’ai aussi une autre théorie à tester.)

Photo de la coque fait avec une pâte hyper-épaisse et une douille qui fait la moitié de la longueur habituelle.

Un mot sur vos notes gentilles qui s’inquiètent que je me torture avec M. Proust. Je me sens énormément coupable pour ne pas l’avoir terminé il y a 25 ans, car c’était un cadeau cher, alors oui, il y a des questions psychologiques si on veut les rechercher. Mais je suis certain que l’on partage tous l’expérience de devoir lire des pavés dits « classiques » aux écoles, qui sont plus un devoir qu’un plaisir. Si Proust se traduit par Steinbeck ou Dreiser à cet égard, c’est néanmoins le cas que ce livre en particulier reste votre expérience plutôt que la mienne. Vu que je cherche à tout comprendre, voilà. Et si je vous fais sourire en même temps, sachez que rien ne me plaise plus. (Bon, vu mes plaintes habituelles, rien que je puisse contrôler.)

Notre blague traite du mort-aux-rats, ou comme mon ex l’appelle, mon dîner. (J’entends parler que ça se dit aussi « poison de belle-mère ».) Nos articles sont :

Les gros-titres sont Hossegor et Genève. Les Bonnes Nouvelles traitent du premier effort en France (où j’en suis au courant) de réaliser le programme Descarottes — et je plaisante seulement un peu !

Sur le blog, il y a aussi Votre pire loisir, ma plainte habituelle sur ceux qui me disent « Reste aux É-U », N’oubliez pas Louise, mon cri de cœur pour cette tragédie insensée, La « tarte à la crème de Boston » à la française, mon dessert pour la Saint-Valentin, et Je découvre Paul Personne, la dernière entrée du Projet 30 Ans de Taratata.

Si vous aimez cette balado, abonnez-vous sur AppleGoogle PlayAmazonSpotify, ou encore Deezer. J’apprécie aussi les notes et les avis laissés sur ces sites. Et le saviez-vous ? Vous pouvez laisser des commentaires audio sur Spotify for Podcasters, qui abrite la balado. Bonne écoute !

Assiette de madeleines faites maison par Justin Busch

Dimanche avec les Vinteuil

On reprend Du côté de chez Swann avec un cœur lourd, parce que finir la semaine la plus déprimante de chaque année avec exactement ce que j’ai lu dans ce livre cette semaine…je ne peux que citer le grande philosophe Calimero, qui nous dit « Ça, c’est injuste, c’est vraiment trop injuste. » J’avance de 40 pages cette fois ; on a terminé 40 % du premier tome, mais l’épreuve que je me suis mise, je n’aimerais pas la revivre.

Vous souvenez-vous des Vinteuil, le prof de piano et sa fille ? Je me suis demandé la dernière fois si l’odeur d’amandes amères liée à Mlle Vinteuil voulait dire quelque chose de sombre. Avant de continuer, j’aimer donner tout le crédit pour ça à la première ligne de L’amour aux temps du choléra, qui dit « L’odeur d’amandes amères rappelait toujours au docteur Urbino le sort de l’amour sans retour. » Je déteste ce livre-là, qui a donné au jeune moi la fausse idée que patienter 50 ans pour quelqu’une est noble. Mais le lien entre les amandes (vraiment, la cyanure) et la mort est gravé dans mon esprit. De toute façon…

On apprend qu’une femme est venue vivre chez les Vinteuil, et que tout le monde le croit un scandale sauf M. Vinteuil, qui se convainc qu’elle est là pour des raisons désintéressées.

À partir d’une certaine année on ne la rencontra plus seule, mais avec une amie plus âgée, qui avait mauvaise réputation dans le pays et qui un jour s’installa définitivement à Montjouvain. On disait : « Faut-il que ce pauvre M. Vinteuil soit aveuglé par la tendresse pour ne pas s’apercevoir de ce qu’on raconte, et permettre à sa fille, lui qui se scandalise d’une parole déplacée, de faire vivre sous son toit une femme pareille. Il dit que c’est une femme supérieure, un grand cœur et qu’elle aurait eu des dispositions extraordinaires pour la musique si elle les avait cultivées. Il peut être sûr que ce n’est pas de musique qu’elle s’occupe avec sa fille. »…L’amour physique, si injustement décrié, force tellement tout être à manifester jusqu’aux moindres parcelles qu’il possède de bonté, d’abandon de soi, qu’elles resplendissent jusqu’aux yeux de l’entourage immédiat.

Désolé pour la longue citation, mais ça explique en même temps le comportement de cette femme et la dénégation de M. Vinteuil. Bref, sa fille a pris une amante lesbienne sous leur toit. Proust dit ça de manière si elliptique que j’ai dû relire cette partie plusieurs fois pour la comprendre.

Puis, la tante Léonie meurt. Le narrateur avoue qu’il avait mal compris l’attitude de Françoise à son égard. Il avoue en plus qu’il avait développé l’habitude de dire du mal de sa tante afin de contrarier Françoise. J’avais dit plus tôt que je me méfiais des commentaires du narrateur, selon qui tout le monde se révèle de caractère lamentable tôt ou tard.

