Archives mensuelles : novembre 2025

Ici et là

Bof, demain c’est l’événement maudit annuel dont j’ai peur, mon anniversaire. Cette fois, mon 29e anniversaire fête ses 20 ans. L’année prochaine, il aura donc le droit de boire de l’alcool. La seule bonne nouvelle, c’est que cette fois, Thanksgiving est dans une semaine (bon, 5 jours) alors personne ne va mettre une bougie dans une tarte à la citrouille du supermarché et me dire que c’est mon gâteau. Vous n’avez aucune idée du point auquel ça saoule, à moins que votre anniversaire tombe à Noël. Je suis sûr que c’est l’anniversaire le plus pénible. Cette année, Noël est aussi ma date limite pour la maison d’édition Denoël. On va voir, hein ?

Tartelette à la citrouille avec une bougie au centre, Photo par mandiberg, CC BY-SA 2.0

J’ai passé trop de temps ce soir en faisant des recherches pour ma recette du jour, raison pour laquelle vous avez un autre « Ici et là » et rien sur la France. Je pensais à faire une copie de mon gâteau commercial préféré, le regretté « Chris’ Outrageous Chocolate Cake » du resto The Cheesecake Factory (retiré de la carte il y a 6 ans déjà), mais notre gâteau sera déjà assez compliqué, et quand c’est moi qui le dis, vous devriez vraiment craindre le niveau de cet autre gâteau.

J’ai une plainte sur mon nouvel appartement que je n’aurais jamais devinée. Dans chaque pièce, il y a deux interrupteurs d’éclairage. L’un contrôle une lumière qui fait partie du plafond. L’autre est censé contrôler une prise quelque part dans la pièce. Par convention aux États-Unis, mais pas par loi, ces prises sont montées à l’envers. Et il y a une telle prise dans chaque pièce.

Aucun interrupteur ne contrôle ces prises. Elles marchent, mais les lampes s’allument seulement en fonction de leurs propres interrupteurs. Je trouve ça absolument étonnant. Qu’il y ait une erreur, ça arrive de temps en temps. Mais systématiquement comme ça ? Absolument bizarre.

Je ne peux pas vous dire de quelle famille il s’agit, car je n’ai pas envie d’être poursuivi en justice, mais j’ai entendu parler d’une fille voleuse comme rien d’autre. De 5 ans. Il y a des mois, la mère de la famille a accusé sa fille aînée de lui avoir volé 100 $. L’aînée l’a nié, et a dit « Peut-être que c’est ma sœur. » Puis, un cadeau d’anniversaire a disparu de la chambre de la fille aînée. Et la collection de billets de 2 $ du mari de la famille aussi. Ce week-end, tous ces biens ont été retrouvés dans la chambre de la fillette de 5 ans. Ouais. Je n’aimerais pas être responsable de corriger ce comportement.

La Fille, qui m’a raconté cette histoire, n’a jamais rien fait comme ça. Sauf pour une chose. Je vous parle parfois de See’s Candies, le chocolatier californien. À partir de ses 2 ans, j’avais l’habitude d’y aller avec elle chaque semaine et choisir quelques bonbons. Je laissais les sacs sur le comptoir dans la cuisine. Un jour, juste avant son 3e anniversaire, j’ai trouvé le sac vide le matin. Mais comment ça ? Elle était trop petite pour atteindre le comptoir !

Il s’est avéré qu’elle avait vaincu le verrou de sécurité pour enfants d’un placard, puis elle avait utilisé l’étagère derrière la porte comme échelle pour atteindre les bonbons. Je n’ai absolument rien fait pour la punir — je ne voulais pas lui donner l’idée que l’intelligence est un défaut — mais après, j’ai commencé à ranger les bonbons dans un placard beaucoup plus haut.

Mais l’argent ? Non, elle est absolument fiable et n’a jamais rien volé. Une fois, elle m’a dit que M. Descarottes avait mangé les macarons dans le frigo. J’ai grondé le pauvre cobaye sans pitié devant elle. Elle n’a rien avoué, mais elle n’a plus jamais blâmé notre cher animal de compagnie non plus. Cependant, quand il s’agissait de mon stock de Valrhona, je lui ai dit que ce chocolat est trop cher pour grignoter

Il pleut des cordes en ce moment, et c’est comme ça toute la semaine. Je ne peux pas me coucher, car c’est beaucoup trop bruyant. Au moins c’est bon pour garder la séquence de jours de suite de publications !

Des dialogues avec La Fille, 4e partie

Il y a très longtemps, j’ai publié quelques dialogues avec La Fille (voilà, voilà et voilà), bien avant son premier cours de français, mais où elle apprenais des mots ici et là. Ça a beaucoup fait pour établir sa réputation ici, une sorte de Mademoiselle Descarottes en forme humaine. Mais comme vous savez tous, à partir de l’année dernière, elle est une star du département de langues étrangères à son lycée. Et franchement, l’honneur est à elle. Je ne l’aide jamais avec ses devoirs de français — ce n’est pas nécessaire. Cependant, je l’aide d’autre façon que j’ai évoquée ici au passé — nous échangeons des textos en français quand elle n’est pas chez moi. La semaine prochaine, elle fera enfin son début officiel ici en tant qu’autrice — merci de ne pas lui dire que je vous l’ai signalé à l’avance — alors avant ça, je veux vous donner une petite mise à jour sur son niveau. Nos dialogues sont exactement comme ceux du passé, mais je ne traduis plus rien.

À noter, il y a un mot qui apparaît ici qui est de notre propre argot et n’a rien à voir avec le mot écrit de même façon en français. Quand elle était très petite, et avait du mal avec la prononciation de certains mots en anglais, nous avons commencé à prononcer le mot « fine » en anglais comme si c’était le mot équivalent en français. Cependant, ça veut dire « bon » ou « OK » quand on l’utilise en réponse à une question ou commentaire. Plus tard, pour un effet humoristique, nous avons adopté une façon de l’écrire avec certaines lettres répétées pour indiquer de (fausse) exaspération : « fiiiiiiine ». Puis le rappeur Travis Scott a gâché ça en sortant une chanson nauséabonde, « Fein« , qu’il a prononcé de même façon, avec des paroles cochonnes. Pour éviter tout lien avec ça, nous avons commencé à le prononcer comme si c’était pareil au mot anglais « fin », sans « e », ce qui veut dire « nageoire ». En plus, au lieu d’écrire le mot, on utilise parfois des photos d’une mascotte bien connue aux États-Unis, Finn le poisson rouge, qui apparaît sur les paquets de Goldfish, un biscuit salé en forme de poisson rouge (liens en anglais).

C'est un biscuit Goldfish -- jaune, et en forme de poisson rouge sans détails -- avec un grand sourire. Il porte des lunettes à soleil, mais sur ses yeux, qui restent visibles.
Finn sur un paquet de Goldfish, Source, ©️Pepperidge Farm

Alors, sans plus d’attentes, des dialogues récentes.

Une fois, elle m’a écrit pour me dire qu’elle a eu de nouvelles chausseurs. Sauf qu’elle ne savait pas l’écrire. Je la corrige souvent comme ici, mais c’est comment elle apprend :

Elle: J'ai des nouveaux chasseurs
Moi : Chausseurs. Chasseur = Hunter.
Elle: Fiiiiinnnn
Moi : Aussi, c'est au féminin. « J'ai DE nouvelles chausseurs. »

Vous pouvez constater que je n’ai pas peur de la taquiner :

Elle : C'est mon anniversaire demi demain
Moi : demi-anniversaire
Elle: Je vous déteste
Moi : Bon
Elle : Booo
Moi : On n'est plus Halloween. Arrête de dire ça! (Émoiji de citrouille)
Elle : JE VOUS DÉTESTE !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Elle a toujours hâte d’utiliser les « expressions de la semaine » qu’elle apprend au lycée. Il y a des semaines, c’était « chut ». Le contexte ici, c’est que je venais de la corriger pour une autre erreur.

Elle : Chut (Émoji main sur la bouche)
Elle : Ce n'est pas amusant
Moi : Ça l'est pour moi !!! (Émojis de rire)
Elle : J'ai appris "chut" de ma prof
Moi : C'est un bon mot. Très authentique.

Le dialogue le plus récent la montre en bonne forme Descarottes. Il serait très fier d’elle. Le contexte ici, c’est qu’elle vient de me rappeler de lui acheter le nouveau jeu Zelda. Et de menacer de retirer les droits du dessin pour « C’est le 1er » si je l’oublie. Il est important de l’ajouter, nous ne sommes pas sérieux.

Elle : Tu comprends ?
Moi : OUI !
Elle : Bon! Puis tu comprends ce que tu dois faire
Moi : OUI MADAME
Elle : C'est "mademoiselle reine DIAS" pour toi !
Moi : Déesse

Vous voyez ? Elle est bien prête pour son début, déjà écrit et approuvé. J’ai corrigé les fautes avec elle, mais le texte est entièrement le sien. Vous allez en profiter !

Benjamin Franklin, nageur

J’écoutais Les Grosses Têtes en live lundi matin, alors l’émission de cet après-midi-là, quand la conversation a tourné en direction américaine (à partir de 1:19:36). Comme a dit Franck Ferrand au début de cette partie, Benjamin Franklin était ambassadeur du nouveau pays des États-Unis à la France, l’une des raisons pour lesquelles j’ai dîné — mais pas « desserté » — chez Le Procope avant le concert d’Indochine. Il fréquentait ce restaurant entre 1776 et 1785. Mais cette question ne tournait pas autour d’une histoire bien connue. En fait, je n’avais aucune idée de ce qui suit malgré le fait que M. Franklin n’était pas seulement l’un des Pères fondateurs, mais certainement le plus populaire après George Washington jusqu’à nos jours.

Portrait de Benjamin Franklin par Joseph-Siffred Duplessis, Photo par ZgEyj5EEKdux-g at Google Cultural Institute, Domaine public

La question posée par M. Ruquier était : « Je vous parlais d’un livre qu’il a écrit. Ça s’appelle « L’art de  » quoi ? » Franchement, le seul livre que j’aurais pu nommer, c’est L‘Almanach du Bonhomme Richard ; cependant, j’aurais cité le titre en anglais, « Poor Richard’s Almanac ». Et ça ne commence pas par « L’art » ; j’étais donc perdu.

Il y a eu de nombreuses bonnes hypothèses liées à sa carrière bien connue de scientifique — il a installé un paratonnerre, ce qu’il a inventé, sur le clocher de l’Église Saint-Clément d’Arpajon en 1782. On a même déviné que le bon mot était « séduire ». Sur ce sujet, Wikipédia est plus délicat que les histoires américaines :

Il choisit de séjourner dans une grande résidence desservie par de nombreux serviteurs à Passy, entretenant une douce amitié avec quelques beautés mesdames Helvétius ou Brillon.

Si le site Au Féminin exagère en proclamant « l’effet Benjamin Franklin pour séduire à « tous les coups » », c’est quand même vrai qu’il est bien connu pour de telles choses que sa lettre sur comment choisir une maîtresse (lien en anglais). Mais en fait, c’était bien plus obscur que ça.