Puis le narrateur décrit une pensée pendant ses balades qui m’a fait arrêter tout court

Parfois à l’exaltation que me donnait la solitude, s’en ajoutait une autre que je ne savais pas en départager nettement, causée par le désir de voir surgir devant moi une paysanne que je pourrais serrer dans mes bras. 

Ah oui ? On attrape souvent n’importe quelle paysanne par hasard ? Je sais que le livre a plus de 100 ans, et les mœurs ont changé, mais pas comme ça, je pense. Ce n’est que le début d’une longue digression sur son désir de trouver n’importe quelle fille de la région. « Heureusement » pour elles, cette partie se termine par un rappel que le narrateur est, en fait, aussi incapable de s’exprimer que moi.

ne pouvant me résigner à rentrer à la maison avant d’avoir serré dans mes bras la femme que j’avais tant désirée, j’étais pourtant obligé de reprendre le chemin de Combray en m’avouant à moi-même qu’était de moins en moins probable le hasard qui l’eût mise sur mon chemin. Et s’y fût-elle trouvée, d’ailleurs, eussé-je osé lui parler ?

Je n’en peux plus de ce type.

Je ne vais rien citer des 10 dernières pages de ma lecture de cette semaine. Un certain temps passe — il ne m’est pas clair combien, et M. Vinteuil meurt. Le narrateur espionne Mlle Vinteuil et sa copine par la fenêtre et écoute leur conversation. Il s’avère qu’elle méprise son père disparu, mais aime l’entendre dans la bouche de sa copine. Proust appelle ça du sadisme, mais je ne suis pas sûr de qui est la victime. Le narrateur dit encore et encore que Mlle Vinteuil est en deuil, mais ça me semble sa naïveté. Quand c’est moi qui appelle quelqu’un naïf, cette personne est vraiment un danger à soi-même.

M. Vinteuil avait ses défauts, mais je crois qu’il n’était pas un mauvais type, et cette partie était extrêmement dure à lire. Je ne garde pas beaucoup d’espoir que le reste s’améliorera, mais si le narrateur arrête de parler de ses fantasmes féodales envers les femmes du quartier, ce sera un soulagement.

(Ne me dites pas que ça arrive si vous l’avez déjà lu. Laissez-moi garder un peu d’espoir.)

Je découvre Paul Personne

On reprend enfin le Projet 30 Ans de Taratata avec le dernier membre du quatuor qui a joué des chansons d’Eddy Mitchell, Paul Personne. J’avais déjà entendu parler de lui grâce à ce post de Juliette qui avait attiré mon attention. Mais je n’étais pas quand même préparé pour cette représentation-là, qui a garanti que je n’allais nulle part.

Photo de Paul Personne devant un micro, avec une guitare acoustique
Paul Personne, Photo par Georges Seguin, CC BY-SA 3.0

Paul Personne est né René-Paul Roux en 1949 à Argenteuil, ou comme dirait le reste du monde, Paris. Sa famille lui a acheté un accordéon, erreur catastrophique qui a failli priver le monde d’un excellent guitariste. Heureusement, il l’a rejeté et s’est mis à apprendre la batterie. Mais les années 70 ne voient pas de grand succès pour le jeune René-Paul, et il travaille en tant que mécanicien alors que 3 groupes de suite viennent et partent. Ici, on ne considère que sa carrière en tant que soliste, qui s’est lancée avec l’album « Paul Personne » en 1980. (Wikipédia insiste que l’album s’appelle « Faut que ça bouge », mais son site officiel donne son nom de scène. Je dirais que c’est lui l’expert sur soi-même.)

Qu’est-ce que l’on entend dans cette première chanson, titre de l’album ou non ? C’est le blues comme on l’aurait trouvé dans n’importe club à Chicago des années 60, mais en français. Tout comme le jeune Eddy Mitchell, sa carrière se lance sur des copies du style qui l’inspire. Mais c’est un bon début, et très agréable à écouter :

Un autre point fort, c’est « Je vis avec le blues », paradoxalement plus rock malgré le titre.

J’ai eu du mal à trouver les crédits pour son deuxième album, « Exclusif », mais sa bande a évidemment grandi, parce que là où tout était des guitares, de la batterie et un clavier, il y a maintenant une saxophone aussi. J’applaudis le choix, et non pas seulement car je suis aussi saxophoniste — « Comme un étranger » est plus intéressant, plus mélodique que son premier album.

Je ne pouvais pas trouver l’enregistrement original de « Ça va rouler », autre morceau du même album, mais la version en live liée ici montre que sa technique était déjà devenue plus compliqué, avec des arpèges partout.

Ses capacités en tant que guitariste continuent de s’améliorer avec son troisième album, « Barjoland », sorti en 1984. On peut toujours entendre des influences de la musique américaine des années 60, mais maintenant je dirais que l’on parle de The Ventures, un groupe renommé pour son talent musical.