La bonne réponse était en fait « L’art de nager », une brochure de 24 pages qu’il a écrit sur ce sujet (lien en anglais). Là-dedans, on trouve des astuces pour flotter, nager sous l’eau et même faire de la nage sur place. Ce que l’on n’apprend pas des Grosses Têtes, c’est que M. Franklin a tiré pas mal de ses conseils d’un livre français d’un siècle plus tôt, « L’Art de nager, démontré par figures, avec des avis pour se baigner utilement » par Melchisédech Thévenot, physicien et inventeur du niveau à bulle.

Mais vous devriez aussi connaître Benjamin Franklin pour une autre raison. De nature optimiste, il a prêté une expression aux Français qui fera partie d’une chanson célèbre après son départ :

Le chant est connu sous le nom de son refrain : « Ah ! ça ira ». Il reprend l’expression favorite de Benjamin Franklin, résolument optimiste et répétant au plus fort de la guerre d’Indépendance en Amérique, à qui lui demande des nouvelles : « Ça ira, ça ira. »

« Ah ! ça ira, ça ira, ça ira… »
Portrait de Molière par Nicolas Mignard

Il fait une liste et il la vérifie deux fois

Langue de Molière arrive un jour à l’avance cette semaine, car ça rend d’autres tâches plus faciles.

Connaissez-vous la chanson de Noël « All I Want for Christmas Is You » ? Heureusement, ça n’a rien à voir avec notre sujet, même si j’ai vu des mèmes qui prouvent que Mariah Carey est trop connue en France pour mes goûts. Mais « Santa Claus is Coming to Town », ça vous parle ? Surtout la version des Jackson 5 ?

La chanson est beaucoup plus vieille que ça, mais celle-ci est la version jouée la plus souvent à la radio chez moi. De toute façon, une parole dit « He’s making a list and checking it twice », la traduction de mon gros titre. Il s’agit de la liste de bons enfants gardée par le Père Noël. Et ça nous amène à ce billet sur les options pour faire des listes d’Il Est Quelle Heure

Elle est beaucoup plus organisée que moi, et montre comment utiliser les applis Rappels et Calendrier pour organiser ses tâches. Moi, je mets tout dans des fichiers Notes, à moins qu’il s’agisse d’un rendez-vous ou une date limite — dans ce cas, je le mets dans le Calendrier. Par exemple, cette date limite qui vient d’expirer pour mon manuscrit chez Flammarion. WAAAHH !

Capture d'écran d'une entrée dans mon calendrier : « Flammarion date limite, Monday, Nov. 17 2025 »

Ouais, j’écris mes notes dans le calendrier en français, mais la langue du portable reste en anglais, d’où « Monday » au lieu de lundi.

De toute façon, c’est Langue de Molière, alors mon sujet est comment elle a dit certaines choses plutôt que les calendriers eux-mêmes. J’ai noté deux choses dans mon fichier de « Langue de Molière-ismes » (dans Notes, bien sûr).

Je suis certain que bateau est parmi les premiers mots que j’ai appris. Mais en quelque sorte, j’ai passé 5 ans et demi sans savoir que c’est aussi un adjectif, non seulement le truc qu’un hibou vert navigue autour du lac (dites-donc, les exemples étaient très artificiels). Voilà :

Très bateau, mais ça fait du bien au moral.

En anglais, le mot donné pour ce sens de bateau est « hackney », et de son tour, c’est aussi le mot pour une autre forme de transport, un « hackney cab », c’est-à-dire un fiacre. J’étais très curieux si c’était plus qu’une coïncidence, alors j’ai vérifié le Trésor de la langue française. Et là, sans trouver une explication directe, il me semble que non, car cet usage ne date que des années 1970 :

B.−Fam. Idée qui a trop souvent servi, et de ce fait dévalorisée. C’est un vieux bateau. Synon. lieu commun.

− Emploi adj. [En parlant d’une formule, etc.] Rebattu, banal. Cette idée-là, c’est un peu bateau (Rob. Suppl. 1970). Phrases bateau, sujets bateaux (Gilb. 1971).

Bateau

Mais quelle coïncidence, ça !

L’autre chose, c’est le moment le moins « tous publics » de toute Langue de Molière. Elle a écrit :

J’essaye de m’approprier l’outil, parfois avec succès et parfois pas (cf: l’autre jour, j’ai essayé la « vue en colonne » pour une liste et c’était la fête du slip).

Je me suis demandé : « C’est quoi la fête du slip ? », et sachant qu’un slip est un sous-vêtement, j’étais prêt à lire que c’était quelque chose de gênant. Mais j’ai trouvé tout autre chose :

C'est une capture d'écran de Google, qui offre une photo de gens qui portent des slips à l'extérieur de son pantalon, souvent avec des bretelles. Il y a une explication en anglais au-dessous.

Je vous jure, je n’ai rien fait pour tricher ! La première phrase se traduit : « La Fête du Slip est un festival annuel de films pornographiques alternatifs qui se tient à Lausanne, en Suisse. »

Ô. Ô.

Wikipédia éclaircit légèrement la situation :

Intitulée d’après une expression populairela Fête du slip, sous-titré Festival des sexualités, est un festival pluridisciplinaire ayant pour thème les sexualités qui s’est déroulé chaque année à Lausanne de 2012 à 2023.

Fête du slip

Euh, le lien pour l’expression populaire suffira. Sérieusement.

(Familier) (Ironique) Décrit un comportement sans-gêne, une situation qui dégénère ou devient absurde, un relâchement total.

« — Tes parents m’ont appris que tu ne passais pas les fêtes chez eux, ils m’ont invité, j’ai dit non, ils essaieraient encore de me faire exorciser. A la place, c’est la fête du slip à Mykonos. » — (Agnès Martin-LugandLes gens heureux lisent et boivent du café, Éditions Michel Lafon, 2013, chap. 5)

Fête du slip, Wiktionnaire

J’ai visité Mykonos une fois. Je n’aurais pas été surpris à lire que la fête du slip là-bas est pareille à celle de Lausanne. Passez plutôt par Santorin et Rhodes si vous vous retrouvez en Grèce.

Dernier mot pour cette Langue de Molière ? Rougir.

Langue de Molière vous reverra la semaine prochaine pour traiter des traits d’union.

Saison 4, Épisode 33 — À la plage avec Monsieur et Madame

Cette semaine est très inhabituelle. Comme d’habitude, la page des blagues de la semaine a été mise à jour avec la blague de la semaine dernière. Mais cette fois, uniquement, avec celle de cette semaine aussi. Pourquoi ?

Parce que je n’ai jamais eu autant de mal d’enregistrer une blague sans rire ! Il m’a fallu plus de 40 essais afin d’en enregistrer un que je pouvais même éditer, tellement elle m’a fait rire ! La Fille ne pouvait pas la lire à haute voix sans plier de rire non plus. À noter, je ne l’ai pas écrite, seulement l’ai un peu francisée.

J’ai reçu mon nouveau micro AKG Lyra cette semaine, alors la qualité de l’enregistrement est beaucoup mieux. Cependant, il reste un peu trop de réverbérations, parce que j’ai dû l’enregistrer dans un couloir au lieu d’un coin. Une fois que ma chambre est complètement rangée, ce ne sera plus de problème.

Je suis très mécontent de l’emballage du micro. C’était vendu tout neuf, mais pour 15 $, le vendeur n’a mis qu’un peu de papier autour du carton original. C’était donc mal protégé pendant la livraison. Voilà :

Grace aux efforts de La Fille en octobre, nous avons fini par économiser 400 $ par rapport au devis original des déménageurs. Je lui avais fait une promesse que si ça se passait, je l’achèterais le nouveau jeu vidéo Hyrule Warriors : Les Chroniques du Sceau. Le jeu est sorti le 6 ; elle l’a eu samedi. Mais afin d’y jouer, elle a dû m’aider à déballer la télé. C’est un monstre — seulement 127 cm, mais un téléviseur plasma, alors beaucoup plus lourd que les écrans LCD et LED de même taille de nos jours. Cependant, avec du VRAI noir, pas le noir incandescent de ces technologies moins chères. Je le regrette uniquement aux moments de déménagement ; c’est-à-dire deux fois pendant les 15 dernières années. Le reste du temps, je l’adore.

Quant au jeu, c’est un must pour les amateurs de Zelda. J’étais vraiment impressionné, même si j’ai trop mal aux mains pour y jouer.

Mon anniversaire est ce samedi. Seulement une chose m’énerve plus que cette pub, une version de laquelle je reçois chaque année avant l’événement maudit :

Capture d'écran d'une pub de la chaîne de glaciers Baskin-Robbins. Elle propose que je commande un gâteau pour moi-même.

Baskin-Robbins est la plus grande chaîne de glaciers aux États-Unis, de qualité moyenne mais de prix sérieusement élevés — 6 $ pour une boule dans la plupart de leurs boutiques. La pub dit : « C’est ta journée spéciale. Fais-toi plaisir et aie exactement ce dont tu as envie… » (j’ai coupé le reste). Ouais, rien ne me plaît autant que l’idée de commander un gâteau de 8 parts pour manger tout seul chez moi. Un gâteau d’anniversaire, c’est le genre de chose qu’il faut recevoir de quelqu’un d’autre ou pas du tout.

« Mais Justin », me dites-vous, « vous faites chaque année un gâteau sur ce blog ! » Ah oui, mais c’est pour partager les recettes ! L’important, c’est que je n’en achèterais pas un. Au fait, La Fille déteste mon choix pour cette année. Tant pis. Je le ferai quand même, car c’est mon préféré de tous les gâteaux américains. Et vous pouvez le faire avec des ingrédients disponibles en France.

Pour finir sur une meilleure note, quelqu’un aime vraiment ma recette de macarons de Boulay, hein ? C’est dingue ! (Google Search Console me dit que c’est dû à 6 combinaisons différentes de mots clés, alors il ne s’agit pas d’un robot bloqué sur une recherche.)

Capture d'écran des statistiques du 14 novembre : 649 vues, dont 375 uniquement pour les macarons de Boulay.

Notre blague traite d’une histoire d’amour lamentable. Nos articles sont :

Il n’y a pas de Bonnes Nouvelles cette semaine. Les gros-titres sont Personne et Portable.

Sur le blog, il y a aussi Comment marche le monde, sur des pages humoristiques qui possèdent de la sagesse, Hunters of Sheydim, sur un projet BD de mon cousin, Deux erreurs d’écoute, sur des malentendus et Le voyage fou qui n’aura pas lieu, sur un voyage que je ne prendrai pas.

Si vous aimez cette balado, abonnez-vous sur AppleGoogle PlayAmazonSpotify, ou encore Deezer. J’apprécie aussi les notes et les avis laissés sur ces sites. Et le saviez-vous ? Vous pouvez laisser des commentaires audio sur Spotify for Podcasters, qui abrite la balado. Bonne écoute !

Dimanche avec le marquis de Saint-Loup

On reprend maintenant « À l’ombre des jeunes filles en fleurs ». Cette fois, j’ai avancé de 30 pages.

La dernière fois, nous avons laissé le jeune Proust au milieu du paysage autour de Balbec, en train de rêvasser sur les filles paysannes. J’ai raté ce qu’il a dit immédiatement après :

Pour les belles filles qui passaient, du jour où j’avais su que leurs joues pouvaient être embrassées, j’étais devenu curieux de leur âme.