Un point moins fort pour Paul Personne, c’est sa voix. Il a une voix très râpeuse, ce qui marche bien dans ses genres préférés, mais quand il a sorti 24/24, un album très années 80, il comptait sur sa voix comme son instrument principal. « Faut qu’j’me laisse aller » et « Frankie et Johnny » sont dures à écouter et je n’ai pas profité de cet album.

Il me semble que son équipe était d’accord. Après une pause de 4 années, en 1989, il sort « La chance », album qui montre une technique d’enregistrement pas vue avant chez lui : l’effet chorus, qui donne l’impression de plusieurs chanteurs, et a tendance de réduire les sonorités râpeuses. Écoutez sa voix sur la chanson du titre, et l’effet est bien clair :

« Comme à la maison », sorti en 1992, est un album très inhabituel — enregistré tout seul chez lui. Je l’aime moins — alors qu’il y a des chansons jouées de façon acoustique (Vagabondage) et électrique (Serenity Street), elles ont en commun le sens d’être ce que l’on entendrait d’un musicien (ou deux) au coin de la rue. Je suppose que c’est authentique aux racines des blues, mais c’est un vrai départ du reste de ses œuvres à ce point.

« Rêve sidéral d’un naïf idéal » est encore une fois un changement de direction. Cette fois, on le voit en mode « Steely Dan« , hyper-raffiné avec de nombreux musiciens pour l’accompagner. « Un Tax’Man pour l’Île au Trésor » aurait pu apparaître dans l’album Pretzel Logic. Mais pour moi, le grand régal de l’album est « Jet Set Boogie », du rock sur un tempo rapide, mais en même temps moins bruyant que ses premiers albums. Ça montre très clairement sa virtuosité à la guitare :

On saute plusieurs années jusqu’en 2000, à « Patchwork électrique », enregistré avec une collection énorme de collaborateurs, dont un rappeur pour la première fois (qui est là pour des effets « scratch », pas pour chanter). C’est plus du mélange de rock et de de blues que l’on attend chez lui à ce point, mais je note un changement dans la qualité de sa voix. De la chirurgie ? Des leçons ? Je ne sais pas, mais c’est beaucoup moins râpeuse. Je la trouve très agréable :

Il reste –incroyablement — une quinzaine d’autres albums après ça, mais beaucoup sont des concerts ou « best-of », alors on finira avec « Puzzle 14 », sorti en 2014. Regardez l’art de l’album dans ce clip de « Mainmise » — pour lui, c’est toujours 1970, si avec des techniques de production modernes, et honnêtement ? Je l’adore pour ça. Paul Personne a une vision très particulière de ce qu’il aime, il y reste fidèle, et au fil de sa carrière, il la fait de mieux en mieux.

C’est très facile à comprendre pourquoi Nagui l’a choisi pour accompagner Eddy Mitchell. Il est un peu plus jeune, sa carrière n’a vraiment pas commencé que presque 20 ans après Eddy, mais les deux sont « deux petits pois dans la même gousse », comme on dit en anglais. Je vous ai dit qu’Eddy Mitchell représente un de deux chemins vers la France, celui des bilingues et de la culture américanisée. Paul Personne joue absolument sur ce chemin. Mais il fait son travail avec tant de passion, tant de dévouement, que je ne peux que l’aimer pour ça.

Ma note : J’achète l’intégrale.

La « tarte à la crème de Boston » à la française

J’avais collectionné tout genre de mèmes amers pour partager aujourd’hui. Mais après hier, je me suis dit « Qu’est-ce que tout le monde veut de votre côté ? » Et la réponse, c’est évidemment « des desserts ». Puis, j’étais frappé par un coup de Google — la France entière est passée par mon blog pour chercher les brookies. J’ai donc pensé aux brownies du deuxième pire jour de ma vie — mais en fait, vous avez déjà cette recette dans celle des brookies. Alors j’ai décidé de revisiter une autre Saint-Valentin échouée avec cette mise à jour d’un classique de la pâtisserie américaine, la « Boston cream pie » :

Tarte à la crème de Boston entière
Haute résolution en cliquant

Mais ne vous inquiétez pas, cette recette ne sera pas comme les autres. Comme pour mon anniversaire en 2022, M. Descarottes est de retour pour vous régaler avec ses commentaires. À vous, monsieur !

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N’oubliez pas Louise

Je suis bien au courant que pour beaucoup de monde, le point fort de ce blog est l’atmosphère largement positive. Sauf en février. Et en juin. Et pour mon anniversaire. Et autour de Noėl. Mais au-delà ça… Malheureusement, j’écoutais RTL Soir hier, où j’ai entendu la conférence de presse du procureur qui gère l’enquête sur le meurtre de Louise. Aujourd’hui ne verra pas un de ces posts « feel-good ».

Je peux imaginer juste un peu le cauchemar qui vivent les parents de Louise en ce moment. C’était exactement à cause du fait que je pouvais me mettre dans la place d’autres parents d’une fille de cet âge que j’ai lancé les dons de plaquettes annuels. Encore pire, et c’est un témoignage au bon cœur de la petite, le saligaud qui est responsable lui avait demandé de l’aide pour trouver son portable (pas vraiment perdu). Elle voulait juste aider un inconnu. Je n’ai pas de mots pour la rage que je ressentirais si c’était La Fille.

C’est ici où je dirai quelque chose que je ne regretterai pas, mais je sais que ça vous choquera. Aux États-Unis, il y a un juge pour chaque procès, mais la décision de coupable ou non est prise par un jury de 12 citoyens ordinaires sélectionnés juste pour le procès, contre 6 en France pour les cours d’assises. Il arrive parfois chez moi, si quelque chose se passait comme, disons, le cadavre d’Owen le meurtrier se retrouvait dans la rue, poignardé une centaine de fois, et l’ADN du père de Louise est là, un jury refuserait de reconnaître le père coupable. La vengeance de cette façon n’est pas censée être légale, mais…si je faisais partie d’un tel jury, le père serait libéré. Surtout s’il n’avait pas d’histoire criminelle.

Il y a quelque chose qui me rend fou sur ce type. J’entends parler, et apparemment plusieurs témoins ont déjà attesté à cette partie, que cet Owen était accro à des jeux vidéo, surtout la bêtise dite Fortnite. Selon Franceinfo :

« son petit ami jouait à Fortnite et avait eu unealtercation en ligne avec un autre joueur qui l’insultait ». « Très énervé, il arrêtait de jouer et sortait de la maison comme il le faisait souvent pour se calmer »

Meurtre de Louise, Franceinfo

D’une part, c’est bien connu, et un objet d’autodérision dans la communauté de joueurs, que beaucoup d’entre nous — j’hésite á dire « nous » parce que j’évite à tout prix jouer contre des inconnus en ligne — ont des problèmes de maturité. J’ai mentionné à une amie lyonnaise, très fâchée déjà, qu’en anglais, il y a un mot, « ragequit » (abandonner/quitter dans un état rageux), que les joueurs utilisent pour décrire les gens qui tirent leurs manettes contre l’écran et quittent les jeux. Hyper-adulte, ça. Il y a d’autres comportements puérils. Voici un dessin que je traduirai :

Dessin de Penny Arcade. Il y a plein de dialogue, traduit ailleurs dans l'article.
©️Penny Arcade, 2008

Ça vient d’un « webcomic » dit Penny Arcade. Le type dans la chemise jaune s’appelle Gabe ; celui dans la chemise bleue s’appelle Tycho. Le dialogue va comme ça :

Gabe : OK. Quel est le plus grand problème de Soul Calibur en ligne ?

Tycho : Euh…les délais ?

Gabe : Faux ! C’est que l’on ne peut peut pas étrangler les autres sur Internet. Jusqu’à maintenant.

Gabe : C’est simple. Je serre ce cou en silicone dans les mains. Cet étouffement est transmis à des mains en titane qui ferment autour de la gorge de mon adversaire.

Tycho : Il paraît que le vendre sera difficile.

(Boîte qui montre « des raisons pour laquelle Gabe vous étranglerait » )

Ce dessin a déjà presque 17 ans. Ce problème n’est pas nouveau. Cependant, et c’est important, ce monsieur avait plus de problèmes que les jeux vidéo. Il s’avère qu’il avait déjà tenté la même chose une semaine plus tôt, sans succès selon Franceinfo « Le suspect avait déjà abordé une collégienne dans le même secteur le 4 février. » Évidemment, il avait de graves problèmes psychologiques.

Ce n’est pas du tout à excuser le rôle de Fortnite dans sa vie. Mais je fais la comparaison avec cet autre même que j’ai récemment vu, du Super Mario Bros original :

Il y a deux légendes. La première dit : « Moi : Les enfants, vous passez trop de temps sur les écrans ! » La deuxième dit : Moi en 1992 passant 3 jours entiers à essayer de faire le putain de saut pour passer ce trou. »

On n’a jamais entendu parler de quelqu’un qui est devenu fou à cause de Mario. Ces jeux ne sont pas joués contre des inconnus, il y a des différences très évidentes entre les bons et les méchants, le monde est en général très mignon, et si on échoue, on sait que c’est de sa propre faute. C’est pour ça que seulement les jeux de Nintendo sont permis chez moi, un choix fait exprès il y a une décennie quand j’ai acheté une Wii U pour La Fille. Il y a des jeux de Nintendo où on tue vraiment des ennemis, mais il n’y a jamais du sang, et il n’y a rien de réaliste.