Heureusement pour sa réputation littéraire, les portables n’existaient pas à l’époque. Sinon, il aurait écrit « j’étais devenu curieux de leur 06 » et ça aurait provoqué un scandale.

Au moins ces réflexions sans cesse sur déranger toute femme autour de lui sont récompensées par le meilleur moment de l’œuvre entière jusqu’ici :

quelques années après celle où j’allai pour la première fois à Balbec, faisant à Paris une course en voiture avec un ami de mon père et ayant aperçu une femme qui marchait vite dans la nuit, je pensai qu’il était déraisonnable de perdre pour une raison de convenances ma part de bonheur dans la seule vie qu’il y ait sans doute, et sautant à terre sans m’excuser, je me mis à la recherche de l’inconnue, la perdis au carrefour de deux rues, la retrouvai dans une troisième, et me trouvai enfin, tout essoufflé, sous un réverbère, en face de la vieille Mme Verdurin que j’évitais partout et qui, heureuse et surprise, s’écria : « Oh ! comme c’est aimable d’avoir couru pour me dire bonjour. »

Bien sûr, il fallait subir tout le récit de Swann chez les Verdurin pour savourer vraiment ce TLBM (tu l’as bien mérité).

Et juste après ça, Bergotte lui-même passe par Balbec et le narrateur se plaint que :

elle me remit une lettre qui avait été déposée pour moi à l’hôtel. Je ne connaissais personne à Balbec. Je ne doutai pas que la lettre ne fût de la laitière. Hélas, elle n’était que de Bergotte…

Oui, il aurait préféré recevoir une lettre d’une laitière inconnue que de Bergotte, celui pour lequel il avait passé des mois à manipuler Gilberte et sa mère juste pour le rencontrer.

Je vous épargnerai d’autres contes de ce genre. Mais après un peu, Proust met dans la bouche de Mme de Villeparisis ses critiques d’autres écrivains français (ce n’est pas la première fois, d’où mon avis que ce sont vraiment à lui) :

Timidement je citais à Mme de Villeparisis en lui montrant la lune dans le ciel quelque belle expression de Chateaubriand, ou de Vigny, ou de Victor Hugo…

— Et vous trouvez cela beau ? me demandait-elle, génial comme vous dites ? Je vous dirai que je suis toujours étonnée de voir qu’on prend maintenant au sérieux des choses que les amis de ces messieurs, tout en rendant pleine justice à leurs qualités, étaient les premiers à plaisanter… M. de Chateaubriand venait bien souvent chez mon père… dès qu’il y avait du monde, il se mettait à poser et devenait ridicule.

Elle reprochait à Balzac, qu’elle s’étonnait de voir admiré par ses neveux, d’avoir prétendu peindre une société « où il n’était pas reçu »… Victor Hugo…n’a reçu le titre de grand poète qu’en vertu d’un marché fait et comme récompense de l’indulgence intéressée qu’il a professée pour les dangereuses divagations des socialistes.

J’ai dû beaucoup couper, mais je vous rassure que les sentiments ici sont liés aux bons écrivains. Il n’est pas timide, notre Proust !

Puis, le neveu de Mme de Villeparisis arrive à l’hôtel, le marquis de Saint-Loup, et tout change. Le narrateur imagine qu’ils deviendront amis :

Au cours de nos promenades, elle nous avait vanté sa grande intelligence, surtout son bon cœur ; déjà je me figurais qu’il allait se prendre de sympathie pour moi, que je serais son ami préféré

Mais il a bien tort :

Quelle déception j’éprouvai les jours suivants quand, chaque fois que je le rencontrai dehors ou dans l’hôtel… je pus me rendre compte qu’il ne cherchait pas à se rapprocher de nous et vis qu’il ne nous saluait pas quoiqu’il ne pût ignorer que nous étions les amis de sa tante.

Après un certain temps, il y a finalement une amélioration, sans vraie explication, et :

je vis cet être dédaigneux devenir le plus aimable, le plus prévenant jeune homme que j’eusse jamais rencontré.

C’est ici que j’arrête, car je sais déjà grâce aux tableaux des matières que ce marquis jouera un rôle important beaucoup plus tard. Il faut donc me concentrer la prochaine fois sur ce qu’il fait, car ce sont nos premières impressions de son caractère. Mais il y a une bonne nouvelle là — Proust nous épargnera de ses rêves inutiles sur chaque fillette malheureuse qui croise son chemin !

Le voyage fou qui n’aura pas lieu

Il y a 10 jours, j’ai eu une conversation avec un ami anglophone par texto. Il habite au Texas, pas en Californie, et c’est donc pourquoi il parle ici d’un vol à partir de Dallas :

Capture d'écran de textos, traduits en bas

Ça dit : « Dallas à Paris, 440 $ sur One World Alliance ». Il n’y a aucune compagnie aérienne de ce nom ; il doit parler d’American ou de British Airways dans ce cas, les deux seuls de ce groupe-là à desservir Paris. Pourquoi il parle comme ça, sans être précise, je ne le comprendrai jamais. De toute façon, un peu irrité, j’ai répondu « Alors, réserve-le. » Après tout, pourquoi me dire ça ? Je ne peux pas voler de Dallas, au moins sans payer un vol d’au moins 400 $ pour y aller de Los Angeles.

Mais j’étais curieux, alors j’ai vérifié le site Hopper, en général le meilleur pour faire des comparaisons entre compagnies aériennes en anglais. En ce moment-là, pendant la première semaine de décembre, j’aurais pu acheter un aller-retour de Los Angeles à Paris sur soit Delta soit Air France pour 550 $. Mais je ne l’ai pas fait. Je sais que j’aurai bientôt des dépenses, et ce serait une mauvaise idée. Je l’ai laissé tomber, à regret.