Fortnite est loin d’être le pire à cet égard, mais ce n’est pas les contenus que je crains le plus — c’est la culture autour de tels jeux. On peut parler à haute voix avec des inconnus pendant les matchs en échangeant des insultes. Ce qui était une blague en 2008 est devenu la réalité en 2025, sans les manettes en forme de cou. C’est tout le harcèlement des écoles sans les profs ou directeurs qui pourraient corriger les mauvais comportements.

J’ai le cœur absolument brisé pour Louise et sa famille. J’espère que cet Owen passera le reste de sa vie en prison. Mais j’espère surtout que cette tragédie provoquera des réflexions dans la communauté de joueurs des jeux vidéo sur les comportements qui vont avec, et de ne plus supporter les gestes anti-sociaux au nom de compétition.

Portrait de Molière par Nicolas Mignard

Les 50 mots de neige esquimaux

Il y a des décennies, un linguiste américain, Geoff Pullum, écrivait une colonne pour un journal académique, Natural Language & Linguistic Theory (Langue naturelle et théorie linguistique). Après des années, il a publié un recueil, The Great Eskimo Vocabulary Hoax (Le Grand canular du vocabulaire esquimau). Le livre est nommé pour son essai le plus célèbre — la fausse « découverte » que la langue esquimaude avait plus de 50 mots différents pour des genres de neige. La réalité, c’est que l’esquimau fonctionne comme l’allemand avec moins de morts, où des phrases entières sont représentées dans un seul mot plein de préfixes et de suffixes. Mais c’est Langue de Molière ici, et mon sujet du jour, c’est le point auquel le français est le vrai esquimau !

Tout ça a commencé à cause de mon amie rouennaise, qui poste parfois des photos de son quartier avec la légende « ça caille ». Je note qu’il fait 7° C aujourd’hui là-bas, mais 16° C à Elbe-en-Irvine. On penserait donc que je n’ai rien pour m’en plaindre, mais je porte une veste tout ce mois, et ça ne m’a jamais empêché quand même. Mais vu que je n’ai jamais vu de la neige en Californie du Sud sauf pour un matin en 1989 (sérieusement), presque tout ce qui suit vient d’un article de la prof de Français Langue Étrangère Sandrine Escoffier.

On commence avec « ça caille », expression de laquelle elle dit « cela signifie qu’il fait un froid de canard ». Super, définir de l’argot par le biais d’autre argot ! Non, mais elle explique que l’on dit cette dernière parce que les canards s’en fichent du froid et se mettent dans l’eau même en hiver.

Cependant, est-ce vrai ? Oui, et j’ai trouvé ce clip où une paire de lunettes Jamy explique comment font les canards. Au fait, il s’avère que le mot français pour les plumes les plus proches de la peau, le « duvet » est aussi le mot anglais pour ce qui se dit en français la « couette ».

Une fois sous nos couettes, on reprend la neige. Elle commence avec le givre, apparemment de la glace qui forme sur tout sauf le sol pendant la nuit. C’est donc de la rosée, comme on voit sur nos voitures en Californie si elles restent dehors pendant la nuit, mais gelée. Pas si difficile.

Mais le měme truc sur le sol, où il devient tout sale, parce que comme a dit Adrian Monk, « La nature, c’est sale », c’est le verglas. En anglais, on dirait apparemment « black ice », « glace noire », selon mon dictionnaire bilingue. Je ne sais pas. Il faudrait que j’entende cette expression afin de la connaître — ce phénomène n’existe en Californie du Sud ! Si la rosée tombe par terre, le sol est simplement mouillé. On n’a pas de mot pour ça.

La « glace », elle est apparemment plus solide que le givre. On peut y patiner, selon Mme Escoffier. C’est quoi, patiner ? Non, je plaisante, mais je n’ai jamais, même une fois, vu quelqu’un en train de patiner sur un lac. C’est toujours sur une surface artificielle, avec des Zamboni. Vous les appelez « surfaceuse », selon Wikipédia, mais en Amérique du Nord, elles sont connues par la seule marque, tout comme on dit « Google » pour rechercher même avec Bing.

Alors, pour vous expliquer comment je peux être si ignorant, permettez-moi de partager un mème en anglais :

Photo avec deux légendes, « 10° C à San Diego » et « 10° C dans le Wisconsin ». (En fait, elles disent 50° Fahrenheit, car c'est en anglais.)
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En haut, ça dit « 10° C à San Diego », où tout le monde s’habille en cagoules, en gros manteaux, et en gants. Puis il y a « 10° C dans le Wisconsin », très au nord du pays, où tout le monde s’habille en robes sans manches ou en short. Pour les californiens, ces températures sont largement inconnues et on ne sait pas quoi faire face à un peu de froid. Dont moi, absolument.

Je ne peux pas mentir, voici la seule glace dont j’ai envie de faire la connaissance :

Entrée de chez Berthillon
Chez Berthillon à Paris. Photo par David Monniaux, CC BY-SA 3.0

Langue de Molière vous reverra la semaine prochaine avec un sujet spécial suggéré par La Fille. Vous ne devinerez pas quoi !

Votre pire loisir

En anglais, quand on parle de « The Talk », La Conversation, ça veut dire que l’on est parent, on a un enfant qui est sur le point de devenir ado, et il faut lui expliquer les oiseaux et les abeilles, comme on dit (ou chante) en anglais. (Je ne sais pas si les Français utilisent la même métaphore, et franchement, je n’ai pas envie de découvrir ce qui fera Google si je lui donne l’idée que je recherche ce sujet.) Mais une ou deux fois par année, il faut aussi que l’on a « La Conversation ». En général, c’est juste « Allez, arrêtez avec les cartes en anglais et le ketchup, hein ? », mais parfois il faut parler d’attitudes plus xénophobes.

Pancarte avec un drapeau américain qui dit « Frites américaines » mais en anglais
Pancarte de « Frites américaines », Photo par Lyght, CC BY-SA 3.0

Je me sens coupable à chaque fois où j’évoque ces sujets, car les habitués du blog sont exactement le mauvais public pour ces plaintes. Les internautes aléatoires qui passent par ici pour The Salingers et la page des blagues, qui sait ? Mais en général, si vous êtes ici, c’est dans un esprit accueillant, et je suis reconnaissant tous les jours pour ça.

Alors, après tous ces efforts pour me racler la gorge, qu’est-ce qui me dérange ? Hier, j’ai vu un post dans un groupe public sur Facebook avec une fausse capture d’écran du site Télé-Star. C’est une photo d’un homme inconnu à moi, assez réel ; c’est le gros-titre qui est faux :

Photo du homme nommé avec la légende : « Retraite : combien touche le chanteur Laurent Cabrol ? »
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En fait, M. Cabrol a souffert certains problèmes pendant sa retraite, tels que l’état le déclarant mort alors qu’il ne l’est pas, ce que j’ai appris du véritable article de Télé -Star. Mais cet article et toute autre chose que j’ai trouvée sur lui m’ont dit qu’il était journaliste, pas chanteur. Alors j’ai posé une question dans les commentaires :

Capture d'écran qui dit « Bonjour des États-Unis. Je ne connais pas ce monsieur. Google me dit qu'il était journaliste. Est-ce qu'il est réputé pour mal chanter ; c'est ça la blague ? »

J’ai rapidement reçu plusieurs réponses utiles ; oui, et il annonçait la météo sur Europe 1. (Alors il connaît Émilie Mazoyer ! Faut que l’on parle !) Merci, je les apprécie. Puis, le « Yankee go home » est arrivé :

Capture d'écran d'un commentaire : Justin Busch, et Google n'a rien dit sur toi ? C'est c** hein ! Reste aux USA »

J’ai appris des choses depuis 2020. Je n’ai pas répondu — le moi de 2020 aurait certainement mordu à l’hameçon, et je ne fais pas trop confiance au moi de 2023 non plus à cet égard. Honnêtement, je ne le comprends pas complètement — le but de sa première phrase m’échappe, mais je n’allais pas demander des explications. Mais un autre est arrivé, moins hostile, mais évidemment pas gentil :

Capture d'écran : Justin Busch (Des emojis de rire) mon dieu

Dites-donc, j’ai expliqué pourquoi je ne comprenais pas la blague, alors qu’est-ce qu’il y a ? J’ai demandé cette fois :

Capture d'écran : « Patricia Verduro, Vraiment, est-ce aussi étonnant que ça, qu'une personne qui habite à 9 000 km de la France ne connaît pas toutes ses personnalités ? »

J’ai eu ma réponse peu avant de publication :

Capture d'écran : « Justin Busch, non, mais avant on s'informe avant de venir ici. Jamais je dirai votre phrase dans une conversation entre québécois…désolée »

Je lis ce dernier mot comme « désolé que vous êtes stupide », pas « désolé pour vous avoir insulté ». Mais mettez ça de côté.

Je suis bien au courant qu’Internet ne manque pas de malpolis. Je suis également au courant que je vais dans des espaces qui ne sont pas « pour les touristes ». Si je voulais rencontrer juste des gens qui aiment traîner autour des étrangers, je me limiterais à Everything French, le groupe géant où tous les anglophones sont comme moi, et tous les francophones sont comme vous.

Peut-être que c’est seulement pour manque d’assez d’exemples, mais je ne peux même pas penser à une fois où j’ai vu un Français aller dans un groupe anglophone, puis poser une question qui montre une telle lacune dans ses connaissances. Et ça, c’est peut-être parce que je ne fais partie que d’une douzaine de groupes anglophones, dont plusieurs limités aux écoles où j’ai assistées. Cependant, c’est-à-dire que j’ai eu cette conversation plusieurs fois, mais ne l’ai jamais vue allant dans l’autre sens.