Ce soir, afin de vous en parler, je l’ai revisité. Quelle différence ! La seule compagnie aérienne qui livrera un billet pour environ 550 $, comme suggéré le calendrier en bas, c’est ITA. Air France, Delta ou United coûteraient tous entre 740 $ et 800 $. J’ai certainement raté mon opportunité, même si je savais que c’était le choix responsable. (Je suis impulsif, mais moins que ça paraît sur ce blog.) Au fait, n’imaginez pas que les deux dernières semaines en rouge coûtent seulement 775 $, comme indique le calendrier — ces dates coûtent environ 1400 $ sur Air France. Le chiffre bas serait sur quelque chose comme Turkish Airlines, et si vous pensez que je passerais par le Moyen-Orient, vous êtes encore plus fou que moi !

Capture d'écran du mois de décembre sur le site Hopper. Les dates entre le 1er et le 10 sont en vert ou en orange, ce qui indique des prix moins chers. Tout après ces dates est en rouge, très élevé.

Mais supposons que j’avais fait ça. Qu’est-ce que j’aurais fait pendant la première semaine de décembre en France ?

La réponse, c’est que dès que j’avais quitté CDG, je serais parti direction Gare de l’Est pour prendre un train vers Strasbourg. Après tout, le marché de Noël ouvre le 26 novembre, et reste ouvert jusqu’au 24 décembre, et s’il y a une chose dont j’ai envie, c’est de voir finalement dans la vraie vie cette photo, partagée originalement dans « Je découvre le Bas-Rhin » :

C'est une photo du quartier dit « Petite France ». La rivière Ill est au centre, et des maisons à pans de bois sont sur les bancs. Il y a de la neige sur les toits.

Je ne pardonnerai jamais la SNCF de m’avoir envoyé cette photo, même si c’est moi qui étais abonné à leurs courriels. Elle me hante chaque année en hiver, même si je ne comprends pas pourquoi vous peignez les toits en blanc pour l’occasion. Même les strasbourgeois disent de cette photo, le quartier Petite France :

Le quartier de la Petite France est incontestablement le passage obligé de votre séjour.

Les immanquables de Noël

La ville de Strasbourg semble avoir planifié ce Noël pour me torturer vraiment. Le 22 novembre, c’est-à-dire mon anniversaire, il y aura une visite guidée, « Visite enchantée Disney ». Je citerai un peu de la description :

Plongez au cœur de l’imaginaire Disney et découvrez comment Strasbourg est devenue une source d’inspiration pour les dessins et les illustrations fantastiques et magiques qui constituent cet univers fascinant ! 

Si seulement vous connaissiez le Disneyland des années 80, avant Marvel et Star Wars ! Ils parlent de mon Disney, la raison pour laquelle cette photo m’a sous son emprise. Savez-vous ce que je ferai ce maudit jour-là ? Je perdrai des heures assis sur un trottoir dans une banlieue de Los Angeles pour voir un défilé auquel la fanfare de La Fille participera. Après octobre dernier, vous ne m’entendrez plus jamais dire que je préférerais une dévitalisfation, car je sais maintenant exactement à quel point c’est faux. Mais : Strasbourg ? Los Angeles ? Dois-je vraiment penser afin d’en choisir un ?

D’autres choses que je raterai ? Connaissez-vous La Soupe Étoilée, un événement caritatif où les chefs étoilés de la région vendent des soupes au marché, avec un livre de recettes historiques de l’événement disponible uniquement sur place ? Ou le Grand Sapin sur la place Kléber, qui fait 30 m de hauteur ? (Celui de Fashion Island, un centre commercial près de chez moi, fait pareil. Mais on reste emprisonné en Californie.) Et la ville a une autre astuce :

Grimpez les 332 marches en haut de la Grande Dame et la récompense se trouve à 66 m de hauteur, avec une vue à couper le souffle idéale pour saisir tout le centre historique.

Les meilleurs points de vue

D’accord, je n’ai vraiment pas envie de plus d’escaliers en ce moment. Mais d’ici décembre, je devrais être prêt à les tenter à nouveau !

Cependant, je vous promets, il n’y aura pas de « je suis parti à la recherche de nougat » ou autre farce. Le budget ne le permettra vraiment pas, et j’ai déjà raté la meilleure opportunité de loin. Mais sachez que j’y penserai l’année prochaine !

Deux erreurs d’écoute

L’une des choses les plus difficiles quand on apprend une langue seule, c’est que l’on ne sait pas ce que l’on ne sait pas (pour emprunter une pensée à l’ancien secrétaire à la défense américain Donald Rumsfeld — lien en anglais). C’est souvent le cas que j’écoute Les Grosses Têtes le matin et quelque chose me laisse perplexe, mais parce que je ne sais pas ce que je viens d’écouter, je ne peux rien demander à personne. Aujourd’hui, c’est l’histoire de quelque chose qui m’a dérangé pendant des mois — puis un autre que j’ai tout de suite compris car assez de contexte a été fourni.

Je ne peux pas trouver exactement la bonne publicité, car il s’agit de la radio et YouTube n’est bon que pour la télé. Mais depuis des mois, il y a une chaîne écossaise, ou peut-être irlandaise, qui diffuse des publicités pendant les pauses publicitaires des Grosses Têtes. Elle vend tout genre de produit pour les animaux de compagnie. Je suis sûr que vous en avez entendu parler. C’est « MacCiseaux ». Voici l’une de leurs pubs de télévision :

Évidemment, je parle en fait de Maxi Zoo. Mais je ne pouvais pas l’entendre de cette façon. Il y a juste assez d’une pause entre les deux syllables dans la prononciation française de « Maxi » que je l’entends comme « MacCi », « Mac étant le gaélique pour « fils de ». Oui, c’était fortement bizarre que le père en question portait un nom français, mais sans avoir entendu parler de Maxi Zoo, je ne pouvais pas l’entendre de bonne façon. Ce qui m’a enfin sauvé, c’est que j’ai fait une recherche sur certains produits que M. Descarottes aurait utilisé, et le site faisait partie des résultats.

L’autre erreur est venue il y a deux jours. J’écoutais RTL plutôt tard dans ma voiture, et il y avait un replay des Grosses Têtes. Je ne connais pas la date de diffusion originale, alors désolé, mais pas de lien.

De toute façon, M. Ruquier a posé la question « Qui est le docteur Ankh Pym ? » Je n’avais aucune idée de qui il parlait jusqu’à ce que l’on dise « Un personnage de Marvel. » Il s’agissait donc de HANK Pym, le premier Ant-Man. Le français n’a pas la voyelle anglaise dans ce prénom, mais on prononce bien le « h » au début. Il me semble que tout ce temps, j’entendais des « h » au début de certains mots français où ils n’existent vraiment pas. Je me souviens bien d’entendre « Les Halles » pour la première fois dans le métro parisien et d’être surpris qu’il n’y ait pas de liaison. Après, je me suis convaincu qu’il y avait au moins un petit « h » là. Mais il n’y en a vraiment pas.

Mais sérieusement, que faites-vous pour ne pas confondre un super-héros de Marvel avec un symbole des pharaons ?

Ce sont deux ankhs en or, avec des hiéroglyphes inscrits partout
Deux ankhs du tombeau du pharaon Toutânkhamon, Photo par Matt Davies, Domaine public

Hunters of Sheydim

Je n’ai pas l’habitude de faire de la publicité pour quoi que ce soit. Comme j’ai dit tout au début, il n’y a pas de ça ici afin que je puisse vous donner mes avis honnêtes sur tout. (Ça dit, si les gens chez Valrhona voulaient me passer des produits gratuits — et surtout du Dulcey — je ne dirais pas non. Je dis déjà que c’est le meilleur chocolat.) Aujourd’hui ne fait pas exception : je n’ai pas pris d’argent, je ne l’accepterais pas, et mon cousin l’auteur ne sait même pas que j’écris sur lui (je le lui dirai). Mais il est en train de lancer un projet que j’adore sur Kickstarter, et puisque je veux qu’il réussisse, je vais en parler. Il y a même un lien français pour justifier sa présence ici ! (Tout petit, mais quand même.)

Au collège, j’ai découvert Donjons et Dragons, et comme je vous ai dit en écrivant sur le film, tout ce que je sais vient de D&D. En particulier, je suis tombé amoureux du livre dit « Monster Manual » (Le Manuel des monstres), ou comme le connaît mon ex, mon arbre généalogique. Parmi les choses que j’ai appris de ce livre était la tradition judéo-chrétienne de démonologie. D&D prend beaucoup de libertés avec ses sources, et a créé deux catégories de démons et de diables avec ces personnages, mais ce n’est pas trop important pour notre histoire. Ce qui compte, c’est que j’étais très impressionné par le roi des diables, ce type charmant, Asmodeus (connu en français sous le nom Asmodée) :

Dessin d'Asmodée originalement du Manuel des Monstres. Il a un visage un peu comme un elfe, avec des oreilles pointues, deux petits cornus sur les sourcils et une barbe et une moustache comme dans le portrait célèbre du cardinal Richelieu. Il porte un collier en forme de grosse chaîne, avec un pendentif qui ressemble à un dés, et tient un sceptre dans la main gauche.
Source, ©️Wizards of the Coast

La barbe et la moustache ressemblent un peu trop au cardinal Richelieu, mais dites-donc, il y a une raison pour laquelle on a l’expression « handsome devil » (littéralement, beau diable) en anglais. De toute façon

Quel rapport avec mon sujet ? Mon cousin Jeff Marvin est écrivain, et avec sa femme Tamar et une équipe d’artistes expérimentés dans l’industrie de bandes-dessinées, il a écrit une BD de 92 pages qu’il espère sera le début d’une plus grande histoire. L’histoire s’appelle « Hunters of Sheydim« , « hunters » étant chasseurs en anglais, et « sheydim » étant démons en hébreu. Plutôt qu’utiliser la cosmologie de D&D, c’est un retour aux sources, avec un traitement d’Asmodée plus proche du Livre de Tobie (pas officiellement partie de l’Ancien Testament, mais de son époque). Plus tard, dans des légendes juives, il était considéré le roi des démons. Lesdits chasseurs, ses héros, suivent ce cadre juif, étant deux descendantes de « conversos », les juifs devenus catholiques pour rester en Espagne sous le roi Ferdinand et la reine Isabelle.

Je vais partager quelques pages que Jeff a déjà partagées sur Kickstarter ; je crois que ça ne le dérangera pas. Le livre ouvre en Pologne, où des hommes habillés en costumes avec des cravates, mais portant des masques de chèvres et d’autres démons, sacrifient un homme à Asmodée :

Première page de Hunters de Sheydim.

Après ça, il y a une illustration trop cool, l’une des deux raisons pour lesquelles j’ai décidé de partager son projet. Le gros titre dit : « La fin du triumvirat ». J’imagine que ça fait référence aux trois types masqués au centre.

Deuxième page, un dessin qui couvre la page entière. De gauche à droite, il y a trois hommes qui portent un masque de chèvre, de taureau et de serpent. Ils sont entourés par des flammes. Devant eux, une foules d'hommes cagoulés chantent à Asmodée.