Il y a 20 ans — et vous vous souviendrez que nos pays n’étaient pas d’accord sur des choses importantes à l’époque — je lisais sur une habitude des touristes américains, de faire semblant d’être canadiens. Voici un article de 2004 (en anglais) qui parle d’une entreprise qui vendait des accessoires pour réussir ça — des t-shirts, des autocollants, etc. Et un autre de 2016 qui a demandé si ça se passait toujours (la réponse : oui). Je ne sais pas si ça arrive de nos jours, mais je n’ai pas trouvé d’articles récents. Je mentionne ça pour dire que je n’ai jamais vu des astuces de faire semblant d’être québécois ou belge en allant aux États-Unis.

Ce n’est pas à dire qu’il n’y a rien dans l’autre sens — les « freedom fries » étaient réelles, et il y a une raison pour laquelle on dit « French bashing« , un anglicisme, pour exprimer la francophobie en français. Mais il me semble que quand je la vois, c’est au niveau général, pas envers une personne spécifique. D’autre part, quand je suis autour des expatriés, les seuls anglophones sont soit moi soit des époux. (Toujours époux, jamais épouses. Vos hommes partagent mon avis sur les américaines, mesdames.) Je reconnais que je parle peut-être d’un point d’ignorance, mais je n’ai pas envie de contrarier les expatriés avec des questions indélicates.

Peut-être que j’en tire la mauvaise leçon, mais il me semble que je pose trop de questions et il faut que j’arrête.

Saison 3, Épisode 46 — Un macaron géant pour Françoise

C’était une semaine très inhabituelle chez Un Coup de Foudre — trois billets qui parlent de livres. Ce que vous ne saviez pas, c’était que la bibliothèque m’avait mis de la pression pour terminer Dungeon Crawler Carl — il y a autant de demande que les renouvellements des emprunts sont interdits. Je n’ai jamais emprunté un si récent livre avant, alors je n’avais aucune idée !

Cette semaine, je vais rompre ma « règle » contre refaire le même dessert pour mes événements de l’OCA. J’ai reçu la nouvelle qu’un couple que j’adore, dont leurs enfants sont plus vieux que La Fille, mais qui sont très proches de mon âge, rentrera bientôt en France. Ce n’était pas prévu, mais la vie est comme ça parfois. Le macaron Saint-Valentin est sans doute mon dessert le mieux accueilli , et j’aimerais le partager avec eux.

En parlant du Saint-Valentin, j’ai trouvé un clip de la fabrication de l’Ispahan chez Pierre Hermé, et je sais maintenant qu’il triche. Plus précisément, il triche encore — je vous ai dit il y a longtemps qu’il m’était évident que les grands chefs, dont lui, cachent des étapes importantes même dans leurs livres. Dans ce cas, il est évident en regardant le clip que la pâte est bien plus épaisse que d’hab pour les petites coques. Vous savez déjà ce qui suivra — je ferai une coque comme ça. Si ça marche, l’autre sera le même. Sinon, elle sera le fond.

La Fille a demandé que je fais un autre gâteau macaron parce qu’il me restait assez des garnitures. Voici les coques, faites avec une plus petite douille. C’est encore plus de preuve qu’il faut utiliser une pâte plus épaisse, car la rondeur reste toujours un problème, même avec une spirale plus étroite.

Y avait-il une sorte de match à la télé, un Saladier moyen, ça vous parle ? Toujours ravi de savoir que je n’ai rien payé aux athlètes de la NFL, ni à aucun rappeur. Mais un ami en France m’a contacté avec une question sur les plastrons qui portent les joueurs. Je l’ai envoyé cette photo du mien pendant mes années lycéens. Je la gardais pour un autre post sur les fouilles archéologiques dans mon ancienne chambre chez mes parents, mais voilà. Quand j’ai tourné le dos, sachez que c’était difficile :

Plastron de football américain qui couvre les épaules et la moitié de la poitrine.

Une meilleure nouvelle ? On a posté dans le groupe de Facebook qui m’a lancé dans toute cette aventure, pour demander où sont donc passés les anciens membres. Vu que c’est un groupe privé, pas de noms ni de captures d’écran. Mais c’était une réunion joyeuse avec quelqu’un qui me manque, et auquel je pense plus souvent qu’il ne le sache.

Notre blague traite des cantines à l’école. Nos articles sont :

Les gros-titres sont Reims et Asperges. Les Bonnes Nouvelles traitent du retour d’une espèce disparue, et c’est l’une de mes histoires préférées depuis le lancement de cette partie.

Sur le blog, il y a aussi Les pires plats au monde ?, des réflexions sur un article qui fait la polémique, Les Expats, par Clémentine Latron, ma critique d’une BD sur l’expatriation, Dungeon Crawler Carl, sur un livre par quelqu’un qui me connaît trop bien, et Le macaron Saint-Valentin, format gâteau 8 parts, la nouvelle version d’un classique du blog.