Finalement, après ça, il s’avère que le but du sacrifice était d’offrir un corps à Asmodée pour posséder. Un homme déguisé en chèvre enlève son masque et demande : « Seigneur Asmodée, est-ce bien vous ? » Le cadavre ouvre ses yeux, regarde autour de lui, et dit : « Azazel, Lucifer, Moloch, mes amis, ça me fait du bien de vous revoir. Ça fait… quoi, une décennie depuis la dernière fois où j’ai eu quelque chose de sucré ? J’ai le goût de cendres dans la bouche. » Il pause, puis ajoute : « A-t-on envie d’un croquembouche ? » Un serviteur l’interrompt « Mon seigneur ? Nous avions cru… » mais Asmodée finit : « Oui, oui, la vengeance d’abord. J’écorcherai ce foutu rabbin moi-même… mais maintenant, j’ai envie d’un croquembouche. »

Troisième page de Hunters of Sheydim.

C’est dingue, le point auquel Asmodée et moi nous comportons de même façon ! Y a-t-il un lecteur qui doute que si j’étais de retour après une décennie en enfer, la première chose dont j’aurais envie serait une pâtisserie française ? (Quelque part à Anguille-sous-Roche, il y en a une, pas une lectrice du blog mais quand même, qui hurle « Je le savais ! »)

Ils livreront partout au monde, alors je me sens à l’aise pour partager ce lien au projet (qui reste uniquement en anglais). Je veux être bien clair que je n’ai pas d’attentes, mais je crois que le sujet intéressera à certains lecteurs, et Jeff et sa famille sont vraiment de chics types. C’est un plaisir d’en parler.

Portrait de Molière par Nicolas Mignard

Monsieur et Madame

Il y a quelques mois, j’ai écrit sur la chanson d’amour « Jean » par Jeanne Cherhal, où j’ai remarqué que c’était mignon au point de vomir, d’avoir un couple de même prénom. Ça a provoqué ce commentaire

Il y a des calembours qui sont de grands classiques de l’humour un peu « pourri » en français.
La série des « Monsieur et Madame ont un fils/une fille » est très connue. Jean est une mine d’or dans cette série.
– « Monsieur et Madame Bonneau ont un fils. Comment l’appellent-ils ? »
– « Jean »
– « Monsieur et Madame Croque ont une fille. Comment l’appellent-ils ? »
– « Odile »

Et Jean passe… (et des meilleurs) [emoji souriant]

Commentaire de Filimages

Mais si on poursuit le fil de commentaires, on voit que « Odile Croque » m’a laissé perplexe. Il m’était impossible de penser au l’inverse, au nom de famille devant. On peut trouver des listes de noms en anglais alphabétisées par nom de famille, mais en général, on écrit le prénom devant le nom de famille. (Indice qui montre que nous avons raison : qu’est-ce qui veut dire le « pré » dans « prénom » ? C’est exact.)

Et ça nous amène au problème de ce genre de blague. L’autre blague évoquée dans ce même commentaire compte sur l’ordre opposé par rapport à « Croque Odile » ; c’est-à-dire qu’il faut mettre le prénom devant, afin d’obtenir « jambonneau » (mot inconnu pour moi avant ce billet-là).

Ça fait 5 ans maintenant où je galère à comprendre quel est l’ordre « canonique » en français. Si on revisite certaines photos du passé, par exemple, au cimetière de Montmartre, on voit que c’est Fred CHICHIN et Michel GALABRU qui y sont enterrés, pas CHICHIN Fred et GALABRU Michel. Mais je remarque pour la première fois que les noms de famille sont écrits en majuscules, et j’avais l’impression jusqu’à maintenant que c’était la pratique uniquement quand le nom de famille passe devant le prénom.

J’ai donc décidé de consulter les génériques de quelques films. Dans « Ni vu ni connu » de 1958, les noms sont écrits prénom devant nom de famille :

Même chose pour Fantômas, Le Mur de l’Atlantique, Le Trou Normand et Le Roman d’Un Tricheur.

C’est pareil dans l’en-tête du Canard enchaîné :

En tête avec de nombreux titres et noms, dont « Président, directeur de la publication: Éric EMPTAZ »

Je commence à me demander : est-ce que j’ai halluciné les noms de famille devant les prénoms ? Encore plus, est-ce que j’ai halluciné les noms de famille écrits avec seulement la première lettre en majuscule ?

Quant à ce dernier, Allociné me rassure que non :

Capture d'écran de la distribution de « Monsieur Aznavour » : Tahar Rahim et Bastien Bouillon
Capture d’écran

Savez-vous qui d’autre écrit les noms comme en anglais ? Le site officiel du gouvernement français :

De la page « Composition du gouvernement », une photo intitulée « Sébastien Lecornu, Premier ministre »
Capture d’écran

Ce qui rend la page « Composition du gouvernement » particulièrement délicieuse à cet égard, c’est que TV5MONDE dit aux élèves de la langue :

En français, le prénom est en général donné avant le nom de famille.
À la question : « Quel est ton nom ? » (informel) ou « Quel est votre nom ? » (formel), il faut dire le prénom avant le nom de famille.

Toutefois, dans un contexte formel ou administratif, à l’écrit, on met le nom de famille devant le prénom.

Donner son nom et son prénom dans le bon ordre

C’est quoi le contexte plus formel ET administratif que le tableau de service officiel des ministres ?

Cependant, pour revenir au mouton qui a lancé cette enquête, les blagues genre « Monsieur et madame ont une fille », ça rend la situation encore plus déroutante. En général, je les vois écrites, mais elles sont évidemment originalement orales, vu que l’humour vient de la prononciation. En plus, il s’agit de blagues. Il n’y a pas de contexte moins formel que ça ! Alors, comment diable est-on censé savoir dans quel ordre mettre les noms pour comprendre une de ces blagues ?

Langue de Molière vous reverra la semaine prochaine, et comme le Père Noël et le comte de Monte-Cristo, elle fait des listes.