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Assiette de madeleines faites maison par Justin Busch

Dimanche avec Françoise

Bienvenue encore une fois au billet de plus en plus bien nommé, Dimanche avec Marcel (maintenant avec des contenus 50 % parus le dimanche !). Cette fois, j’ai avancé de 50 pages ; on est maintenant fini avec le premier tiers de Du côté chez Swann, mais vu le manque de chapitres, ça ne veut dire absolument rien. On parle de plusieurs thèmes aujourd’hui, mais vu que la malheureuse cuisinière Françoise est le sujet de deux parties de cette tranche du livre, cette semaine est dédiée à elle. Encore une fois, mes citation en français viennent de la version trouvée chez Wikisource.

On commence avec une digression sur M. et Mlle Vinteuil. M. est le professeur de piano de Combray ; Mlle est sa fille. Je mentionne cette partie seulement pour les mettre en jeu, car Proust a l’habitude de présenter des personnages, ne rien faire avec, puis y revenir des dizaines de pages plus tard. M. est possédé de deux traits importants : une « pudibonderie excessive » qui le mène à éviter Swann à tout prix, et un esprit dont « il craignait de les ennuyer et de leur paraître égoïste s’il suivait ou seulement laissait deviner son désir », au point où il cache toutes ses compositions de ses visiteurs.

Mlle Vinteuil, pour sa part, n’entre dans l’intrigue que pour se faire remarquer à cause de son odeur de frangipane. La traduction anglaise le rend comme si c’était juste « amande amère » (mentionnée aussi en français). Comme la cyanure ? Je me demande si ce sera important plus tard.

On reprend les aventures de la monstrueuse Tante Léonie. Elle rêve apparemment d’un incendie tel que :

la maison était la proie d’un incendie où nous avions déjà tous péri et qui n’allait plus bientôt laisser subsister une seule pierre des murs, mais auquel elle aurait eu tout le temps d’échapper sans se presser

Puis on entend parler que la relation entre la visiteuse hebdomadaire Eulalie et Françoise est beaucoup plus toxique qu’imaginée. Eulalie met des idées dans l’esprit de Léonie que Françoise lui vole de l’argent. Pour sa part, Léonie se dit ces trucs à haute voix, comme ça :

elle se prononçait à elle-même les excuses embarrassées de Françoise et y répondait avec tant de feu et d’indignation que l’un de nous, entrant à ces moments-là, la trouvait en nage

Le narrateur est certain que Françoise entendait aussi ce théâtre : à sa place, j’aurais tout de suite quitté le boulot plutôt que subir ça. Mais Françoise répond par faire encore plus d’efforts pour se montrer fiable. On y reviendra.

Il suit un épisode ridicule, la question d’un certain M. Legrandin. Est-ce qu’il a insuffisamment rendu le bonjour du père du narrateur ? Est-ce que c’était pour montrer qu’il était fâché pour telle ou telle raison ? On y reviendra.

De nulle part, on revient à Françoise. On en a entendu parler à plusieurs fois à ce point, toujours de manière positive. Mais maintenant, on entend plutôt qu’elle fait son tout pour s’interposer entre tante Léonie et tout autre domestique de la maison, au point où :

si cet été-là nous avions mangé presque tous les jours des asperges, c’était parce que leur odeur donnait à la pauvre fille de cuisine chargée de les éplucher des crises d’asthme d’une telle violence qu’elle fut obligée de finir par s’en aller.

Quelle méchante ! Pourtant, je me doute que notre narrateur prend tout pour le pire ; tôt ou tard, la réputation de chaque personnage se noircit dans son récit.

C’est donc le tour de M. Legrandin pour y subir. Il s’avère qu’après tout, il est aussi faux. Il avait dit ailleurs qu’il avait une sœur à Balbec ; pourtant, quand la famille du narrateur mentionne un voyage à suivre à cette ville, il n’offre pas de faire une introduction.

On a enfin d’où le nom « Swann’s Way » en anglais :

Car il y avait autour de Combray deux « côtés » pour les promenades, et si opposés qu’on ne sortait pas en effet de chez nous par la même porte, quand on voulait aller d’un côté ou de l’autre : le côté de Méséglise-la-Vineuse, qu’on appelait aussi le côté de chez Swann parce qu’on passait devant la propriété de M. Swann pour aller par là, et le côté de Guermantes. 

Pendant des décennies, je croyais que « way » ici voulait dire « sa façon de vivre ». Mais non, c’est juste littéralement le chemin qui passe par chez lui.

Et pourquoi est-ce que l’on apprend ça ? Le narrateur, son père et son grand-père prennent une balade par ce chemin. Il rencontre Gilberte, la fameuse Mlle Swann qui est amie de Bergotte, raison suffisante pour que le narrateur soit tombé amoureux d’elle sans la connaître. Alors, face à l’objet de sa passion, il dit quoi ?

Absolument rien.

Dites-donc, je lis un roman ou ma biographie ?

J’ai tout à coup tout genre de questions sur la relation entre Mlle Swann et Bergotte, car elle est mineure, et lui, il a au moins ses 30 ans. Et ils voyagent ensemble ailleurs en France ?!? Mais je sais enfin ce qui veut dire « Du côté de chez Swann » et il faudra que ça suffise pour l’instant.